LES ÉTUDIANTS EXPRIMENT LEURS REGRETS
Caillassage du cortège présidentiel à l’UCAD
Trois jours après les faits, les jets de pierres sur le cortège présidentiel continuent de nourrir les débats à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Ici, l’indignation est le sentiment le mieux partagé.
«Quelles qu’en soient les raisons, nous ne devions pas réagir de la sorte. Ce n’est pas la personne de Macky Sall qui était en jeu, mais l’institution qu’il incarne. Elle est sacrée», plaide Moutar Ly, étudiant en Licence 2 au département d’Anglais.
Son coup de gueule est une réponse à Omar Ndiaye, un de ses amis, qui tentait de justifier les jets de pierres essuyés par le cortège présidentiel, vendredi dernier, lors de la visite du chef de l’Etat à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, par leurs difficiles conditions de vie dans ce lieu du savoir. Hier, trois jours après ces actes, que Moutar juge « malheureux », l’université a retrouvé son calme.
Les deux amis et une dizaine d’autres étudiants sont agglutinés devant le vendeur de journaux installés à l’entrée de la porte principale du campus. Ils commentent les titres des journaux qui ont mis en exergue les actes d’incivisme de certains étudiants.
A l’intérieur du campus, les traces du passage du président Macky Sall sont encore visibles. Ici, une grande banderole de bienvenue flotte encore sous l’effet du vent. Là-bas, des affiches tapissent les murs d’un pavillon. Sur l’allée centrale, les barrières qui avaient été installées de part et d’autre de la chaussée attendent d’être enlevées.
Plus loin, à l’endroit où l’incident s’est produit, c’est-à-dire à l’entrée du stade du campus, on peut apercevoir, toujours debout, le grand chapiteau où s’est déroulée la cérémonie d’inauguration des trois pavillons de 1044 lits.
A l’ombre d’un arbre, assis sur l’un des bancs publics qui jouxtent le mur du stade, Ibrahima Diallo, étudiant en Licence 1 de Lettres modernes, est plongé dans ses cours. Méfiant au début, il finit par donner son sentiment sur ces « événements déplorables ».
« Les étudiants ont raté une occasion d’exposer leurs problèmes au président de la République. Le chef de l’Etat était là pour nous écouter, nous devions lui parler. Nous pouvions nous en limiter aux huées, car c’est une façon éloquente de lui montrer que nous ne sommes pas contents de lui. Mais là, nous avons posé un acte qui va davantage écorner notre image. Cela ne nous honore pas », dit-il d’une voix basse et timide.
Deux rangées de bancs plus loin, Rokiyatou Ndiaye semble attendre quelqu’un. Comme Ibrahima, elle se dit choquée par les jets de pierres. « Nous devons respect à la personne du président de la République. Quand l’autorité suprême se déplace et vient vers vous, le minimum, c’est de bien l’accueillir et qu’importe les griefs que l’on peut nourrir à son encontre », dit-elle.
Et cette étudiante en Licence 1 à la Faculté des sciences économiques et de gestion d’ajouter : « Le président Macky Sall a été étudiant ici, il a vécu à peu près les mêmes conditions que nous, il sait ce qui s’y passe. On a gâché une belle occasion d’échanger sur les maux de l’université ».
Pour exprimer leur mécontentement, surtout dans un cadre comme l’université, les étudiants n’ont pas besoin, de l’avis d’Abdourahmane, d’user de la violence. « C’est une honte pour la communauté universitaire », martèle-t-il.
Sa camarade avec qui il partage le même amphithéâtre, Ndèye Diop, abonde dans le même sens. « Nous vivons dans des conditions difficiles, mais rien ne peut justifier ces comportements. C’est regrettable. C’est à condamner », dit-elle. Leur ami, Habibou Guèye, fait chorus.
Selon lui, « cette visite du président devait être une fête », parce que, justifie-t-il, « c’est la première fois que le campus reçoit la visite d’un chef d’Etat ».