Accord entre Dakar et N'Djaména pour des enquêtes au Tchad sur l'affaire Habré
DAKAR, 03 mai 2013 (AFP) - Dakar et N'Djaména ont signé vendredi un accord devant permettre aux juges du tribunal spécial créé pour juger l'ex-président tchadien Hissène Habré, accusé de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité et réfugié au Sénégal depuis 1990, de mener des enquêtes au Tchad.
"L'accord de coopération judiciaire" entre le Sénégal et le Tchad a été signé à Dakar par les ministres de la Justice des deux pays, Aminata Touré et Jean Bernard Badaré, en présence de responsables du tribunal spécial mis en place pour juger Hissène Habré, a constaté un journaliste de l'AFP. Il "rendra possibles les déplacements des magistrats (qui) pourront mener leurs investigations sur le sol tchadien", a déclaré Mme Touré.
Le ministre tchadien a parlé de "phase décisive" dans le procès de M. Habré. "J'ai une pensée pieuse pour les victimes qui ont trop souffert et qui commencent à désespérer. Le procès ne peut se tenir sans que les enquêteurs puissent se déplacer au Tchad" et "il est important que cet accord soit signé", a-t-il dit. Le tribunal spécial mis en place pour juger Hissène Habré, doté d'un budget de 7,4 millions d'euros, est chargé de juger M. Habré pour des faits présumés commis entre le 7 juin 1982 et le 1er décembre 1990.
Il a été créé en décembre 2012 à la suite d'un accord entre le Sénégal et l'Union africaine (UA) et est formé de quatre chambres spéciales: deux pour l'instruction et l'accusation, une Cour d'assises et une Cour d'appel, formées de juges africains, dont des Sénégalais. Hissène Habré vit en exil à Dakar depuis sa chute après huit ans au pouvoir au Tchad (1982-1990).
Il est accusé de crimes contre l'humanité, crimes de guerre et torture. Des ONG parlent de 40.000 personnes tuées sous son régime. Le Sénégal avait été mandaté en juillet 2006 par l'UA pour juger M. Habré, mais l'ex-président sénégalais Abdoulaye Wade n'a jamais organisé de procès en douze ans de pouvoir (2000-2012).
Son successeur, Macky Sall, a exclu d'extrader Hissène Habré en Belgique, qui le réclame, et s'était très vite engagé à organiser un procès au Sénégal, promesse en bonne voie d'être tenue.