FACEBOOK, CIMETIÈRE DE NOS ILLUSIONS
Facebook, l’un des réseaux sociaux les plus prisés au monde, fêtera bientôt son milliardième utilisateur. Autant dire que les chances sont grandes pour que la plupart des gens qui liront cette chronique y aient un profil.
Au début, il y avait juste l’aspect pratique qui aimantait nombre d’entre nous. Cela faisait plaisir de retrouver des amis perdus de vue depuis des années.
Les visages ont changé, les situations ont évolué, les responsabilités aussi, mais oui, revoir des camarades de classe, des copains de jeu, des amis perdus, ça fait bouger de grosses vagues de souvenirs dans l’océan agité de la vie.
Il y avait ensuite le côté ludique du réseau qui permet d’empiler des « amis » d’un genre particulier, virtuels ceux-là, qui laissent leurs doigts pianoter des mots sympathiques sur leur clavier à l’occasion de votre anniversaire, défient la distance et l’anonymat pour vous faire la conversation, cliquent sur la mention « J’aime » au bas des photos que vous postez ou des réflexions que vous partagez.
Ces « amis » donnent de la consistance à la virtualité et vous apprennent, tous les jours, que les individualités, les singularités, les destins et les personnalités que nous malaxons comme la pâte du sculpteur, ne sont pas que des fragments de vie éparpillés dans l’univers, et que l’altérité est le carburant qui chauffe l’humanité.
Dans la vie de tous les jours, nous nous recroquevillons dans notre carapace dès qu’un inconnu nous aborde. Nous chérissons la méfiance comme si elle était la condition de notre survie.
Sur Facebook, nos milliers d’amis, éparpillés aux quatre coins du monde, nous invitent, tous les jours, à nous ouvrir, à nous intéresser aux autres, à briser la glace de la crainte, bref, à regarder plus loin que notre propre existence.
L’ « ami » qui vous envoie un « Joyeux anniversaire et longue vie » grâce à l’application « Anniversaires » de Facebook ne le sait peut-être pas, mais il donne raison à Shakespeare : « Qui néglige les marques de l’amitié, finit par en perdre le sentiment ».
URBANITE PERDUE
L’évolution aidant tout comme la massification des communautés, cet espace virtuel qui célébrait l’empathie ne parvient plus à filtrer les tares que nous fuyons dans le réel. Partager ses passions, ses goûts, ses émotions et ses sentiments avec ces amis est devenu un usage ringard de ce puissant outil créé en 2004 par l’étudiant Zuckerberg.
L’exécrable méfiance a repris le dessus sur la clairvoyance des hommes.Et pour cause ! Facebook, de plus en plus, se mue en un nid de fausseté dans lequel le piège est devenu la règle. Un visage angélique vous invite à l’accepter comme « ami », faites gaffe, c’est une voisine qui a emprunté une autre identité pour tester la consistance de vos sentiments pour votre femme.
Angelina X ou Eva Y se bousculent aux portes de votre profil pour se faire accepter comme « amis », ce sont pourtant des escrocs du Net qui cherchent des fissures dans votre carapace pour vous saigner.
Parfois, c’est une usurpatrice qui colle la photo d’une de vos connaissances sur son profil pour vous demander du crédit téléphonique ou de l’argent sous prétexte qu’elle est coincée dans un no man’s land.
Les histoires de drague, de chantage et d’escroqueries de toutes sortes sur Facebook alimentent la chronique quotidienne. Au point que nombre d’utilisateurs pensent aujourd’hui à fermer leur compte et ouvrir un autre dans lequel ils n’accepteraient que des gens qu’ils connaissent réellement.
Le filtrage pour éviter les pièges de la virtualité, tombeau de nos illusions.