IDY, CHEF DE L'OPPOSITION ?
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Entre Macky Sall et Idrissa Seck, c’est presque fini ! Idy pourrait se mettre, désormais, dans les habits d’un leader de l’opposition renforcé par les mécontents du Pds.
Combien sont-ils à croire qu’Idrissa Seck est déprimé ? Sans doute l’écrasante majorité de l’opinion ! Sa dernière sortie sur les caisses de l’Etat est, en effet, moralement ruineuse. Une dame, accrochée par le micro-trottoir de la télévision privée Sen-Tv n’a pu contenir sa surprise, voire son indignation. « Mais où était Idrissa depuis lors ? », s’est-elle interrogée non sans arguments. Personne ne sait au nom de quelle logique Mara a pu dégainer ainsi.
Tout indiquait qu’il allait continuer à savourer les fruits de sa première prestation sur la RFM. Le discours était bien exposé, le moment bien choisi et surtout le médium, comme dirait Mac Luhan, porteur. Pour autant, ce qui ressemble à un retournement de situation en la défaveur du maire de Thiès peut bien être trompeur. Visiblement, Idy vise loin. Il cherche à occuper tôt un terrain jusqu’ici vide. Celui du fauteuil de patron de l’opposition. Terrain vide ? Assurément, car le Parti démocratique sénégalais (Pds) qui s’est vite déclaré parti d’opposition, n’a ni le temps ni les moyens intellectuels de s’y consacrer.
L’arrestation, ce lundi 15 avril de Karim Wade, en est une éclatante illustration. Le pouvoir va contraindre les libéraux à une opposition de jets de pierres et de course-poursuite dans les rues de Dakar. Alors que, forts de l’expérience de la gestion des dossiers, ils auraient pu se faire utiles dans les débats d’idées. Il délaisse un terrain où ils auraient pu inquiéter le pouvoir. Et éclairer l’opinion sur le discours des tenants du pouvoir.
C’est ce terrain qui s’offre au président de Rewmi. Il en a donné le ton. Lors de sa sortie médiatique du 25 mars dernier, Idrissa Seck a exploré tous les registres. Dans le jeu de tiroirs entre les versets coraniques et les adages, là où il excelle le plus, Mara a ébloui son auditoire. Il est parvenu, le temps d’une émission à la radio, à se positionner en sérieux adversaire du chef de l’Etat. Le petit peuple, friand en paraboles et en belles paroles, s’est retrouvé dans l’extase. Certes, le coup politique n’a pas été tout bénef. Deux ténors et compagnons de longue date, Pape Diouf et Oumar Guèye, sont sur des positions de défection. Tous les deux se sont désolidarisés des dernières déclarations de leur leader. Le déballage qui s’en est suivi est annonciateur d’une rupture certaine.
« Certains membres du secrétariat national sont venus me voir pour que le parti prenne l’option de ne pas faire de déclarations contre le régime de Macky Sall, afin de ne pas être exclus du gouvernement. Ils m’ont invité à ne dire que du bien du régime de Macky Sall, à le caresser dans les sens du poil, afin que l’on puisse dans les trois années à venir se refaire une santé financière ». Ces propos prêtés à Idrissa Seck en marge de la dernière réunion de son secrétariat national visent « ses » ministres. Sans compter que les rewmistes s’apprêtent à proposer au Parlement une commission d’enquête sur un marché « de gré à gré » sur les inondations. La cible ? Oumar Guèye qui avait d’ailleurs commencé à recevoir les premiers coups de l’ex-Dg de la Sones, limogé pour avoir quasiment accusé son ministre de tutelle (Ndrl : Oumar Guèye).
L’horizon d’une vie d’opposant se dégage pour l’ancien Premier ministre. Et la rupture avec Pape Diouf et Oumar Guèye part pour être un prétexte. Les rewmistes vont forcément crier au débauchage. La presse avait, en effet, commencé à spéculer sur un travail au corps du pouvoir, destiné à opérer la césure entre Idy et ses ministres. Idy opposant, le contexte lui ouvre les chemins du Pds. La « re-création » de la famille libérale devient possible pour Idy. Lui qui pourra dire à ses ex-frères qu’il n’a jamais démissionné du Pds. Qui ne souvient, de cette réunion du secrétariat national, un certain vendredi, qui a prononcé l’exclusion d’Idrissa Seck.
Alors que Wade s’était juré de ne jamais exclure Idy du parti. Même si, suite à sa missive à Wade, pour lui signifier qu’il ne pouvait pas être candidat à la dernière Présidentielle, les poitrines se sont chauffées de la chaleur des piments forts au Pds. Idy est proposé à la guillotine des gladiateurs de la Commission de discipline du parti. Il vient, volontiers, se donner à la furie de ses frères de parti. Le procès n’a pas lieu. L’épisode passe. Il décide d’y rester et d’attendre son heure. Parce que l’enjeu, c’est l’après-Wade. Cet « après-Wade » est là. Le Pds explose de toutes parts. Idy tout comme Macky en convoitaient des pans. C’est perdu pour Macky Sall.
Face, en effet, à la presse à Paris, le 9 juillet dernier, Macky a joué au blasé. « Les retrouvailles de la famille libérale ne sont pas une préoccupation », a-t-il concédé. Puis d’ajouter être ouvert en direction des militants du Pds décidés à venir travailler avec lui « pour asseoir un processus de développement cohérent du Sénégal ». Le tout est enrobé dans le concept de « compromis historique ». Une sorte de face théorique de la démarche et du débauchage tous azimuts de ces fruits mûrs du parti de Wade.
Président de la République, Macky Sall tient de bonnes cartes en mains. Il peut entrer en contact avec qui il veut, faire miroiter des positions. Des libéraux, surpris par la déroute du 25 mars, ne rêvent que d’être repêchés. C’est le cas de Kalidou Diallo et de Khoureïchi Thiam. Sa position a, cependant, quelques handicaps.
Arrivé au pouvoir dans une ambiance où la citoyenneté n’a jamais été aussi affirmée, Macky ne peut alors recycler n’importe quel cacique, au risque de s’exposer à la clameur de l’opinion. Et puis, dans son propre parti, des voix s’élèvent pour dire tout haut leur hostilité à la transhumance. Ameth Suzanne Camara et Youssou Touré s’illustrent à merveille dans ce registre. Ils s’opposent ouvertement à la transhumance de l’ex-ministre de l’Education, Kalidou Diallo.