GÉNÉRATION X
D'une équipe qui continue d'apprendre et dont la linéarité progressive ne cesse de surprendre, on ne saurait cependant trop chercher un mauvais pli. On met ses lenteurs à trouver le rythme d'une compétition dans le fait qu'elle la découvre
On peut faire le difficile et se dire qu'on ne pouvait s'attendre à moins de la part des "Lionceaux". Pour des finalistes du championnat d'Afrique face au Nigeria, se qualifier au second tour de la Coupe du monde est une exigence liée à leur statut. Dans ces compétitions de petites catégories et au plus haut niveau mondial, l'Afrique affiche avec bonheur, efficacité et réussite.
Ce Mondial Juniors, le Ghana l'a remporté en 2009. Trois places de finalistes sont également revenues au continent depuis la première édition en 1977 (Nigeria deux fois, Ghana une fois). Retrouver l'équipe nationale du Sénégal en 8e de finale de cette compétition, face à l'Ukraine, conforte donc un statut de deuxième équipe du continent.
Plutôt que de faire le difficile, on peut cependant tout relativiser et situer les "Lionceaux" au niveau de leurs limites et des incertitudes qui les accompagnent. Leur qualification en finale du Chan avait été difficile. Leur préparation pour aller en Nouvelle Zélande a été limite ; le sélectionneur national s'en est plaint avant d'aller à l'aventure pour cette Coupe du monde.
En Nouvelle Zélande, la première sortie a été une catastrophe. La défaite contre le Portugal a étalé tout le manque d'expérience du groupe, dans une compétition à laquelle il participe pour la première fois de l'histoire du football sénégalais. L'équipe était volontaire mais fragile, proche de la rupture à chaque fois que les Portugais montaient à l'abordage. Les dernières secondes du match lui ont été fatales, quand elle a pris deux buts pour finir par s'effondrer (3-0). Elle s'est reprise contre la Colombie (1-1, menant au score elle s'est faite rejoindre), avant de s'imposer face aux Qataris (2-1, menée au score, elle a fini par gagner).
Finalement, une défaite, un nul et une victoire ont suffit au bonheur national. La qualification des "Lions" s'est faite au meilleur des troisièmes et on la savoure d'autant plus que l'Argentine, six fois vainqueur de cette compétition, rentre à la maison.
Tout cela relève d'une bonne progression d'ensemble. On l'a sent dans le jeu, dans la manière de prendre en charge le cours des événements, dans l'affirmation des ambitions de groupe. L'équipe est volontaire, pas assez appliquée cependant, mais généreuse dans son effort et dans la recherche du résultat.
Il faut regretter que son apprentissage se fasse au forceps. Le parcours des "Lionceaux" en Nouvelle Zélande ressemble à s'y méprendre à leur odyssée au Chan : défaite contre le Nigéria (13), nul contre la Côte d'Ivoire (2-2) et victoire contre le Congo (4-3), pour une qualification en demi-finale. La linéarité et les convictions de l'équipe s'étaient forgées match après match. Elle avait appris à prendre le pouls de la compétition, pour ensuite s'affirmer jusqu'en finale, après une victoire contre le Mali en demi-finale (2-1).
D'une équipe qui continue d'apprendre et dont la linéarité progressive ne cesse de surprendre, on ne saurait cependant trop chercher un mauvais pli. On met ses lenteurs à trouver le rythme d'une compétition dans le fait qu'elle la découvre. Avec un encadrement technique qui manque d'expérience et des joueurs qui se cherchent autant qu'eux, ses errements se mesurent à l'exigence d'apprendre et elle s'en tire bien.
Affronter l'Ukraine, première du Groupe A devant les Etats Unis, ouvre tous les possibles. Ces 8es de finale arrivent dans une période où les "Lionceaux" affirment une meilleure maitrise de leur potentiel. Le complexe qui leur a été fatal dans les premières minutes contre le Portugal, n'est plus. Ils peuvent aller chercher l'absolu de la victoire devant des adversaires qui n'apparaissent nulle part dans le palmarès de cette compétition. Qui n'ont pas ce statut qui peut porter à la peur.
Avec cette place en 8e de finale, dans la succession des matches et avec un groupe qui apprend à se connaître et à afficher sa maturité, le Sénégal s'offre une sélection vis-à-vis de laquelle il est possible d'investir quant à l'avenir. Quelques mois plus tôt, avant le Chan de mars dernier, tout cela paraissait fait de bric et de broc. La voilà qui monte à l'échelle, non pas avec des lauriers, mais avec des succès d'estime qui laissent espérer des lendemains meilleurs.
La Génération de 2002 est née du championnat d'Afrique juniors de 1993, pour s'affirmer dix ans plus tard à la Can au Mali puis au Mondial CoréeJapon. D'ici huit ans, à travers des schémas de progression définis et maitrisés, les gosses d'aujourd'hui porteront peut-être le football sénégalais sur des tableaux de rêve, portant le label d'une Génération X.