''CE PROCÈS SERA SOIT EXPÉDITIF, SOIT COMPLAISANT''
ME ASSANE DIOMA NDIAYE, AVOCAT DES « VICTIMES DE HABRE »

Le procès de Hissène Habré ne sera pas équitable. C’est la conviction de Me Assane Dioma Ndiaye, coordonnateur sénégalais des avocats « des victimes de Hissène Habré ». Il s’exprimait hier, à l’occasion d’un atelier de suivi avec des journalistes organisé par le Consortium sur les Chambres africaines extraordinaires (Cae).
Me Assane Dioma Ndiaye, coordonnateur des avocats sénégalais des « victimes de Hissène Habré », a dit être sûr et certain que le procès de M. Habré ne sera pas équitable. A son avis, ce sera soit un procès expéditif, soit un procès complaisant.
« Nous ne nous faisons pas d’illusions », a soutenu l’avocat qui prenait part, hier, à l’atelier de suivi avec des journalistes organisé par le Consortium de sensibilisation sur les Chambres africaines extraordinaires (Cae).
L’objectif de cette rencontre de deux jours est de contribuer à une meilleure information des populations via les médias sur les activités de Cae.
Me Ndiaye a, en outre, regretté que l’Etat du Tchad n’ait pas procédé à la remise de Saleh Younouss Ali et Mahamat Djibrine dit Eldjonto comme souhaité par les Cae.
« Compte tenu de la connexité des faits et pour qu’on ne donne pas l’impression que c’est un acharnement contre Hissène Habré, il aurait été important que ces personnes soient jugées en même temps que l’ancien président tchadien », a estimé l’avocat.
Il a ajouté que les Cae ont une primauté sur les justices nationales et que l’Etat du Tchad est mal venu en évoquant une souveraineté nationale pour organiser le procès de ces personnes (Ndlr : le procès est ouvert au Tchad depuis vendredi dernier).
« C’est comme si on voulait couper- court à la demande des Cae. L’Etat du Tchad n’a pas de raison de précipiter les choses puisque les plaintes datent de 2000. Et depuis, nous avons fait toutes les démarches pour au moins avoir des actes d’instruction ; ce que nous n’avons jamais eu du doyen des juges du tribunal de Ndjamena », a fait savoir le bâtonnier.
« C’est vraiment une fuite en avant. On a accéléré, de façon injustifiée, ce procès alors que l’information n’a pas accompli tous les actes nécessaires. Nous pensons que l’idée, c’est de faire en sorte que les médiations en cours ne puissent infléchir la position de l’Etat du Tchad. Le fait de précipiter ce procès a pour conséquence d’écarter toutes possibilités de médiation », s’est-il désolé.
Me Assane Dioma Ndiaye a également précisé que les rôles des uns et des autres sont bien sériés dans cette affaire et qu’ils ont suffisamment d’éléments sur les personnes visées. Il a précisé que l’absence de ces personnes, aussi regrettable qu’elle soit, ne peut porter préjudice à la matérialité des faits et à leur imputabilité.
Abdoul Mbaye ne peut être poursuivi devant les Cae, selon un expert en droit
Hugo Jombwe, expert en droit international, a estimé que l’ancien Premier ministre Abdoul Mbaye ne peut aucunement être poursuivi devant les Chambres africaines extraordinaires (Cae).
A son avis, les Cae sont compétentes pour des crimes comme les génocides, les tortures, les crimes de guerre et autres. Cependant, a-t-il noté, on ne peut pas dire aujourd’hui que l’ancien Premier ministre aurait, de 1982 à 1990, participé à la commission de ces crimes au Tchad.
« Cela n’aurait pas de sens. C’est sûr que M. Abdoul Mbaye n’est pas concerné par cette procédure », a expliqué M. Jombwe.
Toutefois, il a précisé qu’il peut arriver qu’on cherche à prendre des mesures conservatoires concernant des biens qui appartiendraient à un des inculpés comme M. Hissène Habré et, dans ce cas, toute personne qui pourrait avoir des informations pourrait être entendue.