IL N’Y A PAS DE GUERRE PROPRE
Habré en conférence de presse en novembre 84
Le Président Hissein Habré était bien au courant des messages d’alerte envoyés par Amnesty international. En 1984, en réaction à l’Ong, il a donné un point de presse où il répond et parle d’accusation gratuite avant de soutenir qu’il n’y a pas de guerre propre.
Après le témoignage de Mike Dottridge, le Parquet général voulait savoir si le Président Habré était au courant des nombreuses alertes d’Amnesty international. Le témoin répond vaguement devant la barre que dans ce contexte de conflit «tout était possible, mais pas probable».
Poursuivant, il déclare : «Ce serait étonnant et surprenant que l’ex-Président ne soit pas informé de nos nombreux appels, lettres et correspondances. Car ce sont les mêmes méthodes que nous avions utilisées dans d’autres pays et à chaque fois nous avions une réaction d’un chef d’Etat», témoigne-t-il devant la Cour.
Et c’est sur ces entrefaites que le procureur Mbacké Fall, sur l’autorisation du Président Gberdao Gustave Kam, a fait écouter à la Cour un élément sonore qui relatait une conférence de presse du Président Habré tenue en novembre 1984. On y entend l’ex-Président tchadien critiquer ouvertement Amnesty international et justifier en quelque sorte la violence de l’époque au nord de son pays.
«Il y a un certain nombre de groupes au sud qui ne voulaient pas jouer le jeu de la réconciliation. Le gouvernement avait donc pour mission de rétablir l’ordre et la sécurité. La guerre fait des victimes. Il n’y a pas une guerre propre. Aucune personne sérieuse ne peut l’affirmer. Cette guerre nous ne l’avons pas créée. On nous l’a imposée. Et nous ferons de tout notre mieux pour éviter des pertes inutiles. Les accusations d’Amnesty international sont gratuites. Il y a des personnes qui entretiennent une collaboration avec l’ennemi, la Libye. Elles seront arrêtées et jugées selon les lois en vigueur», tonnait le Président Habré dans cet entretien.
Juste après la diffusion de l’élément sonore, le témoin répondant au Parquet soutient que l’ex-homme fort de Ndjamena était bien au courant des correspondances d’Amnesty.
Il ajoute devant la barre que Habré, à l’image des protagonistes de la guerre froide, nie toujours son degré de responsabilité dans les crimes commis dans son pays. «Il a toujours l’alibi libyen consistant à rejeter la responsabilité sur une tierce personne plutôt que d’assumer son propre rôle», note-t-il.