VIDEOLES ÉLÈVES, ÉTERNELS AGNEAUX DU SACRIFICE
COURT PROLONGEMENT DE L'ANNÉE, DÉSACCORDS ENTRE ACTEURS…
Suite au réaménagement du calendrier scolaire, des enseignants fustigent une démarche cavalière du ministre de l'Education et se disent prêts à boycotter les examens, s'il le faut. Et les élèves dans tout cela ? Ils sont les éternelles offrandes d'une bataille sans fin.
Le calendrier scolaire a été réaménagé suite à la longue grève des enseignants qui a failli conduire à une année blanche. Le ministre de l'Education nationale a repoussé les dates des examens afin, dit-il, de permettre aux élèves de se rattraper sur le temps perdu.
Mais il y a des interrogations sur la durée de la prolongation et la position déclarée de certains syndicats. D'abord sur le réaménagement du calendrier en soi. Le ministre Serigne Mbaye Thiam a décidé de renvoyer les examens du baccalauréat au 20 juillet plutôt que le 30 juin, ceux du Bfem au 27 juillet au lieu du 20 du même mois.
A la lumière de ces dates, l'on se rend compte que les épreuves du Bfem et du Bac ont été décalées respectivement d'une semaine et de trois semaines de leur date initiale. Sachant que les enseignants ont observé une grève de plus de deux mois, une question se pose alors. Est-il possible de rattraper en une ou trois semaines une perte de temps de près de 10 semaines ?
Le ministre, dans sa conférence de presse, déclare s'être basé sur 16 rapports produits par les inspections académiques. N'empêche, la réponse va de soi chez le coordonnateur de l'Union des syndicats pour un enseignement de qualité (Useq). "Evidemment que c'est impossible ! Le temps perdu ne se rattrape jamais. C'est pourquoi nous, à l'Useq, nous avons dit qu'il faut que le gouvernement tire les leçons pour que cela ne se répète plus", souligne Amadou Diaouné.
Le secrétaire général du Cusems Abdoulaye Ndoye, lui, préfère laisser cette prérogative à la tutelle. Toutefois, il affirme avoir demandé le rapport final pour en savoir davantage. Par ailleurs, il y a des spécificités en fonction des régions. Qu'est-ce qui est prévu pour les élèves du Sud où l'hivernage pourrait s'installer dès le mois prochain ?
Surtout si l'on sait qu'il y a de nombreux abris provisoires à travers le territoire. Bien sûr que le ministre a promis que toutes les dispositions seront prises pour des réaménagements répondant à des contraintes ou spécificités locales. Mais 2012 n'est pas encore loin de nous.
Après avoir échappé de justesse à une année blanche, il a été prévu que le mois de septembre soit un mois de cours. Pratiquement l'ensemble des établissements que nous avions visités à l'époque entre Dakar ville, Pikine et Guédiawaye n'avaient pas respecté les consignes. Au contraire, les responsables des établissements et les enseignants s'étaient arrangés pour ne pas se plier à la mesure, si ce ne sont pas les élèves eux-mêmes qui avaient déserté.
Ce qui est évident, c'est que ce sont les écoliers qui seront encore une fois les agneaux du sacrifice. Des lacunes vont être accumulées pendant tout le long du cursus. Et au bout du compte, ils se retrouveront dans des difficultés pour s'insérer sur le marché ou suivre des études supérieures poussées.
"Nous ne devons pas à l'État des heures supplémentaires"
L'autre point est la manière dont la décision a été prise et la réaction des enseignants qui s'en est suivie. A la sortie de la rencontre de négociations avec le gouvernement, le secrétaire général de l'autre Cusems Dame Ndoye disait attendre que le gouvernement convoque les acteurs pour qu'une discussion soit ouverte sur ce qu'il y a à faire. Cette position a été également celle de l'Useq. Mais à l'arrivée, le constat est que le gouvernement a préféré faire cavalier seul.
Dans notre édition du week-end (EnQuête N 1173) Ibrahima Wane de l'Organisation démocratique des enseignants du Sénégal (Odes) déclare : "Le ministre ne nous a pas consultés, alors que nous venons de signer un protocole d'accord. Nous constatons que les mauvaises habitudes recommencent."
Amadou Diaouné est du même avis. "Nous avions demandé à ce que le ministère convoque une réunion d'information. C'est regrettable qu'il ait pris les décisions à lui seul sans en informer les responsables syndicaux au préalable", déplore-t-il. Quant à M. Ndoye du Cusems, il n'a aucune objection à ce niveau, parce que les représentants de son syndicat ont été associés dans le travail fait dans les IA.
Passée cette question, reste la gestion du personnel enseignant.
Le leader du Saems-Cusems Mamadou Lamine Dianté a affiché son opposition. Il annonce même que les siens vont étudier la possibilité du boycott des examens étant donné que le gouvernement ne prévoit pas le paiement d'heures supplémentaires induites par le nouveau réaménagement. Abdoulaye Ndoye ne veut pas être explicite, mais il dit la même chose.
"Je dois préciser que nous ne devons rien à l'État. Nous sommes quittes avec lui. Le gouvernement ne nous a pas payé les heures de grève. C'est la loi. Mais nous ne lui devons pas des rattrapages et il ne peut pas nous les imposer. Il faut que l'État tienne compte aussi du réaménagement. L'année scolaire n'est pas élastique", prévient-il.
Des propos qui ne laissent pas place au doute. Lui aussi veut le paiement des heures supplémentaires. Mais il y a lieu de se demander de quelles heures supplémentaires il s'agit. A ce que l'on sache, l'année scolaire se termine le 31 juillet. Or, la fin des cours est prévue bien avant cette date (14 juillet). Amadou Diaouné a peut-être raison de dire qu'il n'y a aucune heure supplémentaire à payer.
"Ce sont des heures de travail d'habitude. Et puis dans de pareilles circonstances, les enseignants par eux-mêmes prennent l'initiative de travailler sans rien demander", relève-t-il.
À lire sur SenePlus, REPORT DE LA DATE DES EXAMENS, LES ÉLÈVES SE PRONONCENT