Dubaï dit BYE BYE
Xavier Ricou de l’Apix : "On est à la recherche de financements complémentaires pour la Zone économique de Diass
Dans son rapport 2013 sur le développement économique de l’Afrique, la Commission des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced) souligne que les zones économiques spéciales peuvent devenir un cadre attrayant pour les investisseurs. Mais au Sénégal, le départ en fanfare donné à la Disez tarde à se transformer en réussite.
Madame Obiageli Ezekwesili, à l’époque vice-présidente de la Banque mondiale pour la région Afrique, déclarait en 2009 que «les expériences spécifiques de la Malaisie, de Singapour et de la Chine dans la mise en place de zones économiques offrent une option stratégique pour le renforcement de la compétitivité». Le rapport 2013 de la Cnuced sur le développement économique en Afrique converge dans le même sens. «Les zones économiques africaines pourraient devenir un cadre de plus en plus attrayant pour les investisseurs nationaux et étrangers pour la commercialisation sur les marchés régionaux», soulignent les auteurs du rapport.
Au cours des dernières décennies, nombre de pays en voie de développement, notamment en Asie de l’est et en Amérique latine, ont installé des zones économiques spéciales (Zes) en vue d’accroître la compétitivité industrielle, les investissements directs étrangers (Ide) et de développer les exportations. La plupart de ces Zes offrent comme principaux avantages un régime douanier spécial, prévoyant des procédures douanières et administratives accélérées, un accès en franchise de droits aux intrants importés, des infrastructures plus faciles d’accès et plus fiables, un ensemble d’incitations fiscales, notamment des exonérations fiscales temporaires et des réductions d’impôts pour les entreprises.
En Afrique, la tendance est plus tardive. Elle se signale entre les années 1990 et 2000. Ils ont été nombreux, les pays africains à s’être orientés vers la création de zones franches après les difficultés économiques nées de l’effondrement du cours des matières premières agricoles. En 2009, on dénombrait une centaine de zones économiques spéciales sur le continent. Les exemples de réussite ne sont toutefois pas si nombreux. Hormis l’île Maurice qui a connu un franc succès, les autres pays ont connu des fortunes diverses.
Transfert de rentes, absence de contributions au renforcement des économies locales, faible compétitivité sont autant de raisons aux échecs constatés, souligne la Cnuced. Malgré ces divers aléas, les Zes ont connu un grand succès en Chine par exemple. Elles ont en effet beaucoup contribué à l’expansion chinoise, en fonctionnant comme des laboratoires pour expérimenter l’application de politiques et stratégies nouvelles, explique la Cnuced. Mais au Sénégal, l’expérience n’a pas été aussi heureuse. Le projet de Zone franche industrielle à Mbao dans les années 1970 n’a pas connu l’engouement attendu. A peine une quinzaine d’entreprises ont répondu à l’appel.
C’est dans ce contexte que le régime libéral a lancé en 2007 le projet «Dakar integrated special economic zone (Disez)» à Diass. Inscrit dans un vaste cadre, le projet intègre l’autoroute à péage, le nouvel aéroport international Blaise Diagne, ainsi que le fameux Port du futur. Prévu sur une superficie de 600 ha, la zone spéciale devait recevoir des investissements estimés à 800 millions de dollars, soit environ 400 milliards de francs Cfa sur 5 ans.
Au total, cet investissement aurait permis la création de 40 000 emplois directs et de 100 000 emplois indirects. Mais des années après, le projet connaît un sérieux coup de frein. Les promoteurs émiratis de Jebel El Ali free zone (Jafza) ont disparu des écrans. L’Agence de promotion des investissements (Apix), préposée à la reprise, avance à pas de caméléon. Le directeur des nouveaux projets de l’agence, Xavier Ricou, parle d’un possible démarrage avant la fin de l’année 2013.
La manière dont le montage de ce projet de Disez a été fait laisse pantois sur les priorités des dirigeants de ce pays. On se rappelle en effet que le gouvernement du président Abdoulaye Wade, alléché par les milliards que Dubaï promettait de faire pleuvoir sur le Sénégal, avait détourné le regard de l’argent du premier Millenium Challenge account (Mca) que nous accordaient gracieusement les Américains, dans l’optique de monter une zone spéciale industrielle à Diamniadio, moins de cinquante kilomètres de Diass, où devait s’implanter le projet doublon.
A l’époque, tous les thuriféraires du président Wade voulaient faire croire à opinion nationale que l’on gagnait au change, que c’était plus intéressant de travailler avec les pragmatiques Dubaiotes plutôt qu’avec les Américains, dont les règles étaient beaucoup plus contraignantes. Aujourd’hui, cinq années plus tard, on veut encore nous faire repousser les délais. Comme avec l’Aibd, qui est juste à côté. Comme par hasard.