«ON NE PEUT REDUIRE L’AVENIR DE L’APR AUX RETROUVAILLES DE LA FAMILLE LIBERALE»
SEYDOU GUEYE, SECRETAIRE GENERAL DU GOUVERNEMENT ET PORTE-PAROLE DE L’APR
L’actualité des derniers jours, avec notamment les attaques contre le régime venant des opposants, ainsi que la guéguerre entre responsables «apéristes», Seydou Guèye y porte un regard tranchant. Le Secrétaire général du gouvernement et non moins porte-parole de l’Alliance Pour la République (Apr), ne manque pas d’ailleurs de porter la réplique à Pape Diop et à Oumar Sarr, de recadrer l’appel à l’unité de la famille libérale de Diagne Fada, et aussi de confirmer ses vues sur la mairie de la Médina. Entretien…
Les attaques contre le régime fusent de partout, surtout à propos des emprunts obligataires et des décrets d'avance…
C’est vrai que les responsables de l’opposition font feu de tout bois. Dans leurs attaques, la mauvaise foi le dispute au manque de respect envers les Sénégalais. Pour des hommes qui ont pillé et ruiné notre pays, ils devraient avoir la décence d’être moins expansifs. Mais bon, bref… Quant à l’ancien président du Sénat, Pape Diop qui a déclaré, selon des propos rapportés par la presse, qu’en l’espace de seize mois, le Président Macky Sall a eu recours six fois à des emprunts obligataires, soit un nombre dix fois plus important qu’Abdoulaye Wade en douze ans, il fait dans l’amalgame et étale ses carences au grand jour. La connaissance de Pape Diop des finances publiques et des procédures budgétaires se révèle approximative et ses informations infondées, à tel point que l’on se demande s’il a du respect pour son statut d’ancienne deuxième personnalité de l’Etat et pour ses concitoyens. Et cela est très inquiétant pour un chef de parti qui souhaiterait briguer le suffrage des Sénégalais et partager son «Guis-Guis».
Tout le monde sait, sauf lui peut-être, qu’à son arrivée au pouvoir, le Président Macky Sall a trouvé une situation financière des plus catastrophiques, marquée par une accumulation d’emprunts à court terme, avec un service de la dette de l’ordre de 40% des recettes fiscales, insoutenable pour les Finances publiques. En seize mois, le gouvernement s’est attelé à maîtriser le déficit, qui a atteint son niveau le plus bas de ces douze dernières années, soit 5,8% du Pib et à amorcé le reprofilage de la dette.
Tout le monde sait, sauf lui encore une fois, que depuis l’arrivée du Président Macky Sall, plusieurs conventions ont été signées, pour un total de 485 milliards de francs Cfa. Grâce à son aura et à la bonne tenue de nos finances, l’appui budgétaire reçu de nos partenaires au développement a atteint pour l’année 2012, un montant de 168,9 milliards de francs Cfa, jamais atteint par notre pays. Cela traduit la confiance de nos partenaires au développement. Il y a quelques jours d’ailleurs, la notation du Sénégal est passée de négatif à stable, selon le classement de Standard and Poor’s, ce qui ouvre de nouvelles perspectives pour le développement de notre pays tel que consigné dans le programme Yonnu Yokkuté. Nous faisons du sérieux en économie. C’est cela la réalité.
Un sondage rendu public récemment a fait état de la colère des Sénégalais par rapport à la gestion du pays. Quel commentaire en faites-vous ?
Je ne pense pas que le sondage ait fait état de colère de la part de nos concitoyens. Cette enquête me semble mettre en exergue les impatiences démocratiques et les urgences sociales, telles que nos concitoyens les expriment depuis bien longtemps. C’est un message qui résume bien le désir de rupture pour une autre société, autour de laquelle le président de la République et le Gouvernement travaillent tous les jours avec détermination. La société de confiance et de vertu proposée par le président de la République et attendue par nos concitoyens est en train de se construire autour d’un nouvel ordre de priorités, d’une nouvelle vision du rôle de l’Etat, de notre vivre ensemble et de quelques piliers structurels qui, à terme, transformeront notre société. Premièrement, l’inclusion sociale de tous les Sénégalais, au travers d’une conception neutre et objective de la solidarité pour mieux lutter contre les injustices et les disparités sociales et territoriales, C’est tout le sens de la Cmu (Ndlr : Couverture médicale universelle) qui doit être entendue comme le droit à la santé pour tous dans un pays où seulement deux Sénégalais sur dix peuvent accéder aux soins de santé, et du programme de bourses de sécurité familiale dont deux cent cinquante mille ménages pauvres devraient bénéficier. Il s’agit ensuite de la restauration de la dignité à tous les citoyens par une mobilisation nationale pour l’emploi surtout des jeunes en créant une vraie chaîne de valeur autour des activités agricoles, des Tic, et d’autres secteurs à haute intensité de main d’œuvre, la création des dix mille emplois pour la sécurité de proximité, une composante essentielle de la nouvelle gouvernance sécuritaire dans notre pays, le financement des projets pour la promotion de l’auto emploi et le soutien à l’entreprise nationale et à tous les acteurs qui créent de la valeur ajoutée. Il s’agit enfin de créer et de pérenniser les bases de la performance économique et du véritable développement, à travers les mécanismes de financement innovant et endogène de notre économie, comme le Fongip, le Fonsis, la Bnde, ou d’autres instruments tels que le pacte de stabilité et de croissance qui fera l’objet de la conférence sociale que présidera le Chef de l’Etat au mois de septembre. Telle est la perspective tracée par le chef de l’Etat. Donc, on ne peut parler d’absence de vision encore moins d’inaction, car entre temps, la gouvernance sobre et vertueuse est en train de s’installer, l’impunité n’est plus garantie à personne, le train de vie de l’Etat a été réduit au minimum, le revenu des salariés a augmenté comme la pension des retraités, le monde rural a vu également ses revenus augmenter puisque le prix au producteur s’est fortement apprécié et les transferts ont été effectifs durant la dernière campagne agricole, car il n’y a pas eu de bons impayés. Il est vrai qu’il reste encore beaucoup à faire, comme il faut également reconnaître que les actes inauguraux du nouveau régime indiquent que nous sommes dans la bonne direction avec une claire conscience que l’urgence commande aujourd’hui de délivrer les solutions encore plus vite.
Dans l'affaire du Plan Jaxaay, Oumar Sarr a fait une sortie pour mouiller le Président Macky Sall et dénoncer des gré à gré déguisés. Que vous inspire cette sortie musclée du Coordonnateur du Pds ?
Hasardeuse, insipide et pathétique de la part du coordonnateur du principal parti de l’opposition nationale. Oumar Sarr est un comique surprenant, qui, toute honte bue, attend que ses proches soient en prison, que l’étau se resserre autour de lui, pour subitement retrouver la mémoire et se rappeler que Macky Sall était Premier ministre. «Il dirigeait les réunions de coordination du Plan Jaxaay, donc je peux m’accrocher à cet argument, ça va au moins semer le trouble dans les esprits», pense-t-il. Ce sont des arguments auxquels lui-même ne croit pas et les Sénégalais encore moins. Sa stratégie de défense reste foncièrement maladroite et légère. Au lieu de préparer sa défense, de prouver son innocence et celle de ses anciens collaborateurs, il cherche d’autres coupables. Une telle posture est indigne de son rang, de son parcours, et de sa responsabilité de rendre compte d’une gestion qui lui était confiée. C’est ça qui est utile, mais pas la comédie à laquelle il s’essaie et qui n’amuse personne.
Que pensez-vous de la guerre larvée entre des responsables de l'Apr, et pas des moindres, par presse interposée ?
De mon point de vue, elle est indécente et regrettable. Les Sénégalais, en portant le Président Macky Sall au pouvoir, ont également voulu jeter ces pratiques par-dessus bord. Les Sénégalais ne sont pas, mais pas du tout, intéressés par les luttes fratricides entre membres d’un même parti encore moins par les propos que notre morale réprouve ou l’exacerbation des individualismes ou égoïsmes. Faire de la politique, c’est agir «en commun et ensemble» et la responsabilité actuelle de tout membre de l’Alliance pour la République est d’une part de rassurer ses concitoyens par le discours, la posture et le comportement que nous sommes au travail pour le compte de la nation tout entière, et d’autre part, de renforcer la cohésion et la solidarité dans le cadre du parti. En tout état de cause, ce mode de présence en politique, fondé sur l’invective, la petite et vaine querelle ou les luttes de positionnement, ne présente aucun intérêt ni pour le parti ni pour le pays. Notre parole n’est plus neutre, elle préoccupe ou rassure. Faisons attention. En revanche, il nous faut, militants et responsables de l’Apr, garder à l’esprit que nos compatriotes nous regardent, analysent nos pratiques et nous recommandent de laver notre linge sale en famille et loin de leurs oreilles. Et ils savent bien eux, à quoi s’en tenir.
On vous prête l'intention de briguer la mairie de Médina. Qu'en est-il réellement ?
C’est vrai que j’ai répondu oui quand certains de mes compatriotes de la Médina m’ont demandé de poser ma candidature pour la charge de maire de la commune, lors des prochaines élections locales. Une telle réponse ne devrait guère surprendre pour le responsable politique que je suis à la Médina où je m’évertue chaque fois que possible à répondre à l’appel de cette «Belle Dame» qui fêtera ses cent ans en 2014. Avec ce centenaire, je voudrais, si Allah me prête vie, ouvrir une nouvelle ère d’opportunités pour les jeunes et femmes de la Médina, d’amélioration de notre cadre de vie, de construction d’une citoyenneté active qui redonne à chacun d’entre nous les moyens de son autonomie. Pour ce faire, il est évident que nous travaillerons à mobiliser et fédérer toutes les intelligences, toutes énergies et toutes les expériences disponibles dans ce quartier bien doté en la matière et dont l’identité et la légende font envie.
Modou Diagne Fada plaide pour les retrouvailles de la grande famille libérale…
L’honorable député Modou Diagne Fada, comme bien de membres de l’Apr ont tété le biberon libéral. D’autres membres de l’Apr ont été nourris par d’autres mamelles distinctes du libéralisme, ou sans coloration politique ou idéologique. Et c’est le cas de beaucoup d’entre nous, façonnés par les idéologies des partis de gauche ou qui sont entrés en politique avec l’Apr. Vouloir, dès lors, réduire l’Apr à une organisation issue des flancs du Pds et ne lui ouvrir comme avenir que des retrouvailles de la grande famille libérale, c’est perdre de vue que notre parti est une réalité politique, avec une identité propre, construite au sortir d’une expérience complexe et dans un contexte politique singulier. C’est également perdre de vue que le Président Macky est un leader au-delà des contingences partisanes et des certitudes closes comme il le prouve au quotidien. Sa perspective est certes le rassemblement, mais le plus large possible, dans un creuset où chaque Sénégalais aura son mot à dire dans le projet de modernité de notre société. En tous cas, telle est l’ambition originelle de l’Apr, mais pas la posture du repli sur un format dont les repères restent encore bien flous après Wade, et vus de notre Sénégal où l’urgence est à la création d’un élan collectif qui enjambe les frontières de nos partis respectifs.