LA STRATÉGIE DU PROVISOIRE
TRAQUE DES BIENS MAL ACQUIS

La liberté provisoire, dans le cadre de la traque des biens supposés mal acquis, est loin d’être une promenade de santé pour les personnes poursuivies. Les avocats des prévus obtiennent gain de cause après plusieurs tentatives infructueuses. Souvent après avoir déposé une caution. Mais les juges qui veulent s’entourer de toutes les garanties, n’accèdent pas à la première demande. Résultat des courses, les avocats des «traqués », «traquent » à leur tour la liberté provisoire pour leurs clients.
La stratégie des avocats de la défense des personnes poursuivies dans le cadre de la traque des biens supposés mal acquis demeure, pour l’essentiel, la demande de la liberté provisoire. Mais jusqu’à présent cette liberté provisoire est troquée par un cautionnement. Ce n’est pas certains dignitaires du parti démocratique sénégalais (Pds) qui nous démentiront.
A titre d’exemple, Abdoul Aziz Diop, ex chef de cabinet d’Oumar Sarr, Ministre de l’urbanisme sous le régime de Me Wade, a bénéficié d’une liberté provisoire, après une première demande auprès du doyen des juges d’instruction, Mahawa Sémou Diouf, qui été restée sans suite. Ce, en dépit les valeurs immobilières cautionnées et ayant fait l’objet d’évaluation par des experts agrées. Mais ses avocats reviennent à la charge, cette fois-ci auprès de la chambre d’accusation, juridiction d’instruction du second degré qui statue sur les ordonnances du juge d’instruction. Dans la même lancée, la juridiction d’instruction du second degré confirme le rejet formulé par le doyen des juges. Finalement, M. Diop et compagnie ne bénéficieront d’une liberté provisoire sur cautionnement.
Avant lui, d’autres locataires de Rebeuss dont Amadou Kane Diallo, ex Dg du Cosec, ont bénéficié de la liberté provisoire après déposé une caution.
Il faut dire que d’autres personnes poursuivies ont choisi de transiger pour ne pas aller à Rebeuss. Leurs noms sont tenus secrets par l’Etat.
Toutefois, Ndèye Khady Guèye, l’ex administratrice du Fonds de promotion économique (Fpe), n’a pas encore cette chance d’humer l’air de la liberté…provisoire. Le parquet, par la voie de Bassirou Diagne, procureur de la République du tribunal régional de Dakar, s’oppose à la liberté provisoire, et cela, malgré l’ordonnance favorable rendue par le doyen des juges, Mahawa Sémou Diouf.
Poursuivi dans le cadre de la traque des biens mal acquis, l’ancien directeur du cadastre avait effectué une « médiation pénale ». Après des retours de parquets, M. Tahibou Ndiaye finit par être libéré. Mais le porte-parole du gouvernement a vite fait de rétablir la vérité des faits. «Tahibou est libère pour avoir accepté de muter ses biens au nom de l’Etat », avait-il laissé entendre.
Convoqué récemment à la cour de répression de l’enrichissement illicite, il a été placé sous mandat de dépôt. Mais ses avocats qui ne comptent pas rester insensibles entendent attaquer les ordonnances rendues par la commission d’instruction présidée par Cheikh Bèye. « Le recours déposé devant la cour suprême vise à faire annuler l’inculpation de Tahibou et de sa famille qui leur ont valu son placement sous mandat de dépôt et le contrôle judiciaire pour sa famille », soutiennent-ils. Dans tous les cas, ils espèrent gagner cette bataille juridique.
L’autre «traqué» est l’ancien Ministre des infrastructures, Karim Wade. Poursuivi pour enrichissement illicite d’un patrimoine évalué à des centaines de milliards, ses conseils se battent pour sa libération, tout en demandant la fin des poursuites contre leur client. Mais les choses ne semblent pas si simples pour le fils de l’ancien président de la République.