CES ÉTRANGETÉS QUI NOUS GOUVERNENT…
CHEIKH MBACKÉ GADIAGA, CHEIKH AMAR ET MIMI TOURÉ
Ce sont sans doute des questions que nous aurions dû nous poser avant de voter pour le candidat Macky en 2012, certes, mais l’urgence du moment nous a fait prendre des raccourcis. Fallait dégager de notre horizon le père «maa wakhoon, wakhète» et, sur ce point, y avait le feu.
Là, maintenant que la sérénité revient (partout, fépp, merci) faudrait commencer à se poser les questions qui fâchent.
La première, dans l’ordre des grandeurs, est liée à ce fait divers récent dont le personnage central se nomme Cheikh Mbacké Gadiaga, que la gendarmerie vient d’arrêter après un trimestre de traque.
Ce monsieur est un drôle de pistolet qui relie Cheikh Amar, homme d’affaires dispendieux à Aminata Touré, Premier ministre. Ce brave homme à l’imagination fertile nous concocte une affaire qui m’en tombe les bras. Une dame téléphone à Cheikh Amar en se présentant comme le Premier ministre. Elle a un souci urgent de trente millions Cfa. Cheikh Amar, dont la générosité est chantée par tous les opportunistes professionnels de notre pauvre pays, n’hésite pas une fraction de seconde. L’instant d’après, le chauffeur de madame le Premier ministre arrive, la bouche en cœur, et la mallette lui est remise…
C’est alors que commence le fait divers. Parce que si les trente millions étaient arrivés à bon port, les contribuables, encore moins les électeurs, ne l’auraient jamais appris. Manifestement, le chauffeur d’Aminata Touré connait le chemin.
Cheikh Amar a beau être généreux, il n’est pas un benêt. S’il n’avait jamais eu de relation de ce type avec Mimi Touré, avant de lui remettre trente millions Cfa (en espèces s’il vous plaît !) il l’aurait rencontrée (au moins pour la première fois) pour savoir de quoi il retourne. Au mieux, il aurait exigé des garanties de remboursement. Rien de tout ça.
Cheikh Mbacké Gadiaga, homme de main déchu, c’est frappé au coin du bon sens, connaît les relations qui relient Mimi Touré et Cheikh Amar. C’est à partir de cette certitude-là qu’il a monté son arnaque.
CHEIKH AMAR-MIMI TOURE : UNE RELATION DE CONFIANCE… SUSPECTE
Nous, nos doutes proviennent de la manière dont la relation Cheikh Amar-Mimi Touré s’est nouée… Au tout début de la deuxième Alternance, l’heure est aux règlements de comptes. Dans le collimateur des nouveaux maîtres du pays, Cheikh Amar, pièce centrale du dispositif Wade. Le petit peuple veut qu’on lui rende son sang, et Cheikh Amar en a beaucoup sucé… Par exemple, entre autres, le scandale de l’Artp, dans lequel six milliards Cfa lui sont versés avant même que le premier coup de pioche du chantier des immeubles de l’agence nationale ne soit donné.
On s’est posé aussi beaucoup de questions sur la manière dont les tracteurs indiens sont arrivés au Sénégal. Notre pays les prend à crédit sur vingt-cinq ans à l’Inde et les confie à Cheikh Amar. L’heureux bonhomme qui ne vend alors que du matériel d’occasion, se voit bombardé mandataire du Gouvernement. De cette opération, rien de transparent ne sera annoncé.
Faut-il se pencher sur les conditions dans lesquelles les phosphates de Matam lui ont été attribuées ? Bref, bien plus qu’Aïda Ndiongue, Cheikh Amar est dans le viseur des nouvelles autorités. Et c’est Mimi Touré, ministre de la Justice, qui est en tête de cette chasse à courre. Et puis, un beau jour, plus rien.
Au contraire, Mimi Touré, le Premier ministre ne cache pas sa préférence dans le marché de treize milliards Cfa de l’Agence d’Electrification rurale, sa préférence pour Lucky Export, une société de fourniture indienne dont le partenaire sénégalais est … Cheikh Amar, en dépit des décisions de justice qui indiquent une autre direction. Ce monde est décidément bien petit !
Est-ce à ce moment délicat dans les affaires du patron de Tracto Services Equipements que les liens, heu, d’amitié et de confiance (disons-le comme ça) se sont noués avec celle qui pilote alors la traque aux prédateurs, Mimi Touré ?
C’est sans doute le lieu de lui poser publiquement la question : Madame le Premier ministre, est-il vrai que vous êtes désormais propriétaire d’une des villas de la cité dite de l’Oci, dont le promoteur est, coïncidence troublante, Touba Real Estate de Cheikh Amar ? Si oui, à quelles conditions et à quel moment l’avez-vous acquise ?
Pendant que nous y sommes, nous poserons (pratiquement) la même question à un autre membre influent du Gouvernement, chargé de la Bonne Gouvernance, porte-parole du Gouvernement, Abdou Latif Coulibaly : il nous est parvenu qu’un membre de sa famille est également bénéficiaire d’une de ces fameuses villas de l’Oci sur la Corniche à proximité du Monument de la Renaissance… Est-ce exact ? A quel moment et à quelles conditions cela a-t-il pu se faire ?
Nous ne poserions pas toutes ces questions s’il s’était agi de simples citoyens qui n’ont pas eu, à un moment précis, le, heu, moyen d’être en relation avec Cheikh Amar alors qu’il était en délicatesse avec les nouvelles autorités.
Bien au contraire, aujourd’hui, ce bon monsieur Cheikh Amar est plus que dans les bonnes grâces du Pouvoir. C’est ce même brave talibé qui introduit Macky Sall auprès du khalife des mourides, de même qu’il accompagne Marième Faye-Sall lorsqu’elle se rend il y a quelque temps chez Serigne Sidy Makhtar Mbacké. Il est aux petits soins pour le couple présidentiel.
Et, ô miracle, peu après, quand le Sénégal décide de mettre à profit son partenariat avec le Brésil en allant y chercher des tracteurs, qu’est-ce qu’on apprend ? C’est à Cheikh Amar que le pactole revient. Il faudra une bronca des hommes d’affaires pour que l’on consente à faire un peu de place à un certain Ousmane Touré, patron d’Agripro, qui rafle 35% du marché des mille tracteurs brésiliens. Touré…
Son nom de famille ne vous rappelle rien ni personne ? A quel prix ce retournement de situation spectaculaire se fait-il ? Il faudra peut-être attendre la troisième alternance pour le savoir. Ça fait partie des étrangetés qui nous gouvernent…
Le p’tit railleur