DURER UTILEMENT AU POUVOIR
Si au moins, la longévité des Chefs d’Etat africains à la tête de leur pays apportait le développement, on pourrait leur trouver des circonstances atténuantes. Et c’est là où se trouve la différence fondamental entre l’Afrique et l’Asie...
Hier, s’est ouvert à Dakar, le procès de l’ancien président tchadien Hissène Habré pour crimes contre l’humanité et actes de tortures présumés. Quel que soit le bout par lequel on peut le prendre, il s’agit d’un évènement historique.
L’avenir nous dira de quel côté se trouve la vérité, car ce n’est pas ce procès qui sera l’objet de notre propos, mais plutôt ces dirigeants africains qui ne semblent avoir pour programme que « durer » au pouvoir et rien de plus.
Si au moins, leur longévité à la tête de leur pays apportait le développement, on pourrait leur trouver des circonstances atténuantes. Et c’est là où se trouve la différence fondamental entre l’Afrique et l’Asie en matière de leadership.
En Asie, on a certes enregistré de très longs règnes mais accompagnés de développement. On peut citer le cas de Singapour où le Premier ministre Lee Kuan Yew (décédé en mars 2015) a régné de 1959 à 1990 sans discontinuer.
Sous sa conduite, la cité-Etat a connu un développement fulgurant, devenant un des cinq dragons asiatiques en même temps qu’un centre régional financier et touristique sans parler de son port ultra-performant et de ses prouesses dans la haute technologie.
L’ex- Premier ministre de Malaisie le Dr Mahatir Ibn Mohamad qui est resté 25 ans (1981-2003) à la tête de son pays avant de démissionner est regretté par ses compatriotes même 12 ans après avoir quitté le pouvoir. La raison est qu’il a réussi à faire de la Malaisie, autrefois pays pauvre et traversé par des secousses ethniques, une puissance qui compte en Asie du Sudest.
L’industrialisation s’est faite à pas forcés et la population s’est mise au travail sous une discipline de fer alors que la corruption était combattue sans quartier. Et sa famille tenue à l’écart des affaires et de la politique.
On peut évoquer également le cas plus ancien de la Corée du Sud qui a connu un essor économique extraordinaire avec l’autoritaire Park Chung Hee qui dirigea le pays de 1962 à son assassinat en 1979. Comme nous venons de le montrer ci-dessus, il s’agit d’exemples de longévité au pouvoir qui ont été bénéfiques aux pays susmentionnés.
Mais quand on examine la situation africaine sur cette question, on se rend compte que notre continent a pris la direction opposée. Combien de pays africains ont été dirigés pendant 20, 30 ans ou plus par un même président et qui n’a réussi à apporter à son pays que pauvreté et sous-développement au moment où lui, sa propre famille et son clan s’en mettaient plein les poches ?
Point n’est besoin de citer des pays car chacun en connaît au moins une vingtaine. On se souvient de ce président fêtard en diable qui n’hésitait pas à affréter son avion personnel pour aller chercher de bonnes bouteilles de vin en Belgique, pour que la fête soit belle.
C’est donc au niveau du leadership que la différence s’est établie entre l’Asie et l’Afrique. Dans le premier continent cité, les dirigeants ont réussi à mettre le peuple au travail dans la discipline avec une ambition pour le pays et une vision très claire des objectifs qu’ils veulent atteindre.
Ils n’ont pas cédé aux intérêts étrangers au détriment de ceux de leur pays et ne se sont pas laissés influencer outre mesure par les vociférations des organisations de défense des droits de l’homme car pour eux l’ordre passe avant la liberté, et le devoir précède le droit.
En Afrique, un tel leadership a fait défaut dans beaucoup de pays où la jouissance du pouvoir a semblé être l’unique but de la lutte politique. Et les tentatives de s’accrocher au pouvoir en dépit de la limitation constitutionnelle des mandats, montre le chemin qui reste encore à parcourir.
Dans la région des Grands lacs, ils sont nombreux les présidents qui, à l’exception notable de Paul Kagamé au Rwanda, risquent de rester dans les petites flaques de l’Histoire en voulant s’éterniser au pouvoir contre vents et marées, sans que leur pays connaisse des avancées économiques appréciables.
Pour autant, tout n’est pas aussi glauque partout sur le continent. Des leaders ayant les intérêts de leur pays chevillés au corps, une ambition et une vision claire ont pris les commandes ces dernières années. Et c’est sur eux que compte l’Afrique pour trouver le chemin du développement.