BIEN FOUS SONT LES CANDIDATS, PLUS FOUS SERONT LES ÉLECTEURS
ÉLECTIONS LOCALES DU 29 JUIN 2014
Il arrive des heures dans la vie des peuples qui mettent le cœur des hommes à rude épreuve. Des heures graves qui font tomber les masques et révèlent les personnalités véritables.
Ce sont les temps de guerre et, dans une moindre mesure, les temps des compétitions électorales, de contestations et de remises en cause.
Ce sont les temps des amours grandes et les temps de partage. Car le pouvoir politique, toujours, tout comme l’argent et la femme, met à nu le contenu des cœurs.
De la grande confusion
En ce début juin 2014, la poitrine des Sénégalais bat au rythme des élections locales prochaines. Hélas ! La folle prétention a pris la place dans le cœur de nos concitoyens, de la légitime ambition qui, là où elle existe encore, est amputée de ses frères jumeaux que sont l’intelligence, l’humilité et le sens de l’honneur.
Et dans cette grande confusion, tout le monde veut devenir conseiller municipal, maire ou adjoint au maire ; oubliant qu’on peut être utile à son Peuple, à sa communauté en étant hors du gouvernement et des conseils municipaux, en étant même hors des partis politiques.
Oubliant l’adage qui avertit : «Ne conquiers pas le monde si tu dois y perdre ton âme, car la sagesse vaut mieux que l’or et l’argent». Et, rappelle le sage, quel que soit l’objectif que tu vises, tu ne dois jamais perdre tes valeurs, car un homme sans valeur ne mérite pas le nom d’homme.
En vérité, la natte usée où tu dors la conscience tranquille est préférable à ce lit doré tant convoité où tu perds la dignité et aussi le sommeil.
Et les têtes des équipes sortantes des communes d’arrondissement de la ville de Dakar, les bonnes, les médiocres, les mauvaises et les très mauvaises têtes d’équipes, comme dans un monde à l’envers, se liguent dans une logique défiant le bon sens qui mêle les bien odorants et les mal odorants ; l’essentiel pour elles étant de conserver leur position quel qu’en soit le prix à payer demain par les populations.
Et la coalition au pouvoir vole en éclats partout à travers le pays, par défaut de coaching et surtout parce que ses membres ne partagent pas une même vision de l’avenir, parce que tout un chacun veut diriger et que personne ne veut suivre personne, personne ne veut être en reste.
Et rivalisent des coalitions aussi fantasques les unes que les autres où se côtoient politiciens professionnels, entrepreneurs d’affaires et autres chasseurs de primes et célébrités en quête de légitimité.
La folie des candidats
Et dans cette situation délétère faite de malhonnêteté généralisée, l’argent circule et corrompt les âmes, la haine s’empare des cœurs, l’aigreur et le mensonge empoisonnent les discours. Les liens de parenté se rompent, l’amitié est piétinée ainsi que la parole donnée, la courtoisie, l’élégance et le fair-play.
Et la violence verbale et physique devient la règle, ainsi que la vantardise, la gloriole, le tapage inutile et le maraboutage. On affabule à outrance, on invente des histoires à dormir debout pour se donner bonne conscience, on commandite des sondages mensongers...
En vérité, bien fous sont les candidats qui rêvent de conserver ou de conquérir le pouvoir politique local en sacrifiant leur qualité d’âme, de cœur et d’esprit, en sacrifiant l’estime des sages. Ils ne savent pas qu’il ne sert à rien de gagner les foules et se perdre.
Bien fou est l’homme qui immole sur l’autel de ses ambitions personnelles ses frères, ses sœurs et ses amis. Car il ignore, l’insensé, que les liens de parenté et d’amitié sont sacrés ; ils valent plus et mieux que le pouvoir politique. Bien fous sont les hommes qui veulent éteindre le soleil parce qu’ils sont amoureux de la pleine lune, menacés qu’ils sont par les ténèbres.
Bien fous sont les candidats qui, dans leur quête obstinée du pou- voir ou leur désir fou de sa conservation, en arrivent, emportés qu’ils sont par leur fougue guerrière, voire par l’ivresse de leur passion à oublier cette vérité essentielle que le pouvoir appartient à Dieu qui en confie une parcelle à qui Il veut le temps qu’Il veut et le retire des mains de qui Il veut quand Il le veut.
Bien fous sont les candidats qui oublient qu’ils ne peuvent que vouloir, travailler dur et prier ; tout le reste étant du ressort de Dieu.
Et les fous électeurs se divertissent
Bien fous sont les candidats, leurs militants et leur sbires qui ne voient, n’entendent et ne comprennent que ce qu’ils veulent bien voir, entendre et comprendre. Mais plus fous seront les électeurs, s’ils ne le sont déjà.
Car à considérer les esclaffements et les commentaires enjoués des citoyens à propos de déclarations, faits et gestes de compétiteurs, à voir ce sourire narquois sur leurs lèvres lorsqu’ils regardent et/ou écoutent les fous candidats, c’est comme si je les entendais fredonner le célèbre refrain : «Les singes, les singes, les siiiinges de mon quartier» ; se demandant peut- être aussi pourquoi ils sont si tristement naïfs, et pourquoi les meilleurs ne font presque jamais partie des compétitions électorales.
Ce qui semble donner raison au penseur qui disait : «Que toujours un fou se moque de l’autre, et que tous deux se divertissent réciproquement : souvent même c’est le plus fou qui rit de meilleur cœur du moins fou» et à l’humoriste qui ainsi blaguait : «En matière de sottise, les meilleurs candidats ne se trouvent pas toujours dans les troupeaux de moutons.»