LA MARCHE AU BOUT DE LA NUIT DES PROCHES DES OTAGES D'ARLIT
PARIS, 16 sept 2013 (AFP) - "On dirait que c'est tout proche mais c'est loin. C'est comme dans le désert, les dunes..." Depuis l'esplanade de la Défense, Françoise Larribe contemple l'Arc de Triomphe illuminé dans la nuit.
Voilà près de trois heures que cette Gardoise dont le mari, Daniel, a été enlevé il y a trois ans jour pour jour à Arlit au Niger, marche en compagnie d'une douzaine de proches des quatre otages français détenus au Sahel par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Amis, épouse, fiancée, père, beau-frère, cousin, ils sont partis, bardés de banderoles et de sacs à dos comme de vrais randonneurs, vers 3h00 du matin, lundi, du siège de Vinci à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine) pour une marche d'une quinzaine de kilomètres à travers Paris et sa proche banlieue.
Sur leur itinéraire, ils se sont arrêtés en différents points symboliques, comme les sièges des entreprises françaises auxquelles appartiennent les otages (Areva, Vinci) et différents lieux de pouvoir (Elysée, Sénat, Assemblée nationale) pour y remettre une lettre à chacune de leurs étapes.
"C'est une super idée. Elle est chargée de sens et c'est bien que tu l'aies eue, merci", glisse Mme Larribe à Frédéric Cauhapé, le beau-frère de l'otage Marc Féret, avant de pénétrer dans les locaux de Vinci et d'y rencontrer le PDG du groupe de BTP, Xavier Huillard, présent pour "témoigner de son profond espoir".
Dans la nuit noire, clairsemée d'ondées fines et éparses, ces deux-là aimantent toutes les sollicitations médiatiques auxquelles ils se plient de bonne grâce. "Vie brûlée" Cette marche ? "Oui, elle a du sens", répète celle qui fut otage avec son mari avant d'être libérée au bout de 160 jours de détention.
"Trois ans d'une vie brûlée. C'est quelque chose d'inimaginable, d'inacceptable", commente Mme Larribe qui, la veille, confiait avoir hésité "un petit peu" à l'idée de cette marche "car ce moment est chargé d'émotion".
Escorté presque tout le long du trajet par deux motards de la police, le groupe traverse la banlieue dans une atmosphère bon enfant qui n'exclut pas les moments de gravité, croisant peu à peu les travailleurs du petit matin qui se dirigent vers les sièges des entreprises de l'ouest parisien.
Après s'être arrêtés à la tour Areva à la Défense (Hauts-de-Seine), ils ont remis vers 7h30, à l'Elysée, une lettre adressée au chef de l'Etat, François Hollande. Celui-ci avait déclaré la veille au soir sur TF1, avoir "des preuves (de vie) des otages."Je sais ce que ça représente pour les familles. Je les ai reçues plusieurs fois", a-t-il ajouté. "Je peux leur dire, je dois leur dire que nous faisons tout pour aller les chercher".
Dans la lettre transmise à l'Elysée comme dans les autres missives, une série de questions est adressée aux responsables politiques et chefs d'entreprise, notamment sur le choix et l'efficacité d'une nouvelle filière de négociations explorée par le pouvoir. "Il faut faire pression. Il faut qu'on en parle. La lettre fait partie de ce dispositif", explique à la presse Frédéric Cauhapé.
Les proches de Thierry Dol, Marc Féret, Daniel Larribe et Pierre Legrand ont terminé leur périple au ministère des Affaires étrangères, où ils ont remis au directeur du Centre de crise du Quai d'Orsay Didier Le Bret un manifeste signé par plus de 12.000 personnes.
"Nous avons fait le point avec eux sur la situation de leurs proches", a indiqué M. Le Bret à l'AFP, en précisant que les "preuves de vie" des otages dont a fait état le président Hollande dimanche soir étaient "récentes".
En fin de matinée, certains proches ont participé à une cérémonie à l'extérieur de la mairie du IVe arrondissement de Paris où ont été dévoilés les portraits des quatre otages, sur un panneau portant l'inscription : "qu'ils retrouvent la liberté".