LA HANTISE DES FINS DU MOIS DIFFICILES
OUSMANE IBRAHIMA DIA, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE LA SECTION SYNPICS DE L'APS

L’agence de presse sénégalaise (APS) est un fleuron de l’espace médiatique sénégalais et une agence une référence dans l’espace francophone, créée à la veille des indépendance. Mais depuis quelques années, l'agence traverse d’énormes difficultés qui sapent le moral de son personnel : la production est en chute libre, l'accès au site est pafois inaccesible, les directeurs qui se sont succédé après Mamadou Koumé, peinent à maîtriser la gestion de la boîte. Dans cette interview avec www.seneplus.com, le secrétaire général de la section Synpics de l’agence, Ousmane Dia explique la racine du mal.
Vous êtes le Secrétaire général de la section Synpics de l'APS. Depuis le départ de l’ancien directeur, la boîte est dans une instabilité chronique. Comment expliquez-vous cette situation ?
Les projecteurs sont braqués sur l’Agence de presse sénégalaise (APS) depuis le début de l’année. Le personnel avait multiplié les sorties médiatiques pour réclamer un audit de l’entreprise. Nous avions relevé un sérieux problème de gestion. L’audit est en cours. On attend les résultats.
Mais il faut dire que l’APS traverse une situation difficile depuis 2012. L’agence souffre d’un sous financement en réalité. Un management responsable a permis de faire face à ce problème structurel jusqu’en 2011. Par la suite, la situation s’est complètement dégradée. La réalité a repris le dessus.
Les charges de l’entreprise ont augmenté alors que la subvention de l’Etat (321 millions de francs Cfa par an) n’a pas connu de hausse. D’où les tensions de trésorerie en permanence. Je rappelle que nous avons déjà connu trois mois d’arriérés de salaires (novembre, décembre 2012 et janvier 2013). Et nous vivons toujours dans la hantise des fins du mois difficile.
L’agence est également confrontée à un problème de gestion. Les cotisations sociales et à l’IPRESS ne sont pas reversées. Figurez-vous que plus de la moitié des agents de l’APS ne sont pas connus à l’IPRESS. Dix ans durant, les cotisations n’ont pas été reversées.
Pouvez-vous nous faire le point de la situation de manière exhaustive ?
Le problème de l’APS est un problème structurel. Le tableau peu reluisant que j’ai décrit est la conséquence d’une situation structurelle qui est, elle, le résultat d’un sous financement de l’entreprise par les pouvoirs publics. Dans la loi de finances 2015, l’agence a reçu 321 millions de francs Cfa au titre de la subvention pour une prise en charge du fonctionnement. On n’a pas eu de budget d’investissement.
Or cette allocation fausse les recommandations du Sous-comité technique du secteur de l’information et de la communication sur les modalités de calcul de la compensation financière au titre de la rémunération du Service public.
Selon ce Sous-comité, le coût des prestations de l’APS au service de l’Etat et de ses démembrements se chiffre 1 057 875 000 FCFA, pour les frais de fonctionnement (site Internet, voitures, carburants, frais de reportages, etc.) et les salaires du personnel de la rédaction centrale et des bureaux régionaux.
Les travailleurs réclament une augmentation des salaires. En effet, sur le plan salarial, l’APS applique la Convention collective des journalistes et techniciens assimilés de 1992 alors que celle-ci est révisée en hausse par une convention maison dans les autres médias du service public.
Il faut aussi penser à doter l’APS d’un siège. Depuis 1959, date de sa création, à nos jours, l’APS n’a jamais eu un siège propre. Nous sommes dans l’immeuble de la Maison de la Presse depuis fin 2013 mais ce n’est pas du goût de tout le monde.
Quelle est de votre point de vue la solution définitive à cette crise de la boite et jusqu’où la section synpics est prête à aller dans sa lutte?
Le personnel est décidé à se faire entendre. Il le fait de façon responsable, car nous pensons que l’APS a toute sa place dans ce système médiatique. Ce que nous réclamons, ce sont de meilleures conditions de travail, une bonne gestion, un financement public à la hauteur de la mission assignée à l’Agence de presse sénégalaise.
Pourquoi visiblement de tous les organes de presse étatiques, c’est l’APS qui connait le plus de difficultés ?
Les pouvoirs publics n’ont pas mesuré l’importance d’une agence dans le système médiatique. Dans de nombreux pays, l’agence joue un rôle de premier plan. Et dans un contexte de diffusion de l’information en flux continu et le foisonnement des sites Internet, la présence de l’APS dans le paysage médiatique sénégalais garde toute sa pertinence. Dans ce chaudron, l’APS peut être une plate-forme de référence grâce au professionnalisme et à la rigueur de son personnel.
Pouvez-vous nous parler du moral des employés en ce moment?
Le moral des agents est au plus bas à cause des difficultés énumérées plus haut. Mais en dépit de tout cela, l’APS garde le cap et travaille au quotidien pour la diffusion de l’information à destination de sa clientèle notamment les médias.