IBRAHIMA SALL, ABC ET ALI COTTO NDIAYE MENACÉS D’EXPULSION
OCCUPATION ILLÉGALE DE LOGEMENTS DE FONCTIONS
Des sommations à trois ministres qui ont deux mois pour quitter leurs logements de fonctions désormais illégalement occupés après leurs servitudes ministérielles. C'est l'annonce faite à EnQuête par le directeur du Patrimoine bâti de l'Etat.
Lors du dernier conseil des ministres tenu au lendemain de la Tabaski, le président de la République avait «vivement dénoncé la situation actuelle, notamment le non respect de la régulation, le défaut de lisibilité dans les affectations, désaffectations et occupations de logements, les exagérations dans les conventions, les disproportions dans les standings». Macky Sall a ainsi opté pour «l’abandon progressif» de ces logements conventionnés qui coûtent les yeux de la tête à l'Etat «au profit du paiement des indemnités représentatives de logement, pour les ayants droit». Ces dispositions s’appliquent «en premier aux membres du gouvernement» et elles «devront conduire d’ici 2016 à la fin des conventions à la charge de l’Etat».
Le communiqué ne le dit pas, mais il est de tradition légale que toute per- sonne n’occupant plus des charges gouvernementales doit libérer le logement qu’elle occupe. Une disposition qui n’est cependant pas respectée par certains anciens ministres sous l’actuel régime. C’est le cas de Me Alioune Badara Cissé, ancien ministre des Affaires étrangères. Ce dernier, depuis son limogeage intervenu le 30 octobre 2012, continue en effet d’occuper sa maison de fonction. Le coordonnateur national de l’Alliance pour la République (APR), le parti au pouvoir, semble jouir d’un certain privilège comparé à d'autres anciens collègues, lui qui «refuse» de rendre les clefs de la villa sise à Fann résidence et qui avait été mise à sa disposition lors de sa nomination. C'est cette même villa qu’occupait d’ailleurs Me Ousmane Ngom, ancien ministre de l’Intérieur.
Aujourd'hui, Me Alioune Badara Cissé n’est pas le seul récalcitrant dans ce cas. Selon des sources dignes de foi, Ibrahima Sall et Ali Cotto Ndiaye, respectivement anciens ministres de l’Education nationale et de la Jeunesse, ont eux aussi jusqu'ici conservé leur logement de fonction. Devenus directeur de la Sicap pour le premier, et président du Fonds de développement du service universel des télécommunications (FDSUT) pour le second, Sall et Ndiaye avaient obligation de libé- rer leur habitation 6 mois après leur démission du gouvernement, conformé- ment à l’article 91-490 qui organise l’attribution, l’occupation et la libération des logements pour les ayants droit.
«Préavis envoyés il y a deux semaines»
Mais l’«expulsion» de ces anciens dignitaires ne va pas tarder à se faire, du moins si l’on en croit le directeur du Patrimoine bâti. Contacté par EnQuête, Aliou Mara révèle avoir servi une sommation à ces trois anciens ministres. «Nous leur avons envoyé des préavis il y a deux semaines pour qu’ils libèrent les logements (car) ils n'en ont plus droit. Ils ont deux mois pour s’exécuter», déclare le Dg du Patrimoine bâti, la voix ferme dans la sentence.
Pourquoi avoir donc attendu tout ce temps pour réagir ? «Nous n’avions pas voulu appliquer la loi compte tenu de leur rang», a répondu Aliou Mara. Qui rappelle dans la foulée les trois critères d’affectation des logements de fonction. D’abord, il s’agit de «toute autorité civile et militaire (ministres, procureurs de la République, chef d’Etat-major, etc»; ensuite le logement de fonction peut être affecté «par nécessité (professeurs, directeurs d’hôpital)» ; puis par «utilité publique». Une remarque concernant ce dernier cas : «Ce n’est pas une obligation ; on ne le fait que s’il y a un logement de l’Etat disponible» à cet effet, précise le directeur du Patrimoine bâti.