L'attachement d'El Hadji Omar Bach au projet
DE WADE A MACKY
C’est le poète Amadou Lamine Sall, le Commissaire général du projet du Mémorial de Gorée, via Youssou Ndour (nommé ambassadeur du projet du Mémorial par l’ancien président Abdou Diouf), alors ministre de la Culture et du Tourisme, qui a présenté El Hadj Omar Bach au président Macky Sall. Dans le quotidien «Le Soleil» du 09 janvier 2013, le poète Amadou Lamine Sall affirmait déjà que «sa construction devrait démarrer au mois de mars prochain». En quête de financement depuis plus de 20 ans, ce monument historique avait enfin trouvé un bailleur avait-il indiqué, en la personne morale de la société «Suisse invest privat capital group», présidée par El Hadji Omar Bach. Cette dernière était décidée à injecter 13 millions d’euros, soit près de 9 milliards de FCfa pour la réalisation du projet, informe le Commissaire général du projet du Mémorial de Gorée.
Pour sa part, El Hadj Omar Bach, expliquait son choix architectural dans le même journal. «Pour moi, le symbole d’une femme slave pour réaliser la maquette du Mémorial Gorée est très significatif, d’autant que les premiers êtres victimes de ce kidnapping étaient des slaves» avait-il indiqué. Confirmant que le dossier est sur la table de l’autorité, il a lancé: «pour le moment, les études sont terminées. Nous attendons impatiemment le retour du contrat soumis au Sénégal depuis le mois de février de cette année. Ce contrat a été remis à M. Amadou Lamine Sall, le Commissaire général à la réalisation du Mémorial et nous attendons de signer pour pouvoir commencer le travail. La construction devrait durer 18 mois, je l’espère».
Cette sortie a peiné les architectes sénégalais qui trouvent qu’entre les deux maquettes, «il n’y a pas photo, peut-être un mémorial et une statue», ont-ils relevé. «Venir quelques années plus tard avec un tel choix c’est surprenant, c’est ahurissant. C’est cela qui nous fait de la peine», se désolent-ils.
Un bateau imaginaire
Interrogée par Le Soleil, Hélèna Mocova, l’architecte du «nouveau» projet du Mémorial de Gorée présentait sa maquette comme un «bateau imaginaire prêt à lever l’ancre. Les murs du Mémorial sont décorés par des reliefs de têtes et de pieds en souvenir de la disposition des esclaves dans les soutes des bateaux. Ces reliefs parleront aux visiteurs par cette forte symbolique qui restera dans leur mémoire. La voie d’accès piétons est aussi marquée par des traces d’hommes symbolisant la traversée des esclaves qui partaient pour un voyage sans retour laissant derrière eux toute leur vie, jusqu’à leur nom parce qu’ils étaient désignés par un numéro de matricule. J’ai donc utilisé ce symbole qui dirige les visiteurs vers le mémorial. Avec ce Musée prévu pour être fonctionnel en novembre 2014, l’Afrique se dote d’un outil efficace et moderne de transmission de sa mémoire», avait-elle confié.
Qui va dédommager Ottavio Di Blasi ?
Et c’est à se demander ce qui va se passer avec le projet (maquette) de l’Italien Ottavio Di Blasi qui a gagné le concours. Sera-t-il dédommagé par l’Etat, si le Sénégal renonce à réaliser le projet ? «Ah, non !», s’exclament des architectes pour qui ce sera El Hadj Omar Bach, le jeune investisseur qui a choisi son architecte (Helena Mocova, République Tchèque) et s’est engagé à mettre 9 milliards pour sa réalisation. «Ce sera ce Monsieur là (ndlr-El Hadj Omar Bach) probablement, ce ne sera pas avec l’argent du contribuable qu’il a écarté. (…) C’est ce Monsieur qui doit le dédommager si avant tout il faisait le monument et qu’on écartait définitivement Di Blasi parce que jusqu’ici, je ne croix pas savoir que Di Blasi a été notifié. Cette affaire n’a pas été actée jusqu’à présent, que je sache. Et, tant qu’il n’y a pas ça on est toujours avec la maquette de Di Blasi», a renseigné l’un d’eux.
Niemeyer ne verra plus jamais le Mémorial…
Pour ces acteurs, s’il fallait désigner un architecte, ils auraient préféré la proposition de l’architecte brésilien de renommée internationale, Oscar Niemeyer. Ce dernier avait offert ses services pour concevoir gratuitement une maquette pour le Mémorial de Gorée. «Choisir un architecte pour choisir un architecte, ce choix là me paraissait le plus indiqué d’autant plus que ce dernier avait derrière lui les moyens de lever des fonds. Venir quelques années plus tard avec un tel choix c’est surprenant», rappelle Mamadou Berthé, Architecte-conseil du projet du Mémorial de Gorée-Almadies. Mais, cette offre n’avait pas été retenue parce que le principe de ratisser large tout en impliquant tout le monde avait été mis en avant.
Seulement, décédé en décembre 2012, à l'âge de 104 ans, Oscar Niemeyer, architecte «moteur du mouvement moderne, et constructeur de la mythique ville de Brasilia» ne verra plus jamais ce mémorial, s’il venait à être construit un jour. Car pour les architectes, un projet pareil doit être «inclusif. Et l’approche qui consistait à un concours international largement ouvert au plan mondial, c’est l’approche qu’il fallait, c’est ça l’approche vertueuse. Et le résultat, il fallait l’accepter tel quel. C’est un jury souverain qui en a décidé ainsi, c’est ce que veut l’éthique, la bonne gouvernance». Et de conseiller que maintenant, «s’il faut choisir, il faut faire un choix volontaire. Il ne faut pas subir un choix. Or là, on a un choix qui s’impose. Un choix qui s’impose ce n’est plus un choix».
Amadou Lamine Sall aux abonnés absents
Nos tentatives de faire réagir le Commissaire général du projet du Mémorial de Gorée, M. Amadou Lamine Sall, sont restées vaines. Après plusieurs entretiens téléphoniques, nous lui avons envoyé, à sa demande, un questionnaire par courriel, auquel il n’a pas donné de suite.