AVANTAGES ET LIMITES DE LA MEDECINE TRADITIONNELLE
Les vertus de la médecine traditionnelle qui remontent à des siècles sont incontestables. Cependant les principaux acteurs du milieu eux-mêmes reconnaissent les limites de certaines thérapies dont le point faible est le dosage, souvent source d’effets secondaires chez les patients.
Assis en face de dizaines de sachets contenant des poudres médicamenteuses, des bouteilles, des cornes d’animaux recouvertes de tissus rouges, des gris-gris… El hadji Ousmane Touré trône comme un roi sous sa tante sise à la rue 3 X Blaise Diagne à proximité du marché Tilène. Les poudres sont emballées dans des sachets recouverts d’étiquettes sur lesquelles on peut lire les inscriptions : «pipi au lit, fatigue générale, Maladies sexuellement transmissibles, hémorroïde interne et externe, constipation, lavage du ventre, impuissance sexuelle, problème d’accouchement, dermatose, démangeaison, maux de tête, maux des yeux, femme qui veut se marier, pour bon voyage (sic), pisser du sang, femme qui aime son mari (sic), courbature, mal de membres, mauvaise langue, diarrhée, chance, choléra, éjaculation précoce, homme qui veut récupérer sa femme, femme qui n’a jamais eu d’enfants, estomac et ulcère, rhumatisme, épilepsie, fièvre jaune, asthme, tension, lèpre, paludisme, sinusite, diabète, pour maigrir, arrêter de fumer, maux de ventre, vers intestinaux, hernie, problème de vue, mal de dent, fibrome, maux des os et reins… »
Piochant les dernières cuillères d’un plat de «thiou boulette» (sauce tomate aux boulettes de poisson, El hadji Ousmane Touré pousse l’assiette. On ne dirait pas que c’est son met préféré…
LA PUISSANCE SEXUELLE, LES MAUX DE TETE, LE PIPI AU LIT, EN TETE.
Le guérisseur traditionnel prend très au sérieux son métier qui lui permet depuis 31 ans, de nourrir sa dizaine d’enfants et ses deux épouses laissés au Niger à qui, il rend visite tous les 4 ans, pour une période de 4 à 5 mois. Tendant un reçu de 800.000 Fcfa pour un stand à la 22ième Fidak qui se tiendra du 28 novembre au 11 décembre, il soutient que les produits les plus demandés sont ceux qui donnent de la puissance sexuelle. Viennent ensuite les poudres contre les démangeaisons, l’hémorroïde, l’éjaculation précoce, les maux de tête, le pipi au lit …
Installé à quelques mètres d’Ousmane Touré, Ismaïla Cissé soutient que les maladies les plus soignées à son niveau sont l’hémorroïde, le diabète, les démangeaisons, les maux de tête, les corps qui sentent mauvais, les vers de ventre (NDLR : dianou biir en wolof), la chute des cheveux.
Installé à Tilène depuis 6 ans, Ismaïla Cissé, également originaire du Niger cite le cas d’une femme qui est venue le voir récemment, au bord du désespoir. Elle avait le corps recouvert de grands boutons. Elle était obligée de se couvrir entièrement chaque fois qu’elle sortait. «Je lui ai donnée un médicament à boire et un autre pour se laver et en une semaine, elle était guérie. Elle m’a appelé de la France pour me dire que tout allait bien. Elle a perdu beaucoup d’argent avec la médecine moderne, mais c’est finalement ici qu’on a trouvé le remède à son mal, par la grâce de Dieu».
PIED GONFLE, REGLES DOULOUREUSES, BOUTONS SUR LE CORPS...
Ismaïla Cissé a aussi été touché par l’histoire d’une femme qui avait d’atroces règles douloureuses. A chaque cycle, elle se tortillait pendant 3 jours, comme si elle allait accoucher d’un moment à l’autre. Ses parents qui avaient beaucoup dépensé en comprimés et autres injections, ne savaient plus à quel saint se vouer. Quand elle a commencé à prendre ses poudres, elle n’a plus ressenti de douleurs. Mais le problème c’est qu’il ne faut pas arrêter le traitement et en général quand les patients vont mieux, ils ont tendance à penser qu’ils peuvent se passer des poudres.
Ismaïla Cissé a aussi en mémoire une autre dame qui s’est présentée avec le pied gauche enflé. Elle a expliqué que beaucoup de marabouts lui ont dit qu’il s’agit d’un mauvais sort qui lui a été jeté par un membre de sa belle-famille. Elle a pris les bains et bu son médicament et en moins d’une semaine, elle a pu se déplacer jusqu’au marché Tilène, sans qu’on la tienne.
EFFETS SECONDAIRES D’UN MAUVAIS DOSAGE.
Souffrant de «ndokhoum siti», A.N a suivi plusieurs traitements prescrits par des dermatologues, sans succès. Un de ses proches l’a mis en rapport avec un guérisseur traditionnel qui lui a remis des bouteilles. En une semaine, il avait perdu au moins cinq kilogrammes à cause d’une diarrhée persistante provoquée par la prise des médicaments traditionnels. En fin de compte il a décidé d’arrêter le traitement et de continuer à vivre avec son mal.
La quarantaine, A. Bâ traîne un fibrome depuis quelques années. N’ayant pas les moyens de subir une intervention chirurgicale, elle s’est adressée à un guérisseur. Aux premiers jours de traitement, elle avoue avoir senti un léger mieux. Mais au bout de quelques semaines, les saignements qu’elle voulait arrêter ont repris de plus belle. Ce qui fait qu’aujourd’hui, elle a peur de la médecine traditionnelle »