9 MILLIARDS A PAYER POUR SERVICES NON RENDUS
PAPE ALE GUEYE CONTRE SENELEC/ETAT DU SENEGAL
Pape Alé Guèye, le Directeur Général de Myna Distribution, a fait condamner l’Etat du Sénégal et la Senelec à lui payer la somme de 18 milliards de FCFA. C’est sous le couvert d’une partie d’un contrat non exécuté et dénoncé par la Senelec qu’il a décidé de porter plainte.
Des questions foisonnent dans le dossier Etat du Sénégal- Senelec/Myna Distribution. La plus fondamentale : pourquoi Myna Distribution a-t-elle obtenu gain de cause dans cette affaire ? Alors qu’elle n’a pas effectué les travaux de la 2ème phase du projet pour lequel elle réclame 18 milliards à l’Etat du Sénégal et à la Senelec. Pour s’insurger contre cette décision, la compagnie d’électricité (Senelec) a brandi le contrat sur la phase II de la Convention signée en février 2010 entre Myna Distribution et l’Etat (maître d’ouvrage du projet) et la Senelec (maître d’ouvrage délégué). Malgré la non-exécution de la deuxième phase, Pape Alé Guèye s’est présenté au tribunal avec ses avocats pour demander à être payé intégralement. L’Etat du Sénégal avec qui sa société a contracté s’est montré défaillant sur certains points. Le tribunal a ainsi condamné l’Etat et la Senelec à payer 18 milliards de FCFA à Myna Distribution. Une décision que la Senelec refuse d’avaliser. L’Etat et la Senelec sont invités à casquer alors que le service attendu de Myna Distribution n’a jamais été effectué dans le cadre de la deuxième phase du projet d’électrification, dénonce la Senelec qui en a informé l’Agent judiciaire de l’Etat. « La décision de justice condamnant l’Etat du Sénégal à payer 18 milliards de FCFA doit être interprétée comme autorisant la poursuite de la mise en œuvre du projet dans le respect des obligations contractuelles de chacune des parties».
La société de Pape Alé Guèye devait électrifier 746 villages et faire des extensions de réseaux en 2010-2011 pour un montant de 9 milliards de FCFA revolving sur deux ans, à compter de 2010. C’est le 16 février que l’Etat du Sénégal et la Senelec ont signé la convention de maîtrise d’ouvrage délégué relative au programme d’urgence d’électrification rurale 2010/2011 du 16 février 2010. L’Etat s’est engagé dans le cadre de cette convention dénommée Convention n° 20 à mettre à la disposition de la Senelec, les ressources financières consacrées à la couverture du projet d’électrification rurale. C’est ainsi que le 18 février 2010, une convention de crédit a été signée entre Myna Distribution et la Senelec. Il reste que concernant l’exécution de la Convention n°20, il est suffisamment établi que le maître d’ouvrage est l’Etat et la Senelec maître d’ouvrage délégué et qu’à ce titre, elle ne saurait être débitrice à l’égard de Myna Distribution Technologies.
Karim Wade s’en mêle
La première phase du projet n’a pas connu de gros couacs, même si Myna Distribution qui devait verser 2 milliards de FCFA à la Senelec dans le cadre de ses prestations doit un reliquat de 1 milliard 500 millions de FCFA à la Senelec. Cependant, l’Etat a été défaillant dans la deuxième phase. A la vérité, nous avons appris de source informée que c’est Karim Wade qui avait exigé que le projet ne soit pas poursuivi. Le tout puissant ministre d’alors avait avancé comme raison l’absence de budget pour couvrir les engagements. La Senelec a ainsi notifié à Myna Distribution l’ajournement de la Convention 20, le 25 janvier 2011. En tout état de cause, Myna Distribution qui avait sollicité le ministère de l’Economie des Finances pour demander le paiement, finira par assigner la Senelec et l’Etat du Sénégal. Les deux entités ont été condamnées solidairement à payer les 18 milliards de F CFA.
Maïmouna Ndoye Seck manipulée
La société de Pape Alé Guèye a indiqué qu’elle avait livré à la Senelec divers matériels d’une valeur de 14 372 655 900 FCFA. Du matériel d’une valeur de 1 325 980 765 FCFA était en souffrance au port et une valeur de 425 887 060 FCFA était disponible à l’étranger (sic). Et c’est fort de tout cela que Myna Distribution a demandé et obtenu la condamnation de l’Etat et de la Senelec, qui doivent lui payer solidairement la somme de 18 milliards 124 millions 523 FCFA. Dans un premier temps, le ministre de l’Energie, Maïmouna Ndoye Seck, se fondant sur ses investigations, a indiqué que la Senelec a reconnu devoir par note de ses avocats, avoir reçu dans le cadre de la Convention divers matériels d’une valeur de 14 373 655 990 FCFA. Pour le ministre, c’est sur la base de cette reconnaissance, du constat de matériel encore détenu par le fournisseur Myna Distribution Technologies pour un montant de 1 751 867 825 FCFA et des 2 milliards de FCFA à verser par Myna à la Senelec, que l’Etat du Sénégal a été condamné à payer la somme de 18 124 253 725 FCFA. En conséquence, la valeur du matériel pour la phase 1 étant fixée à 8 milliards de FCFA, Senelec a reçu pour la phase 2, du matériel d’un montant de près de 6 milliards de FCFA. Le ministre de l’Energie invite, sur cette base, la Senelec à rendre disponible le matériel et à démarrer la phase 2 du projet. Myna Distribution est par ailleurs invitée à livrer le matériel encore en sa possession sans délai ainsi que le versement du reliquat du montant prévu pour la prestation des entreprises.
Myna Distribution, en réponse à cette correspondance du ministre, a indiqué -sans préciser aucun délai- que le matériel restant qui représente le solde de la commande globale de Senelec, d’une valeur de 16 124 523 725 FCFA, sera mis à disposition. Senelec est priée de faire une demande de 1 751 867 825 F CFA. Plusieurs échanges épistolaires ont eu lieu entre les trois parties, notamment entre le 6 et le 26 mai 2014. Le Directeur général de Senelec a souligné à l’attention de Pape Alé Guèye, le Directeur Général de Myna Distribution Technologies, la nécessité de relire soigneusement les conclusions des avocats de Senelec. Que Pape Alé Guèye connaissant pertinemment les procédures de Senelec, le matériel d’une valeur de 5 952 394 855 FCFA que Myna Distribution Technologies évoqué auprès du ministre n’avait jamais fait l’objet de bons de commande ni de bordereaux de livraison, tel que prévu dans la Convention 20. Doit-on en conclure que Maïmouna Ndoye Seck, nouveau ministre de l’Energie, a été manipulée ? Probablement, indique un cadre de la Senelec qui souligne la complexité du dossier.
La Senelec dit être prête à recevoir le matériel de Myna distribution. La société a pu constater que le 30 avril 2014, Myna Distribution a fait venir devant son magasin de Yarakh trois conteneurs de matériel et s’est empressée de les retirer le 2 mai avant dépotage, prétextant qu’elle s’était trompée de destinataire.
Senelec se radicalise
La Senelec réclame dans le cadre de la phase II du projet d’électrification villageoise un montant de 7 704 262 680 FCFA et la mise à disposition de 1, 5 milliard de FCFA restant, pour le paiement des prestations des deux phases. Par ailleurs, la Senelec rappelle que Myna Distribution Technologies au titre du projet réseau phase II de Dakar doit 2, 6 milliards de FCFA. La procédure de recouvrement est engagée à ce niveau. La société d’électricité attend également de Myna Distribution la livraison du matériel objet de l’avenant à la Convention 20 d’un montant de 5,4 milliards de FCFA sans compter le retard dans la livraison d’une commande de plus de 279 millions de FCFA, pour ne citer que cela.
A la Direction générale de la Senelec, des voix s’élèvent pour rejeter les prétentions de Myna Distribution Technologies. La société qui est dans une phase de redressement ne veut plus laisser place à certaines pratiques. Depuis le changement de régime, c’est un nouveau climat qui s’est installé et le mot d’ordre qui y prévaut est la rigueur, révèle un cadre de la Senelec. « A son avis, quelle que soit la pression qui va s’exercer sur la Direction générale, « vous pouvez être convaincu que seule l’orthodoxie sera de mise. La société a trop vécu sous les scandales au vu et au su des anciens pontes du régime dont certains ont participé au pillage des deniers de la Senelec. Nous espérons que cette ère est dépassée et que dans le dossier Myna Distribution, la Direction générale ira jusqu’au bout ».