À DAKAR, LA MENDICITÉ FAIT FI DES FRONTIÈRES
PHÉNOMÈNE DE SOCIÉTÉ
Venus, pour la plupart, de pays voisins, ils sont nombreux, hommes et femmes, à demander l’aumône dans les rues de Dakar. Les raisons avancées : difficultés de la vie et pauvreté.
Sur cette route qui longe le couloir de la mort de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, 2 jumeaux âgés à peine de 3 ans apostrophent les piétons pour leur demander de l’argent. Parfois, ils tirent sur le sac ou un pan de leur habit pour leur forcer la main. Ils comprennent à peine le Wolof. Les seuls mots qu’ils peuvent dire dans cette langue, c’est « mayma khaliss » (donne-moi de l’argent) ».
A la question de savoir où se trouve leur maman, ils font des signes qui montrent qu’elle s’est déplacée. A quelques mètres d’eux, une femme assise sur un seau berce son bébé. Aux passants, elle tend la main. Aïssatou K., une malienne de 21 ans, est mère de 2 enfants.
Elle vient de Koulikoro, une localité située au Sud du Mali, et vit au Sénégal depuis 10 ans avec ses parents. Ces derniers sont aussi mendiants. La raison de leur séjour dans notre pays est que la vie est difficile au Mali, disent-ils. « Il n’y a pas d’argent au pays et la vie est chère », explique-t-elle.
Après un moment de discussion, une forte pluie commence à s’abattre sur les lieux. Elle court se réfugier dans le bâtiment du Cesti. Mais dès que l’averse a cessé, elle rejoint la place habituelle où elle fait la manche.
Au même endroit, un groupe d’une dizaine de mendiantes vient s’ajouter au décor du couloir. Elles aussi sont Maliennes. Certaines refusent de répondre à toute question, alors que d’autres essayent, malgré les barrières de langue. C’est l’exemple de Famata D. qui vient de Bamako. Cette jeune fille ne connait pas son âge, car elle n’a pas d’extrait de naissance. Ces parents sont rentrés au Mali, la laissant seule avec sa petite sœur.
« Je mendie pour pouvoir manger et faire manger ma sœur. En plus, nous avons besoin d’argent pour payer la chambre qu’on a pris en colocation à la Zone de captage », livre la demoiselle. A sa gauche, une autre fille accepte de nous parler.
Elle s’exprime dans un wolof plus clair avec un accent gambien. Dieynaba F., puisque c’est d’elle qu’il s’agit, est une Malienne née en Gambie. Mais contrairement aux premières, l’argent qu’elle gagne servira à financer ses études. « Je mendie pour trouver l’argent nécessaire à l’achat de mes fournitures et habits », confie cette lycéenne.
Cap sur l’Avenue Bourguiba. Cet endroit est aussi le point de convergence de mendiants originaires du Mali. Ils se faufilent entre les véhicules, courent de voiture en voiture, à la poursuite d’une pièce. Issa Diarra est un infirme. Il est venu de Niafunké et a découvert le Sénégal depuis 6 mois. Auparavant, il a fait la Mauritanie et la Gambie.
« Nous préférons le Sénégal, car il est plus facile de trouver de l’argent ici qu’ailleurs. Dans les autres pays, les gens peuvent te donner à manger, mais l’argent, il faut travailler pour l’avoir », soutient-il.
Par ailleurs, certains parmi eux souhaitent rentrer au pays une fois qu’ils auront la possibilité de se trouver un logis. Mais d’autres préfèrent rester.