LA LUTTE ET LES ACTEURS DES NAVÉTANES SE RENVOIENT LA BALLE
GRIS-GRIS DÉTERRÉS AU STADE DEMBA DIOP
L’entrepreneur chargé de réfectionner le stade Demba Diop a déterré plusieurs cornes et Gris-Gris. Indexés les lutteurs ont rejeté la faute sur le mouvement "navétane", qui, à son tour refuse et accuse la lutte.
"Nous avons trouvé du tout. Il y avait même des cornes. Nous avons découvert des gris-gris enfouis sur toutes les parties du terrain", a déploré Mbacké Faye, l’entrepreneur chargé des travaux de réhabilitation du stade Demba Diop.
Alors qui a enterré les gris-gris dans le gazon du stade Demba Diop ? On ne le saura probablement jamais puisque le monde de l’arène, avec à sa tête le président des lutteurs en activité, Boy Kaïré, refuse de porter la responsabilité tout seul.
"Les gris-gris font partie intégrante de la culture sénégalaise, dit-il. Que ce soit le football, les navétanes, ou la lutte, tout ce monde utilise les gris-gris pour la même raison, gagner. Donc qu’on cesse de nous indexer. De source sûres, nous savons que les ‘navétanes’ (championnats populaires) et les équipes nationales de football qui jouent à Demba Diop y enterrent des gris-gris".
Le chef de file de l’écurie Soumbédioune ne comprend pas pourquoi le promoteur qui a gagné le marché du stade Demba Diop veut faire déguerpir la lutte de ce lieu pour ces "futilités".
"Le ministre a désavoué le promoteur Mbacké Faye devant tout le monde et lui a fait savoir que le stade Demba Diop est un stade omnisports qui n’appartient pas seulement au football. Donc, je pense qu’il doit se taire pour de bon et savoir qu’il n’est pas une autorité mais un simple travailleur qui a gagné un important marché", poursuit-il.
Navétanes : "Nous sommes des gens civilisés"
Balla Diouf est aussi du même avis que Kaïré. Pour le sociétaire de l’écurie Yoff et membre très actif de l’Association des lutteurs en activité, "le promoteur Mbacké Faye déteste la lutte".
"J’ai été très actif dans le mouvement "navétanes" et les gens attendaient la nuit pour venir enterrer toutes sortes de gris-gris dans le stade, de même que l’équipe nationale du Sénégal le fait au stade Léopold Sédar Senghor et ailleurs. Il faut cesser d’accuser les lutteurs à tort à chaque fois qu’il y a un problème, ce n’est pas juste. Tout le monde sportif s’adonne à des pratiques mystiques, chacun à sa part de responsabilité dans cette affaire", souligne l’ancien lutteur de Fass.
Concernant les gris-gris utilisés par les lutteurs, Balla Diouf rappelle que "le Cng (Comité national de gestion de la lutte) a interdit aux lutteurs d’enterrer quoi que ce soit dans le gazon du stade".
"Nous n’avons même pas le droit de creuser le gazon, il y a une disposition pour cela dans les textes du Cng. Même les bains mystiques, nous les prenons sur le sable au risque de se voir sanctionner. Sur la pelouse, il y a l’enceinte, nous prenons des bains là-bas, il y a une bâche avec plein de sable qui est étalée dessus pour ne pas mouiller ou abîmer le gazon. Cette histoire est à mon avis très louche, c’est une mise en scène", dit-il.
Khadim Gadiaga de l’écurie Rock Energie poursuit dans la même logique : "Qui peut prouver que ce sont les lutteurs qui ont enterré ces gris-gris trouvés dans le gazon ?" Et comme ses autres collègues lutteurs, Khadim Gadiaga jette la pierre sur le mouvement navétane.
"Il y a plus de 300 matchs de navétanes par année, et les gens savent que dans ces tournois-là, il y a beaucoup de mystiques. Je vais même aller plus loin : lors du dernier match du Sénégal à Léopold Sédar Senghor, les gens ont eu recours au mystique", éructe-t-il. Pour lui, il faut trouver des solutions alternatives pour éviter ce genre de situations au lieu de prendre des décisions aussi drastiques.
"Il faut voir du côté du gestionnaire et des gardiens du stade"
Cité et indexé par les lutteurs dans l’affaire des gris-gris enterrés au stade Demba Diop, le mouvement navétane réagit et renvoie la balle aux lutteurs. "Ce n’est pas vrai, cette histoire. On n’a rien enterré à Demba Diop. En tout cas, je n’y ai jamais assisté", récuse Mame Ousmane Ciss, président de la zone 7A.
Et il n’a pas hésité à jeter la balle dans un autre camp. "Il faut dire qu’avec la gestion des stades, tout est possible. Ce que font les gestionnaires ou les gardiens des stades avec les Asc (Associations sportives et culturelles), je ne peux pas le maîtriser en tant que président de zone. Pour de l’argent, ces gens-là peuvent vendre leur âme au diable", dit-il avant d’affirmer avec conviction que "les jours de match, il n’y a jamais de pratique de ce genre".
Dame Faye, président de la Zone 7C va plus loin. "Les Asc n’osent pas enterrer des choses dans le stade Demba Diop. Il y a un article dans notre règlement qui interdit les pratiques occultes. A chaque fois qu’il y a un match de navétane, un superviseur anonyme est dépêché, ainsi que le commissaire du terrain pour voir ce genre de cas. Il y en a qui prennent des bains mystiques, je l’avoue, mais on n’enterre pas de gris-gris. L’Odecav a mis en place un PV nommé 00 et dans ce PV, il y’a des choses inhérentes aux pratiques occultes, les interdictions qu’on en fait", informe-t-il.
Il accuse à son tour les lutteurs : "ce sont les lutteurs qui creusent et qui enterrent des choses au stade au vu et au su de tous. Le mouvement navétane a dépassé cela, nous sommes maintenant des gens civilisés".