«QUAND J’AI REGARDE LES IMAGES DE L’ANNIVERSAIRE DE L’APR, EN VOYANT CERTAINS VISAGES, J’AI EU ENVIE DE VOMIR…»
BARTHELEMY DIAS SUR L’ELARGISSEMENT DU POLE PRESIDENTIEL
Le leader des jeunesses socialistes n’apprécie pas que des «contrevaleurs» viennent adhérer à la mouvance présidentielle. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, hier, après qu’il a refusé d’avaliser le budget du ministère de la Santé, Barthélemy Dias a craché ses vérités par rapport à l’appel du Président Sall à d’autres forces.
On a remarqué que vous n’avez pas voté le budget du ministère de la Santé, alors que vous faites partie du groupe parlementaire de la majorité. Pourquoi ?
J’ai décidé d’apporter ma contribution, en refusant de voter le budget du ministère de la Santé. Parce que, je considère que c’est un budget de fonctionnement qu’on nous a proposé, et non un budget qui pourrait, éventuellement, permettre aux Sénégalais d’accéder à une santé de qualité. J’ai refusé aussi de voter, parce qu’il ne respecte pas les 15% du budget national, conformément à l’accord d’Abuja. Et je rappelle que, si on prend le montant de 2013, arrêté à la somme de 127 milliards, on verra qu’on a un gap de presque 300 autres milliards, pour pouvoir atteindre les 15%. Et en refusant de voter ce budget, j’envoie un signal fort au président de la République. Je reste convaincu que le Président est animé d’une volonté de développer le pays, j’interpelle sa générosité et son objectivité dans sa dynamique de vouloir développer le pays. La Santé, elle a un coût. C’est au ministère de la Santé de l’identifier. Et nous avons comme responsabilité, en collaboration avec le ministère du Budget, de voir comment trouver ces 300 milliards qui nous manquent, en mettant en place des mécanismes de financement d’une santé respectable et acceptable. Qu’on n’arrête d’espérer avoir une santé de qualité, si on refuse de mettre les moyens. J’invite le Président à lire l’ouvrage du Pr Kane, directeur de la cardiologie, à l’hôpital général de Grand-Yoff. Les gens ne peuvent pas continuer à mourir dans les hôpitaux, parce que les politiques refusent de mettre les moyens.
La Coalition présidentielle est en pleine mutation, avec l’appel lancé par le Président Sall à d’autres forces. Que vous inspire cet état de fait ?
Je respecte la position du président de la République, qui est chef de parti. C’est légitime et compréhensible qu’il veuille renforcer son parti et sa Coalition pour maximiser ses chances d’avoir un second mandat. Mais, je rappelle à l’endroit du chef de l’Etat qu’il nous avait annoncé que «Benno bokk yakaar» serait mieux structuré. Un siège a même été trouvé. Je reconnais avec le président de la République, qu’en politique, on additionne. Mais, je rappelle que nous nous sommes battus dans ce pays pour faire partir Abdoulaye Wade et certaines contrevaleurs. Quand j’ai regardé les images de l’anniversaire de l’Apr, en voyant certains visages, j’ai eu envie de vomir. Nous avons versé notre sang, d’autres ont perdu la vie, et certains, comme moi, ont même eu maille à partir avec la justice, pour faire partir Wade. Le Président Macky Sall gagnerait à ne jamais perdre cela en vue. Je réitère ma demande au chef de l’Etat de mettre en place un cadre de concertation, et de le faire de façon sérieuse. Je confirme les propos du Secrétaire général de notre parti, Ousmane Tanor Dieng. Nous sommes dans «Benno bokk yakaar», nous comptons y rester et travailler pour l’intérêt général. Mais, il y a aujourd’hui des individus qui se rapprochent du Président Macky Sall, ces individus ne peuvent apporter aucune crédibilité à son action. Le Président gagnerait à structurer «Benno bokk yakaar», à mettre en place un cadre de concertation.
L’absence des jeunes socialistes, lors du lancement des Jeunesses de la mouvance présidentielle (Jmp), a suscité moult commentaires…
J’étais absent du pays pendant quelques semaines. J’encourage ces jeunes. Je reconnais leur courage et leur engagement. Mais, vous comprendrez aisément que, si notre proposition de mise en place d’un cadre de concertation avait été concrétisée par le président de la République, à l’heure où nous parlons, le fait que les jeunes aient leur cadre, ne poserait pas problème. Malheureusement, ce qui doit être fait au niveau du sommet, n’a pas encore été fait. Je pense qu’il ne fallait pas mettre la charrue avant les bœufs. Maintenant, si nos amis considèrent que nous devons être dans ce regroupement de jeunes pour l’intérêt national, pour accompagner le président de la République, à travers des critiques constructives, nous sommes preneurs. Mais, si ce n’est que pour nous retrouver, et qu’il n’y ait aucun impact sur les réalisations du président de la République, je ne pense pas que ce soit utile.
«Benno bokk yakaar» revient souvent dans vos propos. Est-ce à dire que vous être contre sa disparition ?
Ceux qui veulent quitter ou qui pensent que cette structure n’est d’aucune utilité, sont libres. Mais, je considère que ce serait dommage que les Sénégalais pensent que les politiques passent leur temps à se payer leurs têtes. On se retrouve dans une Coalition pour faire partir quelqu’un, et après, chacun part de son côté. Ce n’est pas sérieux. Nous pensons que cette Coalition peut continuer à exister. Ceux qui prendront la responsabilité de réduire à néant cette Coalition, nous les invitons aussi à assumer leurs responsabilités. Beaucoup de gens s’excitent, aujourd’hui, sur cette Coalition, et ils ne sont même pas capables de remplir un car de transport. Une Coalition, ce n’est pas pour se partager un gâteau. C’est pour œuvrer ensemble, dans la sérénité, pour développer le pays. Nous, au Ps, nous ne sommes pas dans une logique de partage de gâteau. Nous sommes dans une logique de contribution pour un
développement durable et efficace.
Où est-ce que vous en êtes avec les renouvellements au sein du Ps ?
Les renouvellements se passent très bien ? Actuellement, certaines coordinations ont atteint les 75% requis, ils attendent le feu vert de la Commission pour pouvoir renouveler. Comme l’a dit Ousmane Tanor Dieng, avant les prochaines Locales, nous allons renouveler les instances de base de notre parti. Parce que, c’est ça l’essence d’un parti, c’est ça aussi la culture politique du parti. Nous nous réjouissons que le Ps intéresse autant d’observateurs de la scène politique. Nous avons l’intime conviction que le débat contradictoire est la source nourricière de toute formation politique, de toute démocratie interne.