LES AVOCATS DE HABRE SAISISSENT LA COUR SUPREME
POUR VIOLATION DES PROCEDURES AU NIVEAU DES CHAMBRES EXTRAORDINAIRES AFRICAINES
Le collectif des avocats du Président Hissène Habré a fait face hier, jeudi 25 juillet, à la presse pour mettre à nu la procédure soulevée par les Chambres Africaines Extraordinaires (Cae). Ils ont déposé un recours au Conseil constitutionnel contre le décret du 30 janvier 2013 portant autorisation de nomination des magistrats sénégalais dans les Chambres.
Le collectif des avocats de Hissène Habré est formel : «l’ancien président tchadien ne reconnait pas les Chambres Africaines Extraordinaires (Cae) et ne prendra pas part, à juste titre, à son prochain procès». Face à la presse hier, jeudi 25 juillet, Me El hadj Diouf, Me Ibrahima Diawara et Me François Serres, tous membres de ce pool d’avocats représentant les intérêts de l’ancien homme fort de N'Djamena, ont estimé que les procédures des dites juridictions sont contraires aux textes de la législation internationale et sénégalaise. Par conséquent, pour ces avocats Habré ne collaborera pas avec les magistrats dans le cadre des accusations dont il fait objet. Toutefois, Me El hadj Diouf et ses confrères précisent que cette décision est prise à titre personnel par le président Habré.
«La résultante et le constat que nous faisons des conditions dans lesquelles ce procès s’annonce ne sont pas acceptables. Et c’est la raison pour laquelle le Président, à titre personnel et comme justiciable, a décidé de ne pas participer à ce procès, à cette procédure et de ne pas reconnaitre les Cae», a déclaré Me François Serres. Qui soutient, par ailleurs, que la mise en place de cette juridiction extraordinaire est «une violation flagrante de la Constitution sénégalaise, mais également des dispositions de la Cour de justice de la communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) qui avait demandé la mise en place d’une juridiction ad hoc internationale et une procédure ad hoc internationale ». Et de préciser : «Les Chambres Africaines Extraordinaires que nous avons dans le cadre de ce procès n’ont rien à avoir avec une juridiction internationale pour la simple raison que, sur les 20 membres qui devaient composer cette chambre, on a 18 sénégalais et 2 étrangers».
Mieux, il a indiqué que la procédure utilisée par les Cae est purement sénégalaise et non internationale comme l’avait demandé la Cour de justice de la Cedeao. «Les juges d’instruction ou les procureurs nous renvoient sans arrêt, sans tenir compte du caractère extrêmement sommaire des statuts, aux codes de procédure pénale sénégalaise», a-t-il souligné, avant de poursuivre : «l’ensemble des questions qui a été envisagé lors de l’arrestation de notre client, lors de son inculpation, de sa mise en détention, y compris les droits de la défense, ont été réglées par référence au code pénal sénégalais».
CASSER LE DECRET PORTANT NOMINATION DES MEMBRES DES CAE
Après la Cour de justice de la Cedeao, c’est à la Cour suprême que s’invite l’affaire Habré. Un recours est déjà sur la table du président de cette haute juridiction sénégalaise. Le pool des avocats défendant les intérêts de l’ancien président tchadien veut en finir avec les Chambres Africaines Extraordinaires dont les conditions de mise en place n’obéissent pas, selon Me Ibrahima Diawara, aux règles de droit. Ibrahima Diawara et ses amis reprochent au Président Macky Sall et à son ministre de la Justice d’outrepasser leurs prérogatives dans l’affaire Habré.
C’est donc la raison du recours pour excès de pouvoir contre le Décret N° 2013-212 du 30 Janvier 2013, portant autorisation de nomination des magistrats sénégalais dans les Chambres Africaines Extraordinaires par le Président de la Commission Africaine sur proposition du ministre de la Justice. Le recours a été de fait déposé par ce pool d’avocats au bureau de la cour suprême. Toutefois, Me Diawara précise que cette saisine de la Cour suprême n’est qu’un prétexte pour impliquer le Conseil constitutionnel mis à l’égard de cette procédure par l’Etat sénégalais. Le décret attaqué permettra, selon lui, au Conseil Constitutionnel saisi, sur le fondement de l’article 20 de la N°92-23 du 30 mai 1992, d’exercer un contrôle de constitutionnalité sur l’accord du 22 août 2012.
«Lorsque la solution d’un litige porté devant le conseil d’Etat ou la Cour de Cassation est subordonnée à l’appréciation de la conformité des dispositions d’une loi ou des stipulations d’un accord international à la constitution, la haute juridiction saisit obligatoirement le Conseil constitutionnel de l’exception d’inconstitutionnalité ainsi soulevée et sursoit à statuer jusqu’à ce le Conseil Constitutionnel se soit prononcé. Le Conseil se prononce dans un délai de vingt jours à compter de la saisine. Si le Conseil Constitutionnel estime que la disposition dont il a été saisi n’est pas conforme à la constitution, il ne peut en être fait application.», a-t-il expliqué aux journalistes. .
Me El Hadj Diouf «mitraille» Madiambal Diagne et Gadio
Pour sa part, le bouillant avocat, El Hadj Diouf, ne s’est pas privé de fustiger le comportement du patron du groupe de presse Avenir communication qu’il estime jouer un double jeu dans cette affaire. Madiambal Diagne a pris, selon Me Diouf, partie dans cette affaire quand il s’est permis de se cacher derrière sa plume de journaliste pour dénigrer la femme de son client. Toutefois, celui qui s’est auto-proclamé « avocat du peuple » dit comprendre cette réaction du directeur de publication du journal Le Quotidien. Pour lui, ce dernier a reçu de l’actuel chef d’Etat tchadien Idriss Deby des primes pour ce travail médiatique, lors d’un voyage effectué dans ce pays. Mieux, El hadj Diouf assure qu’il détient des informations qui portent à croire que Madiambal Diagne, de même que l’ancien candidat malheureux à la présidentielle de 2012 et ex-ministre des Affaires étrangères sous Wade, Cheikh Tidiane Gadio, sont recrutés par la commission de communication des Chambres Africaines Extraordinaires pour assurer le lynchage médiatique de son client. Me Diouf n’a pas raté les prétendues victimes du président Habré, reçues les semaines passées par les magistrats des Cae. Pour lui, ces dernières dont le nombre serait largement différent des 40000 victimes annoncées par les Cae, sont mobilisées et entretenues par le président Idriss Deby, dans le seul but de faire aboutir son plan : éliminer définitivement Habré.