LA PROCEDURE D’INDEMNISATION DES EXPLOITANTS DU SITE EN QUESTION
DIAMNADIO: CENTRE DE CONFERENCE POUR LA FRANCOPHONIE
Les exploitants agricoles qui sont sur le site prévu pour abriter le Centre de conférence internationale de Diamniadio ne décolèrent pas contre l’Etat. Ils accusent les pouvoirs publics de vouloirs les déloger sans aucune concertations préalable sur les modalités d’indemnisation. Face à la presse samedi dernier, ces victimes du projet ont montré les destructions et autres démolitions avant de dénoncer la démarche solitaire de l’Etat.
A peine lancé, le projet de construction d’un Centre international de conférence en perspective du prochain sommet de la Francophonie fait déjà grincer des dents chez les exploitants agricoles de la zone de Diamniadio, en particuliers ceux du site de l’ancien «BUD Sénégal». Prévu sur le site en question, le projet qui va s’étendre sur 50 hectares, va entrainer la spoliation des exploitants de la zone.
En effet, les terres de l’ancien BUB Sénégal sont aujourd’hui exploitées par des centaines de paysans qui, à les en croire, mettent en valeur ces champs depuis des décennies. Constitués en collectif, ils dénoncent la manière d’agir de l’Etat qui frise le coup de force. Selon leur président Moussa Kane, «l’Etat du Sénégal est en train de récupérer 50 hectares sur le site maraîcher de Diamniadio pour la construction du Centre international de conférence devant abriter la Francophonie».
Cette situation crée de la frustration parce que, fait remarquer M. Sow, «treize propriétaires déjà seront expropriés de leurs champs abusivement». Même s’il confie qu’une «grille d’indemnisation a été déjà établie par l’autorité étatique, il n’en dénonce pas moins la démarche solitaire de l’Etat qui a agit sans aucune consultation. Et les sommes prévues sont largement inférieures à la valeur réelle des exploitations et aux investissements consentis sur les sites».
Et c’est la mort dans l’âme qu’il lance: «l’Etat du Sénégal a manifesté un manque notoire de respect et de considération à l’égard des exploitants qui travaillent et font travailler d’autres citoyens sous le soleil ardent depuis plusieurs années à la sueur de leurs fronts». Une situation confuse à ses yeux. «Comment faire une évaluation sans tenir compte du manque à gagner que vont subir les exploitants», se demande-t-il, tout en signalant qu’il vient de perdre ses trois hectares avec quarante (40) millions F Cfa d’investissement.
Idem pour l’expert agronome Oumar Dème, ancien travailleur de BUD Sénégal, (structure qu’il avait intégrée lorsqu’il avait 19 ans et fraîchement sorti d’une école d’horticulture), qui dénonce le comportement de l’Etat du Sénégal consistant à vouloir exproprier ses camarades. Il va jusqu’à dire qu’il n’y a pas encore de rupture dans le comportement du nouveau régime avec les peines que ne cessent de subir les cultivateurs. Il souligne la contradiction dans la démarche de l’Etat qui met beaucoup d’argent dans un programme de drainage de la zone et, au même moment, lance un projet de construction sur ce site dont les sols ne sont pas favorables à la construction d’édifice car c’est une zone à vocation essentiellement agricole.
«Je ne comprends pas pour quelle raison parce qu’il y a un investissement de 4 milliards de F Cfa pour faire un réseau d’eau. Il y a une contradiction, quand on parle de Beer Thialane, il fait 18 km. Comment peuvent-ils faire des habitations alors que la zone est prévue pour le développement de l’agriculture. Les gens étaient contents, mais aujourd’hui, on voit qu’on est menacé… Je pense qu’avec la Francophonie, on peut trouver des terres ailleurs au lieu de venir ici. Des champs ont été démolis par les bulldozers et cela est en train de continuer», déplore-t-il.
Une zone non aedificandi?
Pour lui cette action va à l’encontre du programme proclamé par les autorités et portant sur un retour vers la terre. «Ce qui est en train de se passer est contraire au programme pour un retour à la terre. Ce sont des sols qui peuvent réduire le chômage parce que si on n’utilise qu’un seul hectare de culture, on peut avoir 15 à 20 ouvriers. C’est le seul, endroit où on peut travailler 12 mois sur 12». Mieux, M. Dème avance que la zone est inhabitable parce que, soutient-il, «ce sont des sols gonflants qui craquent. Ce n’est pas propice à l’habitation. La pédologie démontre que ces sols sont composés en profondeur de deux mètres d’argile pur et du calcaire en dessous».
En plus de cela, le site retenu pour la construction du centre est traversé par l’autoroute, notamment son tronçon qui rallie l’aéroport Blaise Diagne de Diass. Ces terres de l’ancien BUD Sénégal font partie des plus riches du Sénégal. Constituées de sols lourds et très riches, elles sont favorables aux grosses productions. En atteste, dans les années 1972, 1973 jusqu’en 1975, les productions y atteignaient 18000 tonnes de légumes chaque année, quantité qui depuis lors, n’a jamais plus été produite dans aucune zone maraîchère du pays.