LE NIGERIA ET SES VOISINS APPELLENT A L'AIDE POUR CONTRER BOKO HARAM
Abuja, 3 sept 2014 (AFP) - Le Nigeria et ses voisins ont appelé mercredi la communauté internationale à les aider à tarir l'approvisionnement en armes et en argent du groupe islamiste armé Boko Haram, qui menace de s'emparer du nord-est du pays.
Sur le terrain, le sort de la ville stratégique de Bama est toujours l'objet d'informations contradictoires : des témoignages d'habitants indiquent que la ville est tombée mardi aux mains de Boko Haram, mais l'armée et les autorités continuaient de démentir mercredi.
A partir de Bama, les insurgés pourraient attaquer la capitale de l'Etat et métropole du nord-est du Nigeria, Maiduguri, à seulement 70 km de là, dont les habitants redoutent un assaut. Les insurgés se sont emparés mardi d'une autre ville, Banki située dans l'Etat de Borno, à la frontière camerounaise, selon la police camerounaise et des habitants.
Il faut une "coopération régionale efficace sur la question des sources de financement et d'approvisionnement en armes de Boko Haram", et "une plus grande coopération de la communauté internationale" pour aider à démanteler ces réseaux, a déclaré le ministre nigérian des Affaires étrangères Aminu Wali à l'issue d'une réunion à Abuja avec ses homologues du Bénin, du Cameroun, du Tchad et du Niger.
L'ONU a classé cette année Boko Haram comme un groupe terroriste lié à Al-Qaïda et pris des sanctions, mais celles-ci sont surtout symboliques et peu efficaces, selon les experts.
Boko Haram se finance principalement par des attaques de banques, des rançons et du racket, selon les experts, et son champ d'action reste concentré au nord-est du Nigeria, où il revendique la création d'un Etat islamique.
Des militaires nigérians déployés dans la région ont dénoncé le fait que les combattants islamistes étaient mieux équipés qu'eux et disposaient d'un armement supérieur.
Boko Haram se fournit en armes par la contrebande venant de Libye via le Sahara et a réussi à saisir de nombreux équipements, y compris des blindés, à l'armée nigériane lors de ses attaques.
Après des années d'actions de guérilla et d'attentats, Boko Haram affronte désormais de manière conventionnelle les militaires dans des batailles rangées, selon les spécialistes du Nigeria Security Network (NSN).
- Combats avec l'armée camerounaise -
Des informations contradictoires ont continué d'arriver mercredi sur la situation à Bama, théâtre de violents combats depuis lundi. Le gouverneur adjoint de l'Etat de Borno, Mustapha Zanna, a affirmé sur la BBC que l'armée contrôlait toujours la ville. "Les insurgés n'ont pu atteindre que les faubourgs de Bama".
"Une offensive terrestre et aérienne est en cours pour les repousser", a-t-il déclaré, démentant que la ville a été désertée par ses habitants. Plusieurs habitants de Bama avaient cependant témoigné mardi de la déroute des militaires face aux insurgés et de la fuite en masse des habitants et des soldats.
"Le Nigeria est sur le point de perdre le contrôle de l'Etat de Borno, y compris de sa capitale Maiduguri", ce qui permettrait à Boko Haram de "réaliser son ambition d'établir un califat dans le nord-est du Nigeria", ont averti mardi les experts du NSN. A Maiduguri, les habitants vivent dans la peur d'un assaut imminent des islamistes.
La ville "est submergée par des milliers de personnes qui ont fui leurs foyers pour échapper à Boko Haram", selon un habitant, Babagana Kolo. "Tout le monde a peur. Nous prions pour que les militaires stoppent l'avance" des insurgés, a dit un autre habitant, Ibrahim Galda.
S'ils prennent la ville, "ils voudront sûrement se venger d'en avoir été chassés" en 2013 par les forces de sécurité. Boko Haram a confirmé mardi son emprise progressive en s'emparant de la localité de Banki, à 70 km de route au sud-est de Bama.
"Hier soir (mardi), les Boko Haram ont attaqué Banki. Ils contrôlent la ville. Ils ont hissé leur drapeau", a déclaré à l'AFP un officier de police camerounais, sous couvert d'anonymat.
"Les militaires (nigérians) de Banki ont fui à Amchidé" au Cameroun. "Notre armée est intervenue ce matin pour empêcher les islamistes de traverser au Cameroun", a-t-il ajouté. D'autres combats ont opposé mardi l'armée camerounaise à Boko Haram sur la frontière, plus au nord.
L'armée camerounaise a affirmé avoir tué "une quarantaine" de combattants islamistes qui "tentaient de franchir" le pont de Fotokol, ville frontalière camerounaise voisine de la ville nigériane de Gamboru Ngala, prise par Boko Haram la semaine dernière.
L'insurrection armée de Boko Haram depuis 2009 et sa répression féroce par les forces de sécurité nigérianes ont fait plus de 10.000 morts, selon les autorités nigérianes, et 650.000 déplacés.