IMPUISSANCE
On se bat collectivement contre le terrorisme au Sahel, en Somalie, en Irak, en Syrie et en Afghanistan, mais en laissant le géant militaire africain aux pieds d’argile se débrouiller seul contre Boko Haram
Depuis que Boko Haram a pris à l’armée nigériane la base militaire stratégique de Baga, située sur les rives du lac Tchad, le mouvement terroriste semble être en roue libre. Encore une fois, l’armée a abandonné une position à la jonction des frontières entre le Nigéria, le Niger et le Tchad. Plus rien ne semble pouvoir arrêter maintenant le groupe terroriste qui impose sa loi dans l’Etat de Borno et commence à déstabiliser le Nord Cameroun.
Après avoir rasé 16 villages nigérians et massacré 2000 personnes il y a une dizaine de jours, il s’est attaqué, dimanche, à deux villages du Nord Cameroun qui ont été détruits et enlevé comme otages près de 60 personnes.
Toutefois, cette situation pose de multiples interrogations sur le Nigéria, pays considéré comme le géant économique de l’Afrique et qui se révèle étrangement faible et fragile face à Boko Haram.
Comment la première puissance économique du continent, avec un Pib de 510 milliards de dollars et un budget militaire de 5 à 6 milliards de dollars, peut-elle être aussi faible face à un groupe de faux djihadistes sanguinaires qui versent dans les tueries de masse depuis deux ans.
Pourquoi aucune protection n’est apportée aux populations du Nord du pays abandonnées à leur face à face solitaire et mortel avec Boko Haram. Même si on invoque parfois la présente campagne électorale au Nigéria pour expliquer l’étonnante inertie de l’armée, cela n’explique pas le sous-équipement dont font état les soldats nigérians face à Boko Haram. Alors, que fait l’armée de son gigantesque budget ?
Si l’on peut comprendre que les armées régulières puissent avoir quelques difficultés à s’adapter à la guerre asymétrique comme celle que livre le mouvement terroriste, pourquoi le Nigeria n’utilise pas des hélicoptères de combat pour compenser la faiblesse et l’absence de motivation de son infanterie ?
On a vu comment le Cameroun a pu contenir les assauts de Boko Haram sur son territoire en faisant intervenir son aviation.
Aujourd’hui, ce mouvement terroriste constitue une menace pour toute la région ouest-africaine, et une riposte équivalente doit lui être apportée. Depuis le sommet de Paris du 17 mai 2014 auquel avaient participé le Nigéria, le Cameroun, le Tchad, le Niger et le Bénin aux côtés de la France, ainsi que des représentants des Etats-Unis et de l’Union européenne pour un plan de guerre contre Boko Haram, rien n’a été entrepris concrètement pour la mise en œuvre des conclusions.
On se bat collectivement contre le terrorisme au Sahel, en Somalie, en Irak, en Syrie et en Afghanistan, mais en laissant le géant militaire africain aux pieds d’argile se débrouiller seul avec ses fous de Dieu qui ne sont pas les moins dangereux.
Cependant, on peut se féliciter de la décision du Tchad de voler au secours du Cameroun qui était devenu le seul pays résistant face à Boko Haram.
Quand on connaît la combativité et la valeur militaire de l’armée tchadienne, on peut s’attendre à de rudes coups portés aux « hommes » d’Abubakar Shekau. Mais, la lutte ne peut être gagnée par le Tchad et le Cameroun seulement.
Et c’est dans ce sens qu’il faut comprendre l’appel du président Deby qui demande la constitution d’une coalition africaine pour anéantir ce mouvement extrémiste.