DES INTELLECTUELS RÉCLAMENT LA RÉHABILITATION D’OMAR BLONDIN DIOP
Dakar, 10 mai (APS) - Plusieurs intellectuels ont fait part vendredi de leur volonté de faire disparaitre les zones d’ombre sur la mort en prison, le 11 mai 1973, de l'opposant Omar Blondin Diop, souhaitant que "le jeune Diop soit réhabilité pour sacrifices consentis pour la naissance d’un Sénégal libre".
Opposant à la politique "pro-occidentale" et "anti-populaire" du pouvoir de Léopold Sédar Senghor, Omar Blondin Diop est mort dans sa cellule, à la prison centrale de Gorée où il avait été interné, depuis sa condamnation, à trois ans de réclusion, pour "atteinte à la sûreté de l'Etat", par un tribunal spécial, le 23 mars 1972.
Le 14 mai 1973, le quotidien gouvernemental Le Soleil, reprenant le communiqué de l'administration pénitentiaire, écrit : ‘’La commission de surveillance des prisons (…) a constaté que le détenu Oumar Blondin Diop s’était donné la mort par pendaison dans sa chambre, aux environs de deux heures du matin’’. ‘’Ce n’est pas exactement la vérité. Blondin Diop ne s’est jamais suicidé. Nous croyons fortement à la thèse de l’assassinat.
Toute mort en détention doit être considérée comme un crime jusqu’à la preuve du contraire’’, a dit Dr Dialo Diop, intellectuel, leader politique et frère du défunt Omar Blondin Diop. Il s’exprimait au cours d’un forum de témoignages sur "Omar Blondin Diop : 40 ans après".
Cette rencontre organisée à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar à la veille de la disparition de Blondin Diop a réuni plusieurs intellectuels, des députés et des membres du gouvernement. ‘’Il y avait un rapport d’autopsie qui a cautionné la thèse du suicide, mais il y avait surtout un contre-rapport d’autopsie fait par le père de Blondin Diop qui était médecin pour démonter le certificat (de genre) de mort par suicide.
Le moment est venu pour dire la vérité aux Sénégalais’’, a insisté Dialo Diop. ‘’Il faut que la vérité se rétablisse au nom de la lutte contre l'impunité. Blondin Diop a été victime de l’opacité d’un système. Cette une figure intellectuelle et politique qui mérite d’être réhabilitée’’, a dit, pour sa part, le professeur Bouba Diop, enseignant à l’UCAD.
Le ministre d'Etat Amath Dansokho va plus loin. ‘’C’est tellement clair comme de l’eau de roche dans ma tête : Omar Blondin Diop a été assassiné. Il a été tué parce que les autorités de l’époque étaient convaincues que par son intelligence il pouvait fait partir le système’’.
M. Dansokho, un leader de la gauche sénégalaise, a plaidé pour la réhabilitation du défunt intellectuel. ‘’Un devoir de mémoire s’impose. Il faut une initiative allant dans le sens d’une reconnaissance nationale. Des établissements, des rues et pourquoi pas des universités, doivent porter le nom d’Omar Blondin Diop’’, a-t-il estimé.
Des proches et anciens compagnons d'Omar Blondin Diop, comme Alioune Sall Paloma, Hamidou Magassa du Mali, Boubacar Diallo, Dialo Diop, le journaliste Mame Less Camara, entre autres, ont apporté des témoignages pour passer en revue "la courte, mais riche vie de Blondin Diop", décédé à l'âge de 26 ans.