LA LEÇON DE SIMPLICITÉ DE BARACK OBAMA
Dans notre pays où le snobisme et l'arrogance sont les attitudes favorites des nommés et élus
La visite du président Obama s'est accomplie. Une visite qui a suscité beaucoup de perplexité et d'infinies interrogations pour la plupart futiles. Les tribunes se sont multipliées sur les plateaux des organes de presse et des experts en diplomatie, relation internationale et tant d'autres se sont donnés à cœur joie sur les motivations de cette visite, en guise de réponse à une question plutôt pessimiste de journaleux: quelles en sont les retombées pour le Sénégal?
Les réponses à cette question ont tourné autour des intérêts matériels ou pactoles financiers qu'auraient promis notre illustre hôte, alors qu'il y avait plus important à tirer de sa visite.
Je n'ai sûrement pas les connaissances de ces experts qui se sont succédés sur les plateaux de télé, mais il y' a une chose de très utile que j'ai retenue du peu que j'ai appris et que je veux partager avec eux ici: il est absolument nécessaire de prendre le monde pour ce que réellement il est, si on veut en saisir le sens et cheminer en harmonie avec les transformations qui s'y déroulent.
La relation entre les Etats Unis et le Sénégal ne peut être une relation d'égal à égal. Il ne peut y avoir équivalence entre ces deux Etats. Les Etats-Unis sont les plus puissants du monde. La diplomatie du plus puissant du monde est une diplomatie de pouvoir pour davantage de pouvoir. Elle permet à cette puissance d'exprimer son pouvoir, de le mettre continuellement à l'épreuve pour l'évaluer et de le répandre. Elle s'impose aux autres d'une manière ou d'une autre et elle est loin de quelque chose qui s'improvise.
La visite de Obama à Dakar n'est pas un fait de hasard, elle est une phase tactique d'une stratégie politique bien élaborée dont les objectifs à long terme sont tenus dans la discrétion par les Américains. Il ne faut pas confondre les motivations derrière un processus diplomatique et le fait de faire preuve de diplomatie dans sa relation avec les autres.
D'autre part, le président des Etats-Unis ne s'aventure jamais à dépenser les sous des contribuables américains sur des voyages si coûteux, sans souci d'avoir à justifier devant le sénat l'intérêt de tels déplacements pour les Etats-Unis. En raison de cela je suis perplexe quant aux assertions des experts qui mettent tout le crédit de cette visite sur le compte de notre politique étrangère et partant, juge de son opportunité et critique le régime pour sa réalisation.
Il n'est pas question pour moi de sous-estimer les mérites de notre président et de son gouvernement, pour le rôle joué dans cet exploit diplomatique. Je doute fort que si Wade était resté au pouvoir, Obama serait venu à Dakar. Cependant, mettre en lumière les paradigmes en présence - d'une nation qui plane dans la fiction et d'une autre qui peine à s'extirper du Moyen Âge - permet de situer les responsabilités et de rester vigilant quant aux orientations de la relation.
En réalité nos autorités n'avaient pas une grande marge de manœuvre, pour mériter qu'on leur reproche la rigueur protocolaire imposée par les agents américains chargés de la sécurité de leur président. Pour qui connait les Américains, il est notoire qu'ils ne laissent aucune place au hasard quand il s'agit de la sécurité de leurs institutions. Alors plutôt que d'ergoter sur des vétilles (les ministres venus en Bus, le fait que Obama soit parti de l'aéroport avant Macky etc...) autant se contenter de l'expérience vécue et prêter attention à ses impacts, lesquels ne manquent pas. Avec cette visite, Obama est incontestablement entré dans le coeur des Sénégalais et ce, dès sa descente d'avion, grâce à sa simplicité. N'y a-t-'il pas là une leçon à retenir? Assurément!
La leçon essentielle de cette visite: l'exemple de simplicité
De la toute magnificence de l'avion de commandement Air Force One que les aéroports huppés du monde s'honorent de l'escale sur leur tarmac, de ce royal coucou de commandement de l'homme le plus puissant du monde, est descendu un homme sans tenue d'apparat, ni couronne, ni cape, la main dans celle de sa fille cadette, suivie de sa femme sans auréole, ni diadème, main dans la main avec sa fille ainée. Tous, vêtus de leur humanité, ont serré de la manière la plus chaleureuse et la plus simple les mains chaudes de téranga qui leur étaient tendues. Obama a su en toute humilité donner le change à cette teranga en échangeant un mot avec tous ceux qu'il a salués.
Avec ce qu'il a fait d'exceptionnel dans sa vie et l'arsenal de privilèges et pouvoirs mis à sa disposition, il avait tout pour être arrogant, sans souci à se faire. Il a choisi, béni qu'il est, d'être d'une simplicité à faire oublier sa position. C'est là qu'il faut chercher les retombées de sa visite, dans cette chute, de l'impressionnant Air Force One à la simple personne Obama parmi celles, médusées, venus l'accueillir. Dans notre pays où le snobisme et l'arrogance sont les attitudes favorites des nommés et élus, un tel comportement et ses effets hautement appréciés dans notre communauté, ne peut rester sous silence, il doit être exalté et souvent rappelé. Voilà la première retombée de baraka retenue.
Une autre chose qui a impressionné la communauté sénégalaise, ce sont les égards de Obama pour Youssou Ndour , cet autre leader qu'il admire. Ce même Youssou dont la nomination pertinente en tant que ministre de la République par le président Macky avait fait couler beaucoup d'encre. Des "intellos" sous-estimaient ses qualités sous le pretexte fallacieux qu'il n'avait aucun diplôme, occultant le fait qu'il soit parvenu par ses propres efforts, à se hisser au rang de leader de classe internationale. Obama nous a rappelé ce qu'il vaut dans le monde et le respect qui sied à son endroit. On ne cesse de le critiquer parce qu'il est simplement plus facile d'ôter quelque chose de son contexte pour démagogiquement vilipender les auteurs d'un acte. C'est ce qui s'est passé avec la minute de danse esquissée par des ministres lors de la journée de la fête de la musique.
C'était quand même la journée de célébration de la musique et l'on nous placarde à la une des journaux : “la République danse pendant que le peuple souffre de tout’’. Les mêmes journalistes qui le disent oublient que leurs media n'ont à longueur de journée que des programmes qui montrent le peuple danser. Obama et sa femme ont dansé lors du dîner offert en leur honneur (Macky devait d'ailleurs tomber son ñangal et faire du yeungueul ci mbagg) pourtant l'Amérique est toujours dans des problèmes. Il y'a encore en ce point tellement de leçons à tirer et c'est pourquoi je l'ai retenu comme second lieu de retombée de baraka.
L'ordre et la propreté possibles dans la cité:
L'ordre et la propreté qui nous semblaient impossible à réaliser en centre ville a régné durant le séjour de Obama. Rien d'extraordinaire, que ce qui est convenable pour toute société civilisée, mais il a fallu qu' Obama vienne pour qu'on se rende compte que nous pouvions y arriver, sans casse. Il y a là un acquis de taille à préserver et consolider. Sur ce point des leçons doivent être tirées et c'est pourquoi il constitue mon troisième lieu de retombée de baraka.
Il y en a sûrement beaucoup d'autres points de retombée de barakas qui méritent d'être relevées, car bien exploitées leurs impacts sont profonds, avantageux et durables.
En conclusion, j'invite les experts en tout à demeurer vigilants, ils pouvaient bien en répondant à la question de savoir quelles retombées pour le Sénégal, éviter d'aggraver la chronicité de la pandémie de quémandeur qui ne nous fait voir en l'autre, qu'un pourvoyeur d'espèces sonnantes. Notre relation avec les autres doit être gagnant/gagnant et cela n'est pas qu'une formule d'intellectuel qui veut montrer qu'il est à jour vis a vis des nouveaux concepts. Ceux qui y croient veillent toujours à ce qu'ils mettent sur la table des échanges. Ils ne se contentent pas d'évaluer juste la part de l'autre.
IBE NIANG ARDO - President du Mouvement Cit. Jog Ci