LA MAIRIE SACCAGEE, DEUX BUS CALCINES, UNE VEDETTE DES GARDE-COTES DETRUITE
REVOLETE DES PECHEURS DE THIAROYE SUR MER
L’interdiction d’utiliser des filets mono-filaments, a déclenché une véritable bataille entre les gendarmes de la brigade de l’environnement, le personnel de la Direction de la protection et de la surveillance des pêches (DPSP) et des pêcheurs de Thiaroye/Mer hier, jeudi 29 mai 2014. Ce qui a occasion la destruction de biens matériels et des blessés de part et d’autre.
Thiaroye Sur Mer est sortie de sa quiétude hier jeudi, en ayant vécu une chaude journée, suite à des affrontements ayant opposé un groupe de pêcheurs aux forces de l’ordre.
Le bilan des échauffourées est lourd : Un bus de Dakar Dem Dikk et un car Tata de la ligne 63 de l’Association de financement des transports urbains (Aftu) incendiés.
Même la mairie de la commune d’arrondissement, n’aura pas été épargnée. Prise d’assaut par les insurgés, elle sera saccagée par des pêcheurs en furie, protestant contre l’interdiction qui leur est faite par les garde-côtes d’utiliser des filets mono-filaments par des garde-côtes qui ont arrêté et blessé un des leurs. Les bureaux de la mairie ont été mis à sac, entièrement vandalisés.
Atteignant plusieurs mètres, la fumée des flammes était encore visible sur les lieux de la manifestation alors que de grosses pierres jonchaient la route nationale 1. La circulation était bloquée dans les deux sens, obligeant les véhicules à de grands détours dans la commune de Guinaw Rail. Le deuxième adjoint au maire de Thiaroye sur Mer, Alassane Sy, trouvé sur place en compagnie des gendarmes n’avait que ses yeux pour pleurer.
«Ce que j’ai vu est grave et à condamner. Des cartes d’électeur ont été même emportées par les manifestants. C’est pourquoi, nous comptons poursuivre l’affaire en justice», a-t-il confié.
Ces pêcheurs ont déversé leur courroux sur la route nationale à cause de l’agression de l’un d’eux répondant au nom de Lamine Diop qui, selon eux, aurait été «battu, torturé par les garde-côtes, au large de Gorée».
Selon un pêcheur qui a secouru le blessé, «ce sont les garde-côtes qui l’ont battu jusqu’à évanouissement». «Les garde-côtes ont tiré sur notre moteur. Nous étions partis secourir notre frère. Heureusement, les balles ont juste bousillé notre moteur. On l’a récupéré et on l’a amené à l’hôpital de Pikine. Il avait même les menottes».
Interpellé sur l’interdiction des filets mono-filaments pour leurs activités de pêche, il répond : «nous ne laisserons jamais cet outil de travail qui nous permet de vivre. Même s’il est interdit !»
Et d’ajouter : «dans d’autres localités, on utilise les mêmes filets. Pourquoi l’acharnement sur les pécheurs de Thiaroye ?».
Selon un autre pêcheur, les populations ont plutôt manifesté pour fustiger l’arrestation d’un jeune adolescent du nom de Ngagne Mboup âgé de 17 ans et qui accompagnait le blessé.
«Nous exigeons sa libération le plus rapidement possible. C’est un enfant de rien du tout que la marine a arrêté. C’est inadmissible ! S’il ne le libère pas, nous allons passer à la vitesse supérieure», avertissent-ils.
Les gendarmes alertés ont rappliqué pour disperser les manifestants à coups de gaz et grenades lacrymogènes afin de rétablir l’ordre, et de permettre la reprise normale de la circulation.
Pendant ce temps, au quartier Ndiobene (Thiaroye Sur Mer), l’adrénaline va monter d’un cran. Décidés d’en découdre, une vingtaine de pirogues remplies de pêcheurs vont à l’assaut des garde-côtes. Ils en reviennent avec une vedette qu’ils ont incendiée sur la plage en guise de représailles devant leurs femmes et leurs enfants qui les haranguaient par des cris de victoire.
L’un des Grands Serigne de Dakar, Ibrahima Diagne, s’est même déplacé, brocardant le ministre de la Pêche, Haïdar El Aly, tout en essayant de calmer les siens. «Aly Haïdar ne respecte pas la communauté léboue. Je suis votre voix, je vais m’ouvrir aux autorités pour qu’on règle définitivement le problème», tonne-t-il.
«Le pêcheur ne peut vivre sans la mer. Je vous demande de vous calmer. Tous les jeunes interpellés seront libérées sous peu», rassure-t-il.
Pendant ce temps, Thiaroye Sur Mer donne l’impression d’avoir basculé dans un état d’urgence. Les forces de l’ordre quadrillent la zone pour veiller au grain. Aux dernières nouvelles, la vie du pêcheur blessé ne serait pas en danger. Il est interné à l’hôpital de Pikine pour les soins.
LA DIRPA CHARGE LES PECHEURS
Le directeur de l’information et des relations publiques des armées (Dirpa), est monté au créneau pour rétablir «sa» vérité des faits qui se sont déroulés hier, jeudi 29 mai, à Thiaroye/Mer.
Le colonel Abou Thiam, rejette le tort sur les pêcheurs artisanaux qui selon lui, «ne respectent pas les règles élémentaires de préservation de la ressource halieutique et posent des actes de défiance manifestes à l’action de la force publique». Dans sa version contenue dans un communiqué parvenu à notre Rédaction hier, il fait remarquer que : «suite à une information en provenance des populations de Gorée, reçue le mardi 27 mai 2014 à 5 heures 50 minutes et relative aux filets mono-filaments, dans la zone interdite de pêche, à l’ouest de cette île, la vedette «Archangel» de la patrouille portuaire a été dépêchée sur les lieux».
Et d’ajouter «à cause de l’inaccessibilité de cette partie rocheuse, une petite embarcation a été déployée pour procéder à la récupération des filets, avec à bord, une équipe d’agents de la Direction de la protection et de la surveillance des pêches (DPSP) et d’un matelot de la marine nationale». «En réaction à cette initiative, souligne le colonel Thiam, douze pirogues transportant des pêcheurs armés d’armes blanches, ont chargé ces éléments à 14 h 20 et les ont ramenés à Thiaroye, ligotés, battus et maltraités».
«Ils n’ont pu s’échapper des mains de leurs ravisseurs qu’à la plage de Thiaroye avec des blessures multiples», indique-t-il.
«Partis récupérer les matériels interdits sur les lieux, ce jeudi 29 mai 2014 (hier, Ndlr) et appuyés par deux vedettes de la marine, trois gendarmes de la brigade de l’environnement, les personnels de la DPSP ont eu encore une fois, à être chargés par des pêcheurs survoltés, armés d’encres de pirogues et de divers projectiles», fait-il remarquer.
«Un gendarme a été projeté à l’eau et n’a dû son salut que grâce aux tirs de sommation des fusiliers marins commandos. Au final, un pêcheur a été interpellé et mis à la disposition de la gendarmerie, un autre s’est retrouvé avec des contusions, suite à la bagarre au corps à corps engagé contre un marin commando. Il a reçu des soins à l’hôpital de Thiaroye».
«Cet incident maritime, selon le directeur de la Dirpa, met en exergue le risque encouru par les éléments de la marine nationale et de la DPSP face à des pêcheurs artisanaux qui ne respectent pas les règles élémentaires de préservation de la ressource halieutique et posent des actes de défiance manifestes à l’action de la force publique».