LA JUSTICE BLOQUE OMAR EL-BECHIR À PRETORIA
EXÉCUTION DES MANDATS D’ARRÊT DE LA CPI
Le Président soudanais Omar El-Bechir est bloqué en Afrique du Sud par la justice sud-africaine qui a été saisie par une Ong pour exécuter les mandats d’arrêt de la Cpi pour des crimes de guerre, crimes contre l’humanité présumés à lui reprochés. Elle donnera sa décision ce matin.
Lors des interminables huis clos du syndicat des chefs d’Etat africains dans la capitale sud-africaine, la confusion doit être palpable. La justice de ce pays a interdit hier au Président soudanais de quitter son territoire «au moins jusqu’à» aujourd’hui pour lui permettre de vider une requête d’une Ong locale pour l’exécution des mandats d’arrêt de la Cpi. Et la confusion règne.
Présent à Pretoria pour assister au 25ème Sommet de l’Union africaine, Omar El-Bechir mesurait les risques qu’il prenait. Depuis 2010, il est sur le coup de deux mandats d’arrêt internationaux lancés par la Cour pénale internationale (Cpi) pour des crimes de guerre et crimes contre l’humanité présumés au Darfour.
Il y a quelques années, l’ex-Présidente du Malawi, Joyce Banda, lui avait interdit son territoire en menaçant d’exécuter les mandats d’arrêt lancés par la Cpi. Il n’y était pas parti. Mais, il n’a jamais été inquiété lors de ses différents voyages en Afrique où il bénéficiait d’une solidarité de ses pairs dont la plupart d’entre eux n’ont jamais caché leur aversion contre cette juridiction considérée comme un Tribunal créé pour juger des dirigeants africains.
Cela lui permettrait de voyager et d’assister en «toute impunité» aux différents sommets de l’Ua où il se plaisait à narguer la Cpi. Cette mesure prise par la justice sudafricaine risque de relancer les polémiques au sein de l’Ua à propos de la Cpi. L’inculpation du Président kenyan, Uhuru Kenyatta, avait ravivé les débats sur le retrait de l’Afrique du Traité de Rome.
En attendant, la justice sud-africaine vient d’affirmer toute son indépendance en instruisant la plainte d’une Ong sud-africaine, l’association Southern Africa Litigation Center (Sacl). Elle a saisi la juridiction sudafricaine pour que Omar El-Bechir soit arrêté puis extradé vers la Cour pénale internationale.
Libre et indépendante, elle a donc interdit au Président soudanais de quitter l’Afrique du Sud avant la lecture de sa décision. Ouverte hier, l’audience a été suspendue jusqu’à ce matin à la demande de l’avocat du gouvernement sud-africain, qui souhaite préparer son argumentaire.
En redoutant un coup bas de Pretoria, le ministère sud-africain de l’Intérieur a reçu l’ordre de contrôler de près tous les points de sortie du territoire dès ce soir. Les officiers aux postes-frontière doivent être rapidement informés afin d’empêcher toute tentative de fuite du Président soudanais.
En posant cet acte, la justice sudafricaine rallume l’espoir des Ong et de la Cpi qui constataient impuissantes les voyages du Soudanais. «Nous avons engagé cette procédure dès que nous avons appris la présence de Omar El-Bechir en Afrique du Sud et dès que nous avons su qu’il n’avait pas fait l’objet d’une arrestation.
Nous avons saisi le juge pour contraindre les autorités sud-africaines à arrêter et transférer El-Bechir à la Cpi. Nous pensons que le droit sud-africain et le droit international obligent l’Afrique du Sud à coopérer avec la Cpi y compris au niveau des mandats d’arrêt émis par la Cpi», explique Caroline James, membre de la Sacl à Rfi.
Pour l’instant, le Président soudanais n’a pas fait de commentaires. Même s’il a fait son apparition publique devant les médias pour la traditionnelle photo de famille des chefs d’Etat de l’Union africaine.
En revanche, son ministre des Affaires étrangères, Ibrahim Gandour, a minimisé l’affaire, indiquant, selon Rfi, que cette action en justice ne leur faisait pas peur et que le Président soudanais resterait jusqu’à la fin du sommet. Sans préciser quand il repartirait. Car son destin ne lui appartient plus.