LA RÉBELLION À DOMINANTE TOUAREG AU PIED DU MUR POUR SIGNER L'ACCORD D'ALGER
Bamako, 11 mars 2015 (AFP) - Sous pression internationale redoublée pour faire la paix, la rébellion à dominante touareg du nord du Mali a débuté mercredi dans son bastion de Kidal une réunion cruciale pour arrêter sa position sur l'accord d'Alger, déjà paraphé par le gouvernement.
Entre 150 et 200 personnes venues de toute la région, notamment de Mauritanie, du Niger, de Libye et d'Algérie, en grande majorité des Touareg et leurs alliés, participaient à ces consultations de la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA), qui devraient durer plusieurs jours, a précisé un membre du comité d'organisation.
La réunion de Kidal, à plus de 1.500 km au nord-est de Bamako, a débuté par une lecture et un résumé de l'accord paraphé le 1er mars à Alger par les représentants du gouvernement malien et des groupes armés qui le soutiennent, selon la même source sous le couvert de l'anonymat.
L'accord vise à créer les conditions d'une paix durable dans le nord du Mali, en proie à des affrontements sanglants depuis plus de deux ans, et qui a connu une série de rébellions des Touareg depuis les premières années d'indépendance du pays, en 1960.
"Des diplomates de plusieurs pays européens à Bamako envisagent de se rendre à Kidal si la situation le permet pour encourager à la signature de l'accord", a affirmé de son côté une source diplomatique malienne.
La pression déjà forte sur les rebelles pour signer ce document s'est intensifiée à la suite de l'attentat anti-occidental du 7 mars à Bamako, revendiqué par le groupe jihadiste Al-Mourabitoune de l'Algérien Mokhtar Belmokhtar, qui a fait cinq morts: trois Maliens, un Français et un Belge.
"La France appelle toutes les parties à soutenir ce texte et cet accord", a déclaré mercredi le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius, rappelant qu'il "reste à convaincre un certain nombre de groupes du Nord". "C'est précisément au moment où la paix est à portée de main que les terroristes veulent la mettre à bas", a-t-il répété devant l'Assemblée nationale.
- Pas de négociations directes -
Lors d'une rencontre dans la nuit de dimanche à lundi à Niamey avec des représentants de la rébellion, le gouvernement nigérien et le chef de la Mission de l'ONU au Mali (Minusma), Mongi Hamdi, ont échoué à les convaincre de signer, a indiqué à l'AFP un participant, figure de l'ex-rébellion touareg au Niger.
Les rebelles ont dénoncé le fait que "durant tous les mois de discussions, ils n'ont jamais rencontré le gouvernement du Mali pour un face-à-face, c'est l'ONU qui menait les négociations", a précisé cette source.
Ils ont déploré que ce processus aboutisse à "leur soumettre un document vide qui ne tient pas compte des desiderata de leur peuple", estimant que "même s'ils le paraphaient +l'accord ne tiendra pas longtemps+", a-t-on ajouté.
Le texte prévoit la création d'Assemblées régionales dotées de pouvoirs importants, élues au suffrage universel direct, mais, comme le souhaitait Bamako, ni autonomie ni fédéralisme. La CMA avait demandé le 1er mars un "délai raisonnable" pour consulter sa base après avoir exigé, en vain, des amendements à ce document, fruit de huit mois de négociations sous l'égide de l'Algérie.
Cette coordination comprend le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), le Haut conseil pour l'unité de l'Azawad (HCUA), la Coalition des peuples de l'Azawad (CPA) et une branche du Mouvement arabe de l'Azawad (MAA).
Quelques jours avant la conclusion des pourparlers d'Alger, le nouveau chef coutumier de la région de Kidal, l'Amenokal (chef élu par les sages) de l'Adrar des Ifoghas, Mohamed Ag Intalla, avait plaidé pour la paix avec Bamako, se disant "contre l'autonomie" de sa région.
Le nord du Mali était tombé au printemps 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda. Ils en ont été partiellement chassés par l'opération militaire Serval, lancée à l'initiative de la France en janvier 2013, à laquelle a succédé en août 2014 l'opération Barkhane, dont le rayon d'action s'étend à l'ensemble de la région sahélo-saharienne. Mais des zones entières échappent toujours au contrôle de Bamako.