KARIM, IDY ET LE BROUHAHA ENVIRONNANT
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L’image du Sénégal peut-elle être ternie par une opération de salubrité nationale ? Arrêter des personnalités de l’ancien régime, soupçonnées de s’être indûment enrichies avec les deniers publics, projette l’image d’un pays qui veut s’installer indubitablement sur le chemin de la vertu et de la bonne gouvernance.
Le leader de Rewmi, Idrissa Seck, appelle le gouvernement «à s’occuper des urgences au lieu de se focaliser sur le brouhaha interminable ». A la vérité, ce ‘’brouhaha interminable’’ est une absolue nécessité, car c’est le son du tocsin pour canaliser toutes les énergies aux fins que la bête (impunité) meure. Dame Justice n’a jamais connu forme plus étincelante depuis que la traque des biens supposés mal acquis a été lancée au Sénégal. Elle est dans une forme olympienne et son glaive brandi semble rassurer les Sénégalais, qui se sont souvent demandés ce qu’ils pouvaient attendre du 3ème pouvoir.
L’arrestation de Karim Wade accusé par le Procureur Spécial de la Cour de Répression de l’Enrichissement illicite, diversement appréciée selon qu’on soit dans un camp ou dans un autre, laisse entrevoir que le règne de l’impunité au Sénégal a pris fin. Après Karim Wade à qui le tour ? Des lobbies sont très actifs pour que certains dignitaires ne tombent pas dans les filets du Procureur Spécial. Leur brouhaha dérange et exaspère les Sénégalais désireux de voir justice s’accomplir. L’enquête qui dure depuis le mois de juillet dernier, a bouclé certains dossiers et conduit, dans une première étape, à l’arrestation de Karim Wade.
Le parquet a les coudées franches pour interpeller qui lui plaît, en se référant à la dernière sortie du Président de la République, en marge du « daaka » de Médina Gounass, samedi dernier. «On doit lutter contre l’impunité, car un pays ne peut se développer sans une bonne gouvernance, une gestion transparente des deniers publics ». Le Président de la République chasse toute idée de se venger, en répondant à ceux qui l’accusent d’avoir un esprit revanchard. Sur cette question, d’ailleurs, la classe politique sénégalaise s’est encore largement prononcée, en mettant l’accent sur le signal fort que l’Etat a lancé.
Un acte majeur, de l’avis de Ousmane Tanor Dieng, le Secrétaire général du Parti Socialiste ; alors que Idrissa Seck impute la déchéance de Karim Wade à son père et invite le pouvoir à s’atteler aux urgences, parce que la traque des biens supposés mal acquis renvoie une image très négative du Sénégal. Faut- il prendre au mot le leader de Rewmi, Idrissa Seck ? Le Sénégal, élève modèle en matière de démocratie, veut parfaire sa conduite en mettant en œuvre tous les instruments nécessaires. Et à ce niveau, la Justice, pilier indispensable pour réguler les rapports entre les êtres et avec les institutions, doit être parfaite.
C’est dans cette dynamique que sont interpellés les gestionnaires des deniers publics, les élus locaux et les parlementaires. Le Président de la République en fait une exigence. C’était le 15 avril dernier à Dakar, lors de la cérémonie d’ouverture du Conseil d’administration d’Open Society Fondation (Osiwa) une démarche qui ne sera véritablement utile que si elle est bien encadrée par les corps de contrôle.
On retiendra dès lors la sanction proposée par un responsable politique sénégalais, Ousseynou Faye, leader du Mouvement pour la renaissance républicaine (M2r),de faire adopter une loi qui empêche tous les détourneurs de deniers publics qui seront épinglés, d’être éligibles, ou d’exercer des fonctions dans l’appareil étatique.
Le climat de crispation que vit le Sénégal est en tout cas bien réel, avec les menaces que font peser les responsables du Parti démocratique sénégalais sur les journalistes. Habitués à casser du reporter, certains pontes de l’ancien régime sont impatients de replonger dans leur exercice favori. Qu’ils sachent que nous vivons désormais une autre époque.