L’ARMÉE DEVANT SONATEL ? IL EST PERMIS DE RÊVER !
Jusqu’ici, on connaissait le concept d’ "Armée-Nation" visant à associer la Grande Muette au chantier d’édification de la Nation à travers la construction d’infrastructures ou diverses prestations dans le domaine social, la santé notamment.
A cet effet, partout où des casernes sont implantées à travers le territoire national, leurs infirmeries ou hôpitaux sont ouverts aux populations environnantes.
De même, l’Hôpital Militaire de Ouakam soigne indistinctement civils et militaires. Sur le plan des infrastructures, beaucoup de routes et de pistes rurales, mais aussi d’écoles et de digues, ont été construites par l’Armée.
Aujourd’hui, il va falloir sans doute s’habituer à un nouveau concept, celui d’Armée-SA (Société anonyme) même si ce vocable est de nous. En effet, de plus en plus, notre Grande muette entend investir le champ économique.
Et devenir un acteur économique à part entière. Pour ce faire, elle vient de monter des unités industrielles qui vont fabriquer — ou conditionner — de l’huile, du lait, des eaux minérales, des pâtes d’arachide, etc. Des manufactures qui vont s’ajouter aux boulangeries industrielles dont l’Armée dispose déjà.
Comme l’explique notre collaborateur Pape Ndiaye dans cet article, le but… de la manœuvre (sans jeu de mots), c’est de permettre à nos militaires de réaliser leur autonomie en matière d’approvisionnement de la troupe.
En effet, face aux pénuries récurrentes que connaissent certaines denrées dont les soldats sont de gros consommateurs, il n’était pas prudent de laisser cet approvisionnement entre les mains d’industriels civils desquels dépendrait le ravitaillement de nos troupes, qu’elles soient en caserne ou en campagne.
Surtout, représentant à elle seule un marché extrêmement important, l’Armée a donc entrepris d’être son propre industriel. On n’est jamais mieux servi que par soi-même ! Il s’y ajoute que, de même que l’on dit que la guerre est une affaire trop sérieuse pour être laissée entre les mains de militaires, de même, on pourrait dire que l’approvisionnement des forces armées est une affaire trop sérieuse… pour être laissée entre les mains de civils !
C’est tout cela donc qui a poussé l’Armée à se lancer dans les activités économiques. Et ça ne s’arrête pas seulement aux manufactures puisque, comme nous avons le plaisir de le révéler, elle se lance aussi dans la promotion immobilière.
C’est ainsi que, à travers sa Fondation des Invalides et Mutilés, dirigée par le très entreprenant colonel (à la retraite) du génie Makha Keïta, elle vient de réaliser un superbe immeuble sur la rue Vincens.
Ce R+9 se dresse majestueusement à l’emplacement de ce qui était naguère un célibatorium renfermant des chambres de passage pour officiers en mission à Dakar. D’un coût de deux milliards de francs, l’immeuble a été construit sur financement de la Société générale de Banques au Sénégal (SGBS).
Après le succès de cette première opération, et l’appétit venant en mangeant, nul doute que l’Armée va multiplier les réalisations immobilières d’autant plus qu’avec l’Eglise— et la communauté léboue !— elle est l’institution qui dispose le plus de terrains au Plateau de Dakar.
Des réserves foncières qu’avec de bons montages financiers, elle pourra transformer en immeubles de rapport. Elle pourrait aussi, à travers le Génie militaire, qui dispose de l’expertise et des engins nécessaires, soumissionner dans les appels d’offres pour la construction de routes, de collèges, de ponts, etc. Pourquoi pas ?
Ce faisant, nos "Diambars" marcheraient sur les traces de l’armée égyptienne qui, elle, c’est connu, est une véritable puissance économique, un Etat dans l’Etat. Cet Armée représente en effet 20 à 40% du PIB du Pays des Pharaons et crée environ 20% des emplois nationaux.
Elle possède des fermes, des unités de fabrication d’huile d’olives, d’eaux minérales, de pâtes et même de fer et de ciment ! Mieux, elle produit aussi des armes (fusils, grenades, munitions et même des blindés, notamment le fameux char Abraham).
C’est un exportateur d’armes, en particulier au Moyen-Orient, une activité qui fait entrer en moyenne un milliard de dollars (500 milliards de francs cfa !) chaque année dans ses caisses. Elle a aussi des compagnies d’assurance.
Bref, comme on dit en Egypte, l’Armée fabrique ‘’des aiguilles jusqu’aux fusées". Et de fait, l’armée égyptienne, qui réalise un chiffre d’affaires annuel de cinq milliards de dollars (2500 milliards de francs Cfa) commercialise même des vaccins.
Bien évidemment, l’Armée sénégalaise est loin de ces performances mais il est permis de rêver du jour où elle réalisera ne serait-ce qu’un chiffre d’affaires de 100 milliards Cfa…