"IL N’Y A PAS EU D’INFILTRATION, LE PRÉSUMÉ MEURTRIER ÉTAIT EN SERVICE COMMANDÉ"
COUP DE COLÈRE DES ÉTUDIANTS DE L’UCAD

Les étudiants de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) s’inscrivent en faux contre les propos du procureur de la République. Démontant Serigne Bassirou Guèye, ils ont réfuté la thèse selon laquelle le présumé meurtrier de Bassirou Faye avait infiltré les policiers présents sur les lieux du drame.
L’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) grouille du monde en cette après-midi caniculaire du mois d’octobre. Mais son campus social ne décolère pas. Après la mort de l’étudiant Bassirou Faye criblé de balles au mois d’août dernier lors d’affrontements entre forces de l’ordre et étudiants, les propos du procureur de la République faisant état d’une infiltration du présumé meurtrier suscitent l’indignation des étudiants.
Ainsi, la reprise des cours à l’Ucad après la trêve hivernale coïncide avec le rebondissement de cette affaire Bassirou Faye qui défraie la chronique. Hier, pendant que le calme semblait être revenu dans ce temple du savoir, nous y avons fait un tour pour tâter le pouls des étudiants. Mais, les étudiants rencontrés sont partagés sur l’affaire.
Toutefois, les sentiments les mieux partagés sont la frustration, le doute et l’incompréhension après la sortie "indélicate" du procureur de la République. Ils ont été atteints dans leur chair par les propos de Serigne Bassirou Guèye selon lesquels le présumé meurtrier serait un élément qui a infiltré les policiers réquisitionnés pour assurer la sécurité à l’Ucad.
Pour le responsable syndical Souka Dogue de la Faculté des sciences et techniques à laquelle appartenait le défunt étudiant, il ne pouvait pas y avoir d’infiltration dans la mesure où les policiers sur le théâtre des opérations avaient débarqué à bord de Pick Up.
"Nous rejetons avec la dernière énergie la thèse de l’infiltration avancée par le procureur. Le jour des faits, les étudiants décidés à barrer l’accès au campus social aux forces de l’ordre avaient obligé ces dernières à faire recours aux véhicules mis à leur disposition pour forcer le passage", martèle-t-il avant de s’interroger sur la présence du présumé meurtrier sur les lieux.
"A supposer que Serigne Bassirou Guèye ait raison, alors se pose la question de savoir comment le mis en cause qui ne pouvait nullement accéder seul au campus, a pu se retrouver auprès de ses frères d’arme pour dégainer sans être démasqué".
"Le meurtrier était un policier en service commandé"
Et d’ajouter : "la preuve, au début des hostilités seuls quatre policiers avaient réussi à violer les franchises universitaires. Ceux qui ont débarqué plus tard étaient à bord de véhicules venus en renfort", renseigne-t-il. Partant de ce postulat, le délégué de la faculté de sciences et techniques démonte avec véhémence le procureur.
"Les arguments de Serigne Bassirou Guèye sont très légers pour convaincre l’opinion et les étudiants meurtris. J’insiste et persiste, il n’y a pas eu d’infiltration. Si le tueur s’est retrouvé sur les lieux, c’est sûr qu’il était en mission commandée", martèle-t-il, invitant le procureur général à prendre son courage à bras le corps pour que justice soit rendue dans cette affaire.
A sa suite, son camarade de la Faculté des sciences économiques et de gestion (Faseg) Ababacar Cissé, étudiant en Master II, embouche la même trompette. "Les propos du procureur de la République ne tiennent pas la route. Pour masquer la bavure policière et la responsabilité pénale d’un agent des forces de l’ordre en service, ils ont inventé cette histoire d’infiltration pour trouver un bouc émissaire", fustige-t-il.
Après la sortie de Serigne Bassirou Guèye, les étudiants sont divisés. Si les uns fustigent et trouvent la communication du procureur de la république "infondée", les autres y voient un début de solution.
Trouvé au niveau de la direction du Centre des œuvres universitaires de Dakar (Coud), un étudiant en Licence II à la Faculté de Lettres modernes indique sous l’anonymat que l’Etat a respecté sa parole en disant depuis le début de cette affaire que "toute la lumière sera faite. Et c’est dans cette lancée, poursuit-il, que le procureur a fait face à la presse".
Toutefois, les étudiants qui ont pris bonne note après la sortie du Procureur Serigne Bassirou Guèye apprécient à leur manière les faits et "concoctent un plan d’action si rien n’est fait", renseigne Souka Dogue.