BIBO A QUITTÉ LE SÉNÉGAL
APRÈS PLUSIEURS REFUS DE LA CREI, LE CO-ACCUSÉ DE KARIM WADE ENFIN ÉVACUÉ HIER EN FRANCE POUR DES SOINS
Il y a quelques jours, la Crei s’est transposée à la clinique du Cap pour entendre Bibo Bourgi. L’audition n’a pas pu avoir lieu, l’homme d’affaires n’étant pas en état de répondre aux questions des juges. Ses avocats avaient déposé une nouvelle demande pour que la Cour autorise son évacuation en France. La requête a été satisfaite depuis hier.
Ce fut long à arriver, mais Ibrahim Aboukhalil plus connu sous le nom de Bibo Bourgi a finalement été autorisé hier à aller se faire soigner en France. L’homme d’affaires sénégalo-libanais qui détient également la nationalité française s’est envolé, dans la soirée, à bord d’un vol de la compagnie SN Brussell Airlines, laissant beaucoup de questions (voir ailleurs).
Car dans le procès Karim Wade, il est surtout et essentiellement question de "prête-noms". Or, Bibo Bourgi est dans toutes les sauces. D’ailleurs, l’une des seules, et au vu des éléments de l’instruction, est que l’homme d’affaires est la clé de voûte de tout l’édifice (le dossier d’accusation). Il est cité dans presque toutes les affaires dans lesquelles Karim Wade est incriminé. Qu’il s’agisse de AHS et SHS, du projet EDEN ROC, de la société Dahlia LDT, etc., l’homme d’affaires est omniprésent.
Cette décision arrive donc après moult péripéties, même si depuis quelque temps la Cour de répression de l’enrichissement illicite avait montré des dispositions à aller dans le sens des conclusions des experts qui ont été commis pour évaluer l’état de santé de l’acolyte de Karim Wade. Déjà à l’entame du procès, le président Henri Grégoire Diop avait demandé aux avocats de la défense de soulever toutes leurs exceptions en même temps, afin que Bibo puisse être entendu dans les meilleurs délais et autorisé à se rendre en France pour se faire soigner. Mais, les conseils n’avaient rien voulu entendre.
"C’est à partir de Bibo qu’on a mis en place tout une stratégie de prête-noms ! C’est à partir de Bibo qu’on a mis en place toute l’accusation, l’inculpation", avait lancé Me Madické Niang. A sa suite, Me Demba Ciré Bathily déclarait avec persistance : "sa présence est exigée par les règles d’un procès équitable. Si on le fait sans sa présence, on violerait les droits de ses co-prévenus". Me Olivier Sur avait abondé dans le même sens en martelant : "en ce qui nous concerne, il ne nous paraît pas intellectuellement et judiciairement possible que le procès se tienne sans que chacun des chefs d’inculpation ne fasse l’objet de débat".
Par la suite, la contre-expertise commanditée par la CREI était venue confirmée l’état de santé précaire de Bibo Bourgi. Les rapports des deux experts commis, le médecin colonel Serigne Maguèye Guèye, chirurgien urologue et le Dr Ousmane Dièye, cardiologue, révélaient une insuffisance rénale liée à la présence de calculs dans les reins du coïnculpé de Karim Wade.
L’un des rapports concluait : "la présence à moyen terme du calcul au niveau du bassinet va détruire son rein. Ou être le point de départ d’une infection généralisée, une septicémie". Avant ces deux experts, le Dr Mbaye Paye, expert désigné par la commission d’instruction et le Dr Adama Kane avaient tout deux conclu à l’incompatibilité de la santé de Bourgi avec les rigueurs carcérales.
Enfin, dernièrement la Crei s’est déplacée à la clinique du Cap pour auditionner Bibo Bourgi, mettant les avocats de Karim Wade dans tous leurs états. Ils ne supportent pas de n’avoir pas été associés à la démarche et ils l’ont fait comprendre. Selon Me Baboucar Cissé, avocat de Bibo, ils n’ont rien raté, puisque l’homme d’affaires n’a pu répondre aux questions de la Cour qui a finalement autorisé son évacuation.