ET SI LA PRESSE COOPÉRAIT AVEC LES ÉTABLISSEMENTS FINANCIERS ?
LE MODÈLE ÉCONOMIQUE EN QUESTION

Au 2ème jour de cette rencontre de la presse francophone une table ronde a été organisée sur le thème : « Les mutations des médias : quelle économie ? » Occasion saisie par les panélistes pour d’inviter les patrons de presse à aller vers des sociétés de banques au Sénégal pour lutter contre la précarité dans les entreprises de presse. Selon les professionnels des médias cette éventuelle coopération entre les sociétés de banques et les médias peut se faire dans le respect strict de l’indépendance de la presse.
C’est dans une salle pleine à craquer que la rencontre s’est tenue. « Les mutations des médias : quelle économie ? » est au ‘’cœur’’ des débats. Des professionnels des médias, d’Afrique et d’Europe, tous des pays francophones reconnaissent que le monde connaît de profondes mutations en matière de traitement de l’information et le public est devenu de plus en plus très exigeant.
Du coup, la presse doit également se moderniser davantage. L’objectif est de réduire considérablement les nombreuses critiques faites à l’égard des journalistes. Pour y arriver il faut des moyens garantissant ainsi la subsistance de certaines entreprises de presse, notamment au Sénégal. Au cours des débats les médias sénégalais ont été cités en exemple.
Les Enquêtes ou Grands Reportages de qualité nécessitent, de l’avis des panélistes, « des moyens financiers énormes ». Pour y arriver les médias doivent aller vers les sociétés de banques. Ça s’appelle sources de financements. Cette coopération entre médias et les sociétés de banques devient une nécessité.
« A mon avis le rôle premier des banques c’est de financer l’économie. C’est-à-dire de mettre du crédit à la disposition de ceux qui entreprennent et je crois savoir que les entreprises de presse en font partie et elles agissent au sein de l’économie. Par conséquent un partenariat devrait être tissé entre les entreprises de presse et les banques. Je ne comprends pas pourquoi il y a cette timidité des Directeurs des organes de presse pour aller vers les banques », déclare, Mamadou Ndiaye, journaliste sénégalais, producteur de contenu.
M. Ndiaye est convaincu que « historiquement les journalistes n’étaient que des employés dans leurs entreprises et il y a seulement deux décennies qu’ils sont devenus eux-mêmes des entrepreneurs mais dans leur plan de réalisation de leurs projets la banque n’intervient même pas.
Voyez- vous-même depuis hier (Ndlr : jeudi, date d’ouverture des travaux de l’Uipf) mais on évacue complètement un acteur qui est incontournable, c’est-à-dire la banque. C’est la banque qui prête c’est la banque qui accompagne, c’est la banque qui alerte ».
Auparavant, l’ancien correspondant de l’Agence de presse française (Afp) a insisté quant à la nécessité des entreprises sénégalaises à travailler avec les sociétés de banques. Mamadou Ndiaye constate que l’absence de coopération entre les deux entités est à l’origine de certaines difficultés dans les médias.
« C’est pourquoi la précarité est là », dit-il avant d’inviter les entreprises de presse à aller « vers les banques pour mettre fin à la précarité des journalistes. Ça va valoriser les journalistes. Une entreprise de presse doit d’abord répondre à une certaine obligation, payer les salaires des journalistes comme ça ils auront moins de soucis au quotidien et ils sont plus productifs. C’est valable pour la Radio, la Presse écrite, la Télévision et les Sites Internet ».
Cette position défendue par Mamadou Ndiaye crée le scepticisme chez certains panélistes. C’est le cas chez le Secrétaire général international de l’Union internationale de la presse Francophone, (UIPF). Jean Kouchner tire ainsi la sonnette d’alarme.
«Il faut effectivement être très attentif. Mais ça ne veut pas dire qu’il faut cracher sur les sources de financements, la question des prêts bancaires, la publicité par exemple, c’est un élément important l’équilibre financier des médias. Ça c’est vrai ».
Mais attention, dit-il, « il faut que les conditions dans lesquelles elles exercent n’aliènent pas la liberté de la presse. Parfois des médias qui ont été créés sans beaucoup de moyens utilisent des services de gens plus ou moins bénévoles, des gens qui sont inscrits au chômage, des gens qui se débrouillent mais qui sont tellement passionnés par ce métier ».
Jean Kouchner insiste beaucoup sur la liberté et l’indépendance des médias. « Il faut effectivement que les médias aient les moyens mais que cela soit fait dans le respect strict de l’indépendance mais que cela ne soit pas un moyen de pression financière, que ça soit les banques ou les États ou un annonceurs », alerte le Secrétaire général international de l’Union internationale de la presse Francophone, (UPF).