HOLLANDE ENVOIE UN MANDAT À MACKY
ADOPTION DE LA LOI SUR LE NON-CUMUL DES FONCTIONS
La France a donné, mercredi, un signal fort de gestion vertueuse au Sénégal en adoptant le non-cumul de mandats. Un des engagements de Macky Sall zappé dans le Code des collectivités locales, et qui risque d’échapper au Code électoral. A moins que le Groupe en charge de la revue du texte en tienne compte, mais surtout qu’on en fasse une loi.
Au moment où le Président Macky Sall s’efforce de soumettre les administrateurs de crédits publics à la déclaration de patrimoine, la France a résolu le problème du cumul des mandats. Le parlement a adopté définitivement, mercredi, la loi sur le non-cumul des mandats à travers deux projets de loi.
Le Monde explique que «le premier interdit le cumul de fonctions exécutives locales – maire notamment avec un mandat de député ou de sénateur à partir de 2017. Le deuxième, similaire, concerne les parlementaires européens, à partir de 2019».
Le journal français précise que «le premier texte étant une loi organique, le Conseil constitutionnel sera automatiquement saisi à son sujet». Une «révolution démocratique» que François Hollande a réalisée, une de ses promesses électorales. Son homologue sénégalais, Macky Sall aussi en avait fait un engagement, mais qui tarde à voir le jour. Si l’on sait que le privilège d’être ordonnateur de plusieurs budgets expose les hommes politiques à des abus, à l’enrichissement illicite, la problématique du cumul des fonctions publiques se repose dans un contexte de révision du Code électoral.
L’Acte 3 de la décentralisation en est le prétexte. Autrefois, la fonction de président du Conseil régional n’était pas compatible à une fonction nominative. La loi n° 2012-01 du 3 janvier 2012 régissant le jeu électoral (L 237) dispose que «les conseillers régionaux nommés postérieurement à leur élection aux fonctions visées au premier alinéa du présent article auront, à partir de la date de nomination, un délai de trente (30) jours pour opter entre l’acceptation de l’emploi et la conservation du mandat.
A défaut de déclaration adressée dans ce délai à leur supérieur hiérarchique et au représentant de l’Etat, ils seront réputés avoir opté pour la conservation dudit emploi».
Président de Conseil départemental et maire incompatibles
Avec la nouvelle loi portant Code des collectivités locales et entraînant la suppression de la région, toutes les prérogatives des conseillers régionaux sont dévolues aux conseillers départementaux.
Il se trouve que beaucoup de ministres travaillent à devenir des présidents de Conseil départemental. La révision du Code électoral en cours risque d’élaguer cette disposition dans la mesure où les intérêts politiques de certains mandataires, surtout de la majorité présidentielle, sont menacés.
Or d’aucuns s’attendent à ce que le Groupe des 50 acteurs de la révision aille plus loin. Ceci est d’autant plus attendu que le président de la République avait émis le 13 mai dernier, lors d’une rencontre avec les responsables de son parti qui militent à Pikine qu’il comptait mettre fin au cumul des fonctions.
Le nouveau Code général des collectivités locales n’a pas réglé ce problème pour les élus locaux. Il a posé le débat de l’incompatibilité en ces termes : «Ne peuvent être maires ou adjoints, ni en exercer même temporairement les fonctions : les agents et employés des administrations financières de la commune où ils exercent, les ambassadeurs en poste dans les représentations ou fonctions diplomatiques, les présidents de conseil départemental.» Autrement dit, les fonctions de président de Conseil départemental et de maire ne sont pas cumulables.
«Oxygénation de notre démocratie»
La promesse présidentielle de mettre fin à l’exercice de plusieurs fonctions et, par conséquent, à la gestion de plusieurs budgets à la fois, avait trouvé un écho favorable auprès du président du groupe parlementaire Benno bokk yaakaar.
Dans un entretien accordé au Quotidien le 27 mai 2013, le président de la majorité parlementaire Moustapha Diakhaté avait banni l’exercice de plusieurs fonctions. «Si cela ne tenait qu’à moi, il n’y aurait jamais de cumul de mandats.
Je suis député, président d’un groupe pour un temps bien déterminé. Mais, de mon point de vue, il y a des responsables de l’Apr, de Benno bokk yaakaar qui sont tous aussi méritants que moi et qui peuvent beaucoup apporter aux collectivités locales dans lesquelles ils vivent. C’est pourquoi je suis pour la modification de la loi pour interdire le cumul des mandats», avançait-il.
Moustapha Diakhaté s’attend à la fin des cumuls à partir de l’application des réformes à proposer par la Commission nationale de réforme des institutions (Cnri) dirigée par Amadou Makhtar Mbow. «Je souhaite que toutes ces grandes réformes permettent une meilleure oxygénation et qu’elles soient votées.
Il faut éviter les oligarchies qui sont une poignée d’hommes et de femmes qui contrôlent tous les leviers d’un pays», défendait-il. Son camarade de parti et non moins député Moustapha Cissé Lô (qui n’est pas un administrateur de crédits), s’était démarqué en avertissant qu’il ne voterait aucun projet de loi interdisant le cumul des mandats et des fonctions.
Le «G50» chargé de la révision du Code électoral aura du mal à faire l’impasse sur cet aspect. Si jamais le cumul reste en vigueur, l’homme à qui le dernier mot revient, Macky Sall, raterait un levier important de prévention de la prédation des ressources publiques, en dépit de l’obligation de procéder à une déclaration de patrimoine.