L’ÉTAT ET LE CONTRIBUABLE PAYENT DES POTS QU’ILS N’ONT PAS CASSÉS
VOLS DES PLAQUES EN FONTE ET DES AVALOIRS
La fréquence des vols des plaques en fonte et des avaloirs n’est pas retombée. L’Office national de l’assainissement du Sénégal (Onas) est pris dans la contrainte du renouvellement récurrent de ces couvercles aux frais de l’Etat et du contribuable. L’occurrence de ces actes inciviques est symptomatique de l’attitude peu catholique que certains ont vis-à-vis du bien public.
Des ouvriers de l’Office national de l’assainissement du Sénégal (Onas) en tenues bleues discutent accoudés ou assis dans les pick-up près du bassin de traitement tertiaire de la station d’épuration de Cambérène. D’un moment à l’autre, ils seront sur le terrain pour une intervention. A chaque jour, son lot d’interventions. A premier étage de ce bâtiment, Abidine Diakhaté fait face à son ordinateur. La sérénité qu’il affiche trahit les dures réalités du secteur qu’il gère. Quelques minutes plus tard, un élément vient lui rappeler les réparations à faire près d’une mairie. La vie de ses éléments est rythmée par des interventions. « Le vol de plaque des regards se poursuit. C’est un phénomène qui prend de l’ampleur, parce que c’est une matière qui est revendue depuis que le marché de la ferraille a été ouvert au Sénégal », dévoile le chef de service de la région de Dakar de l’Onas, Abidine Diakhaté. Le technicien parle de cette problématique avec préoccupation. Des quartiers comme la Médina ont une réputation peu enviable. Cette agglomération détient la triste palme de renouvellement des plaques et avaloirs. « Dans ma zone, je renouvelle en moyenne 3 plaques par semaine. Dans le quartier de la Médina, vous pouvez changer une plaque aujourd’hui et revenir le lendemain voir que celle-ci est enlevée, parce que nous avons un réseau unitaire qui est vétuste. On l’ouvre souvent pour mettre des eaux usées et des ordures », dit le technicien.
Une grille avaloir au milieu de la chaussée coûte 126.000 FCfa alors que la plaque en fonte installée sur les accotements est facturée à 85.000 FCfa. Mais qui paye ces pots cassés ? « Le coût des renouvellement est supporté par l’Etat et par les impôts. Le vol des avaloirs peut être à l’origine de la destruction des cardans des voitures. Par inattention, des personnes peuvent se briser des jambes », regrette- t-il.
L’AUTRE VOCATION DU RÉSEAU DES EAUX USÉES
Une carte sur un tableau donne une vue globale du réseau de Dakar. L’Office national de l’assainissement du Sénégal (Onas) a un réseau linéaire de 600 km d’eau usée et à chaque 30 mètres, il y a un regard fermé avec une plaque en fonte. Dans plusieurs quartiers de Dakar, certains Sénégalais ont donné d’autres vocations au réseau d’évacuation des eaux usées. « Chaque mois, nous curons au moins 18 km de notre réseau à cause des obstructions. Beaucoup de personnes déversent des ordures dans les conduites », souligne Abidine Diakhaté. Le curage est facturé à 1.500 FCfa par kilomètres carré. Cette somme peut paraître modique pour certains. Mais le cumul depuis la création des réseaux usés aidera à évaluer le tribut que certains font payer à l’Etat et à d’autres Sénégalais. Dans la rue, comme à Yarakh, Boubacar Diallo s’alarme de l’attitude de ceux qui ne se soucient pas du bien public. « Ce n’est pas normal que d’autres cherchent à se faire de l’argent sur le bien public. Ce n’est pas aussi juste que des Sénégalaises et des Sénégalais transforment des conduites en dépotoirs d’ordures. Ce sont des comportements qu’il faut dénoncer », pense-t-il. Dans le huppé quartier des Maristes, les résidents ont l’air pressé. Ils cherchent à prendre au plus vite un bus ou un taxi pour aller vaquer à leurs occupations. Ici, les rares interlocuteurs indexent le manque de civisme. « Chacun dit que c’est un bien public, donc il se désintéresse. Il est temps que l’on change », déclare Sabir Sow, à travers ses lunettes sombres. En réponse aux vols, l’Onas a déposé des plaintes dans plusieurs commissariats de police ou brigades de gendarmerie du Sénégal. Certains fautifs ont été traduits en justice. La réflexion est en cours pour trouver des solutions durables. Parmi elles, l’introduction des plaques composites.