BONNES NOUVELLES SUR LE FRONT DE L'ÉCONOMIE, MAIS À QUEL PRIX !
Les finances publiques nationales se portent bien même si, apparemment, nous revenons de loin ! Alors qu’on craignait la cessation de paiement, voilà que non seulement l’Etat a réussi à faire face au paiement des salaires depuis un an — l’ancien président de la République prétendait que son successeur serait incapable de le faire au bout de quelques mois —, voilà que non seulement il paye régulièrement ses échéances extérieures mais encore… il réussit à rembourser sa dette intérieure !
Selon le ministre de l’Economie et des Finances, M. Amadou Kane, qui faisait face à la presse dimanche en marge des travaux des experts de la Zone Franc, en effet, la dette intérieure d’un montant de 150 milliards de francs cfa est entièrement épongée. A en croire le successeur de M. Abdoulaye Diop, «nous avons trouvé des dérives budgétaires de plus de 600 milliards de francs». A force de rigueur et de sacrifices, ce déficit a été ramené au bout de 12 mois seulement à 425 milliards de francs. Ce qui fait que les déficits publics ont été réduits de 8,9 du PIB ( !) à 5,9 %, ce qui est une sacrée performance, même si ce niveau est encore très élevé. Mieux, le service de la dette qui bouffait presque 40 % des recettes a été fortement réduit tandis que la dette publique a été reprofilée.
Last but not least, l’inflation est tombée de 3,4 % en 2011 à seulement 1,4 %. Bref, les clignotants repassent progressivement du rouge au vert même si, pour le moment, ils sont plutôt à l’orange. Et si on sait que ces bons résultats ont été obtenus alors que l’Etat a renoncé à près de 29 milliards de francs d’impôts sur les salaires, histoire de booster le pouvoir d’achat des travailleurs, il y a de quoi enlever son chapeau pour saluer bien bas les performances de nos grands argentiers. Des exploits d’autant plus grands que, on l’a dit, le Sénégal revenait de loin. Du moins à en croire le ministre de l’Economie et des Finances.
En effet, dans la réponse apportée à la dernière sortie de l’ancien Premier ministre et leader de Rewmi, M. Idrissa Seck, indiquant que, loin d’être vides, les caisses de l’Etat contenaient la coquette somme de 417 milliards de francs au moment du départ du président Abdoulaye Wade, les services de M. Amadou Kane ont livré un tableau apocalyptique de la situation des finances publiques. Selon ce communiqué, au moment de la passation de service entre l’actuel ministre de l’Economie et des Finances et son prédécesseur, il y avait en tout et pour tout 12, 671 milliards de francs dans les caisses de l’Etat, « soit moins de 5 % des dépôts des banques et moins du quart requis pour faire face à la masse salariale mensuelle » ! On mesure l’étendue du chemin parcouru dans ces conditions…
Cela dit, est-ce l’effet de la politique de rigueur et du tour de vis budgétaire mis en place par le nouveau gouvernement ? Toujours est-il que jamais les Sénégalais n’ont senti un tel manque d’argent au point que la phrase qui revient le plus dans les conversations c’est « l’argent ne circule plus ». Dans ces conditions, nous dire que les 150 milliards de dette intérieure ont été intégralement payés et que, de plus, 28 milliards vont être restitués aux travailleurs — ce qui ne se fera que sur 12 mois, on l’a bien compris —, ça laisse pour le moins dubitatif.
Nous préférons croire au contraire que le remède de cheval administré à l’économie a été tellement fort que le malade est sorti du coma, certes, mais qu’il en a perdu l’usage de ses membres. Il va donc lui falloir entamer de longues et douloureuses séances de rééducation. Même si, encore une fois, cette thérapie de choc était sans doute nécessaire au vu de l’étendue des dégâts laissés par Wade et son gouvernement. Il reste seulement à souhaiter que les banquiers qui tiennent les manettes au sein de l’équipe Abdoul Mbaye, desserrent l’étreinte quelque peu afin de permettre aux Sénégalais de souffler…