CES ZONES D’OMBRE QUI PLOMBENT MACKY
RETOUR DU GRÉ À GRÉ, RECOURS ABUSIF AUX DECRETS D’AVANCE, HAUSSE DES SALAIRES DES DG, PCA ET AUTRES DÉPUTÉS…
La «gouvernance vertueuse et sobre», proclamée urbi et orbi par le nouveau pouvoir, serait-elle en passe de se transformer en vœu pieux au regard des derniers actes posés par la majorité présidentielle en termes de gestion des affaires de l’Etat ? En tout cas, force est de reconnaître que le retour en force des marchés de gré à gré, la « nébuleuse » des décrets d’avance pris par le président Macky Sall, l’augmentation « faramineuse » des salaires des Dg et Pca ou simplement celle des salaires des députés suscitent inquiétude et suspicion au niveau du citoyen lambda qui ne peut s’empêcher d’interroger sa qualité de vie à l’aune d’un « Yoonu Yokkuté » somme toute problématique.
La nébuleuse au parfum de gré à gré de l’ordre de plusieurs dizaines de milliards de F CFA qui plane sur la réhabilitation du Building administratif et sur la consultation restreinte utilisée dans le cadre de la construction de 2000 logements sociaux à Tivaouane Peulh (Jaxaay version Macky) vient ainsi jeter un voile de discrédit sur la gouvernance de rupture dont le nouveau régime avait fait son cheval de bataille. Relayées par la presse et notamment par le journal Libération, ces deux affaires risquent d’indigner, à elles seules, tous les adeptes de la bonne gouvernance, si elles se confirmaient.
Et surtout mettre à mal les nouvelles autorités avec les Sénégalais qui pensaient en avoir définitivement terminé avec les marchés de gré à gré dans lesquels excellait le pouvoir libéral sortant. Nos confrères de Libération rapportent ainsi, dans leur livraison de ce lundi, que les hautes autorités ont planifié de donner, sans le moindre appel d’offres, le marché de réhabilitation du Building administratif, siège du gouvernement, à un privé sénégalais. Lequel n’aurait jamais réhabilité ou construit le moindre bâtiment de sa vie. Dans la même dynamique, le journal informe qu’un procédé similaire de gré à gré s’est invité à Tivaouane Peulh dans le cadre du projet de construction de 2000 logements sociaux.
Loin d’être atypiques, ces nouvelles affaires qui viennent obscurcir l’attribution des marchés publics sous le régime de Macky Sall ont connu des précédents. Le prolongement de l’autoroute à péage menant à l’Aibd (d’un coût de 80 milliards de Fcfa) a été lui aussi qualifié de marché de gré à gré. Malgré les dénégations de l’Apix récusant un quelconque gré à gré concernant ledit prolongement qui aurait été attribué au groupe Eiffage sur la base de « la loi CET» de 2011, le Sénégalais lambda est resté sur sa faim. Idem pour la construction envisagée du Centre International de Dakar passée dans le cadre de la préparation et de l’organisation du Sommet de la francophonie à Dakar. Là, un coin du voile a été levé par le Forum Civil qui a indexé un gré à gré de près 269 000 000 FCfa attribué de manière injustifiée à « AAAB& Associés » par le Premier ministre. Ces diverses zones d’ombre dans l’attribution de certains marchés publics ont poussé certains observateurs à se poser une question simple. Les marchés de gré à gré tant décriés sous Wade, seraient-ils en passe de connaître un regain de dynamisme après une année de « Yoonu Yokkuté » problématique ?
DECRETS D’AVANCE A GOGO, DG ET PCA COMBLES
Mise à rude épreuve par ces affaires, la « gouvernance vertueuse et sobre » semble aussi avoir du mal à digérer certains autres actes posés par le pouvoir de Macky Sall. Un régime accusé d’avoir eu recours à moins de 15 mois de pouvoir à 26 décrets d’avance pour valider des dépenses envisagées en dehors du budget 2013 voté par l’Assemblée nationale. L’opposition au nouveau pouvoir n’a pas manqué de souligner la nébuleuse qui accompagnerait, selon elle, ces décrets pris par le président Macky Sall, forçant ainsi le ministre du Budget, Abdoulaye Daouda Diallo, à s’investir dans une tentative d’explication forcenée pour justifier les décrets d’avance en question.
Quid de l’augmentation supposée des salaires et primes des directeurs généraux et présidents de conseil d’administration ! Là, les sympathisants de la « gouvernance sobre » sont tombés des nues avec le décret 2012-1314 pris par le chef de l'Etat pour octroyer des salaires « faramineux », selon la presse, et des primes annuelles plus que « prodigieuses » à ces personnalités. Parmi ces DG et PCA, on citait ceux de l’Agence de l’Informatique de l’Etat (Adie), Ageroute, Agence de régulation des postes et télécommunications (Artp), Agence nationale de l’aviation civile et de la météorologie (Anacim), Agence de la gestion du patrimoine bâti de l’Etat, Agence nationale de la statistique et de la démographie du Sénégal (Ansds), Agence des aéroports du Sénégal (Ads) qui se retrouvent chacun avec un salaire de cinq (5) millions de FCFA et une prime annuelle de 21 millions de FCFA. Même les députés ont droit à ces… passe-droits qui turlupinent bien des citoyens. Alors que la précarité ambiante gagne de plus en plus les ménages, les « élus du peuple » ont vu leurs salaires augmenter sous l’effet … d’un problématique ajustement de leurs indemnités de logement.
Loin d’être exhaustifs, ces divers actes posés par le régime de Macky ont fini quand même par dévoyer l’espérance à la rupture tant vantée par la majorité présidentielle dans la conduite des affaires de l’Etat, selon bien des analystes politiques. Des observateurs qui ne peuvent s’empêcher de se demander si la politique politicienne ne serait pas en train de prendre le pas sur la gouvernance sobre pour ne pas dire la bonne gouvernance tout court. Surtout pour un régime qui semble encore s’embourber dans la demande sociale, malgré ses initiatives mitigées pour résorber les épineuses questions de la baisse de prix des denrées, de la gestion des inondations en temps d’hivernage, du retour des délestages, voire de la baisse du coût du loyer et de la lutte contre le sous-emploi.