LA NOTAIRE A ÉTÉ CONDAMNÉE À 24 REPRISES
AISSATOU GUÈYE DIAGNE ENTRE 2008 ET 2013

Au rythme où s'enchaînent les procédures initiées contre sa personne, la notaire Aïssatou Guèye Diagne risque de battre le record de condamnations. Rien qu'entre 2008 et 2013, elle a fait l'objet de 24 condamnations, liées toutes au foncier.
Pratiquement, il ne s'écoule pas une année judiciaire, sans que la célèbre notaire Aïssatou Guèye Diagne ne soit citée à comparaître devant le tribunal correctionnelle dans des procédures liées au foncier. Elle est traînée, soit pour le délit d'escroquerie, soit pour faux en écriture publique authentique. La plupart des victimes sont des héritiers qui accusent souvent la notaire d'avoir vendu leurs biens à leur insu.
A tort ou à raison? Dans tous les cas, les condamnations pleuvent sur la tête de la notaire qui a toujours fait défaut durant ses procès. D'ailleurs, une bataille rangée entre les victimes de la notaire Aïssatou Guèye Diagne et des Baye Fall a été évitée de justesse, le 2 septembre 2009. En fait, des victimes de la notaire, qui couraient derrière leurs dus depuis des mois, ont voulu encore occuper l'immeuble abritant les locaux de l'étude de l'auxiliaire de justice. Elles ont été stoppées par des "Baye Fall", venus prêter main-forte à la dame, sur le "ndigeul" de leur marabout.
Par rapport aux sanctions, rien que pour la période 2008-2013, 24 condamnations ont été prononcées contre Me Aïssatou Guèye Diagne. Les peines vont du sursis à des peines fermes. Les peines fermes sont au nombre de 19 et varient entre 3 mois, 6 mois, 2 ans et 5 ans. Les sursis sont au nombre de 5 et les mandats d'arrêt, au nombre de 2. En 2008, plus exactement le 3 avril et le 23 décembre, la notaire a été condamnée, selon les jugements n° 181 et 646, à deux peines de 6 mois ferme. Elle a battu le record de condamnations en 2009, avec 9 condamnations allant du sursis à 5 ans ferme.
Parmi ces peines, l'une de 2 ans était assortie d'un mandat d'arrêt. Pendant l'année 2010 durant laquelle elle a écopé de deux peines de 6 mois ferme, un nouveau mandat a été décerné contre elle. Même si elles ont été exécutées bien tardivement, la notaire n'aura passé que quelques minutes en prison, avant d'être libérée. Cela a été le cas en 2009 et tout récemment (voir ailleurs) quand elle s'est constituée prisonnière, le matin, avant d'être libérée par la Cour d'appel quelques heures après.
Durant les années 2011 et 2012, un total de huit condamnations ont été prononcées contre elle dont deux sursis. Pour 2013, le nombre de condamnations se chiffre à 3 dont un sursis et 2 peines fermes. A préciser qu'il s'agit toutes de décisions de première instance, par conséquent les condamnations ne sont pas pour autant définitives, car certaines sont frappées d'appel.
PROCÈS EN APPEL POUR FAUX
Le sort de la notaire lié à des exceptions
A cause des exceptions soulevées par les avocats (défense et parties civiles), la Cour d'appel n'a pu interroger hier la notaire Aïssatou Guèye Diagne sur les faits de faux en écriture publique authentique qui lui sont reprochés.
Condamnée en première instance à 2 ans ferme pour faux en écriture publique authentique, en sus du paiement de dommages et intérêts d'un montant de 500 millions de francs CFA, la notaire Aïssatou Guèye Diagne a fait face hier à la Cour d'appel. Cependant, elle n'a pas pu être entendue sur les faits. Les exceptions de nullité soulevées par son conseil et celui des parties civiles l'en ont empêchée. Tout juste après la notification de la prévention à la notaire, son conseil Me Abou Thiam a demandé que la procédure soit déclarée nulle.
L'avocat a avancé comme argument la prescription des faits, en ce sens que 10 ans se sont écoulés entre la date de la citation et les faits incriminés. Soulignant au passage que le moyen de preuve fourni par les parties civiles (un acte de vente) est faux, Me Thiam a relevé que les faits incriminés remontent à 1999 et que la citation n'a été faite qu'en 2009. Et compte tenu de la prescription, le conseil d'Aïssatou Guèye a invité la Cour à infirmer le premier jugement.
Mais l'avocat général a un autre avis. Il considère qu'il n'y a pas de prescription, car le faux est une infraction continue. Et que les parties civiles n'ont été informées qu'en 2008, lorsqu'elles ont voulu procéder à des mutations. "Avant 2008, je ne pouvais pas être au courant des agissements délinquants de la prévenue", a répliqué Me Alassane Cissé, avant de demander que l'exception soit rejetée. Aussi, il en a soulevé à son tour.
Délibéré le 8 avril
Le conseil des plaignants a plaidé pour l'irrecevabilité de l'appel, dans la mesure où Me Aïssatou Guèye Diagne n'a pas comparu en première instance. Par conséquent, Me Cissé a estimé que les conseils de la notaire ne sont pas habilités à faire appel. Un argument battu en brèche par le parquet général. "Il n'y a pas de disposition légale qui étend la sanction d'un prévenu non comparant à ses avocats", a réagi le parquetier qui a jugé l'appel recevable, dans la mesure où il a été fait dans le délai de 30 jours. Me Thiam de la défense a abondé dans le même, en soutenant qu'on ne peut pas priver à sa cliente le droit d'appel.
La Cour a mis en délibéré les exceptions jusqu'au 8 avril.
S'agissant des faits, Me Aïssatou Guèye Diagne est accusée de faux en écriture publique authentique par Malick Guèye et Rokhaya Guèye. Il lui est reproché d'avoir vendu à la dame Sokhna Faty Mbacké le titre foncier TF n°8491/ DG. Le terrain d'une superficie de 15.385 mètres se trouve à Khar Yalla et a été vendu à 14 millions de francs CFA.
Le hic dans cette affaire est que l'acte de vente a été dressé, le 10 décembre 1998. Les nommés Ndèye Guèye, Amadou Guèye, Mamadou Cissé et Djibril Cissé sont désignés comme les signataires. Or, les trois premiers sont décédés respectivement, le 14 janvier 1984, le 8 novembre 1996 et le 4 novembre 1996.
Quant au quatrième, il se trouvait au front en Guinée Bissau au moment où l'acte de vente a été établi. C'est pourquoi la dame qui est veuve de Khadim Bousso avait été poursuivie pour usage de faux, mais elle avait été relaxée. Déclarée comme l'unique coupable du faux, Me Aïssatou Guèye Diagne a été condamnée. Mais les parties civiles Malick Guèye et Rokhaya Guèye attendent toujours d'être dédommagés, car la notaire avait fait appel de la décision.