LE NIGERIA DOIT S'ENGAGER "PLEINEMENT" CONTRE BOKO HARAM
LAURENT FABIUS
Niamey, 22 fév 2015 (AFP) - Le Nigeria doit s'engager "pleinement" dans la lutte contre les islamistes de Boko Haram, qui contrôlent de vastes territoires dans le nord-est de ce pays, a déclaré le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius dimanche à Niamey.
"Il est nécessaire qu'il y ait un plein engagement du Nigeria dans la lutte contre Boko Haram", a répété à plusieurs reprises M. Fabius lors d'une conférence de presse dans la capitale nigérienne, dernière étape d'une tournée en Afrique centrale qui l'a mené samedi à N'Djamena et Yaoundé.
Le nord-est du Nigeria, "très éloigné d'Abuja et de Lagos", est "géographiquement très proche" du Tchad, du Cameroun et du Niger, a justifié le ministre français, qualifiant d'"indispensable" un engagement plein du géant africain contre les islamistes, qui n'ont cessé de gagner du terrain dans le nord-est du pays depuis 2009.
La collaboration paraît parfois poussive entre le Nigeria et ses trois voisins, désormais engagés militairement contre le groupe armé nigérian. Samedi, Laurent Fabius a visité une cellule de coordination à N'Djamena, où se trouvaient des militaires tchadiens, camerounais, nigériens et français, mais dont l'armée nigériane était absente.
Ce, alors même que la France a promis d'accroître sa coopération avec tous les pays touchés par Boko Haram dans le domaine du renseignement notamment. Des discussions sur la création d'une force militaire régionale ont longtemps achoppé, Abuja minimisant le danger réel représenté par Boko Haram.
"Nous avons sous-estimé les compétences de Boko Haram" au début de son insurrection, a d'ailleurs reconnu dimanche le président nigérian Goodluck Jonathan. Le Nigeria et ses voisins - Tchad, Niger, Cameroun et Bénin - se sont mis d'accord début février pour mobiliser 8.700 hommes dans une force multinationale de lutte contre Boko Haram. Ils veulent déposer d'ici "fin février" un projet de résolution devant le Conseil de sécurité en ce sens, a affirmé Yaoundé samedi.
"Nous demandons à la France de peser de tout son poids pour que cette résolution soit vite adoptée", a déclaré dimanche le président nigérien Mahamadou Issoufou, pour qui "la France ne cherche pas à passer à travers les gouttes, la France se mouille, la France nous aide".
"La France soutiendra totalement cette demande", l'a rassuré Laurent Fabius. "On n'est pas partis pour une guerre de 10 ans, a affirmé M. Issoufou. Nous avons les forces qui sont déjà en place. Si ces forces peuvent être financées et équipées, je pense qu'on viendra à bout de Boko Haram assez rapidement."
Le Niger est le dernier des pays de la zone à s'être engagé dans la lutte contre Boko Haram. Quelque 3.000 de ses soldats sont positionnés à sa frontière nord-est, attaquée depuis quelques semaines par les islamistes.
"Nous n'avons pas de soldats pour l'instant hors de nos frontières", a affirmé le ministre des Affaires étrangères nigérien Mohamed Bazoum, pour qui l'armée nationale reste "en posture défensive", afin d'"empêcher que Boko Haram ne vienne" sur le territoire national.
Mais "nous ne nous interdisons pas d'aller en territoire nigérian et d'agir lorsque c'est nécessaire", a-t-il ajouté, reconnaissant une incursion des militaires nigérien samedi au Nigeria.
Depuis 2009, l'insurrection de Boko Haram et sa répression par les forces nigérianes ont fait plus de 13.000 morts et 1,5 million de déplacés au Nigeria, essentiellement dans le nord-est, où le groupe islamiste contrôle des pans entiers de territoires et plusieurs localités.