LE SCRUTIN MAINTENU AU 14 FÉVRIER MALGRÉ DES INCERTITUDES
ELECTIONS AU NIGERIA

Abuja, 23 jan 2015 (AFP) - La Commission électorale nigériane a assuré vendredi que les élections législatives et présidentielle auraient bien lieu le 14 février au Nigeria, malgré des problèmes logistiques et l'insécurité chronique dans le nord-est en partie contrôlé par les islamistes de Boko Haram.
Le conseiller national à la sécurité du Nigeria, Sambo Dasuki, avait déclaré jeudi que les élections devaient être reportées, expliquant que 30 millions de cartes d'électeurs n'avaient toujours pas été distribuées.
Mais le président de la Commission électorale nationale indépendante (INEC), Attahiru Jega, qui décide in fine de l'organisation des scrutins, a réaffirmé vendredi à Abuja que le calendrier serait tenu.
"J'ai dit que toutes nos tâches, y compris le défi de cette distribution des cartes d'électeurs, seront menées à bien longtemps avant le 14 février", a-t-il déclaré. "Nous avons publié le programme de ces élections il y a presque un an, et nous avons été très occupés à respecter cet agenda avec précision".
La Commission a déjà annoncé ce mois-ci que 68,8 millions de Nigérians s'étaient inscrits sur les listes électorales, sur une population de plus de 170 millions d'habitants.
M. Jega a affirmé vendredi que plus de 50 millions de cartes d'électeurs étaient prêtes, sur un total de 68 millions, et que plus de quatre millions de cartes avaient été reçues dans la journée de jeudi.
"Cela nous donne la certitude qu'avant la fin du mois de janvier, toutes les cartes seront disponibles et les électeurs pourront venir les retirer", a assuré M. Jega.
- Menace islamiste-
De lourdes menaces pèsent surtout sur la sécurité des scrutins, le groupe islamiste armé Boko Haram ayant mis en déroute l'armée et pris le contrôle de vastes territoires de l'extrême nord-est nigérian.
Des centaines de milliers d'habitants de la région se sont réfugiés dans les pays frontaliers, Tchad, Cameroun et Niger. Le secrétaire d'Etat américain John Kerry se rendra dimanche au Nigeria pour y rencontrer le président Goodluck Jonathan, sur fond de tensions entre les deux pays.
Le Nigeria avait reproché aux Etats-Unis de ne pas lui vendre les armes qui lui permettraient de "porter un coup fatal" au groupe islamiste. De leur côté, les Etats-Unis n'ont de cesse d'appeler l'armée nigériane à ne pas mener, dans sa lutte contre les islamistes, d'opérations de représailles indiscriminées frappant aussi les populations.
L'insurrection de Boko Haram a fait plus de 13.000 morts au Nigeria et 1,5 million de déplacés depuis son début en 2009. Depuis plusieurs mois, le groupe multiplie également les raids meurtriers au Cameroun voisins.
Début janvier, les islamistes ont mené une attaque particulièrement sanglante contre la ville nigériane de Baga, sur les rives du lac Tchad, qualifiée de crime contre l'Humanité par Washington et Paris.
La semaine dernière, le président tchadien Idriss Déby Itno a fait plier son homologue nigérian Goodluck Jonathan qui, affaibli par les revers de son armée, a dû renoncer à la conduite des opérations régionales contre les islamistes.
L'état-major de la force régionale anti-Boko Haram a été transféré du Nigeria à N'Djamena, capitale du Tchad. La Commission électorale a reconnu que la tenue des scrutins était "peu probable" dans les zones contrôlées par les islamistes et qui constituent un des fiefs du Congrès progressiste (APC), principal parti d'opposition.
Le parti a prévenu que le résultat serait remis en cause si ces habitants déplacés ne pouvaient pas voter.
- Des élections serrées -
Vendredi, le conseiller à la sécurité Sambo Dasuki a également jugé dans une interview diffusée par la radio BBC qu'il n'y avait "pas de raison de se presser (...) Nous avons entre 30 et 90 jours pour organiser les élections générales avant la fin de la mandature" en mai.
L'opposition nigériane, comme le Département d'Etat américain, se sont déclarés opposés à un éventuel report. A moins d'un mois de l'échéance, l'élection s'annonce comme la plus serrée depuis la fin des dictatures militaires, il y a 16 ans, dans le pays le plus peuplé et première économie d'Afrique.
Elle oppose principalement le président Goodluck Jonathan à l'ex général Muhammadu Buhari, un ancien dirigeant du régime militaire. M. Jonathan, un chrétien du sud de 57 ans, très critiqué pour n'avoir pas su juguler l'insurrection islamiste, est candidat à un deuxième mandat de quatre ans.
M. Buhari, un musulman du nord, candidat de l'APC, fait campagne sur une approche plus frontale de l'insurrection, dénonçant également des échecs du gouvernement dans la lutte contre la corruption.
Ces derniers jours, le camp de M. Jonathan a multiplié les attaques personnelles contre M. Buhari, 72 ans, l'accusant d'être malade, puis d'être inéligible faute de diplôme de fin d'études secondaires. Le président a également voulu occuper le terrain sécuritaire en effectuant la semaine dernière une visite surprise à Maiduguri, fief historique de Boko Haram.