LES CHIFFRES DE LA DÉCADENCE
UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP
Le Syndicat autonome de l’enseignement supérieur (Saes) a dressé le tableau des statistiques des effectifs et des places physiques à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) pour asseoir sa position selon laquelle la crise est devenue ingérable.
Ce n’est plus un secret pour personne. L’université Cheikh Anta Diop de Dakar a largement dépassé ses capacités d’accueil depuis longtemps. Elle croule sur le poids de son effectif. Et pour rendre visible les maux dont souffre l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), le Syndicat autonome des enseignants du Supérieur (Saes) a livré des statistiques par faculté sur la représentation des enseignants et chercheurs par catégorie et le nombre d’étudiant par établissement. Il ressort de ces statistiques que les effectifs des étudiants à l’Ucad ne cessent d’augmenter d’année en année. Ils ont passé de 65 277 en 2011-2012 à 80 500 en 2012-2013, soit une augmentation de 15 000 étudiants.
978 enseignants pour 67 740 étudiants
Selon le Saes, la croissance du nombre d’étudiants semble se régulariser à environ 23% par année. Les plus grandes facultés que sont la Faculté des lettres et sciences humaines (Flsh), la Faculté des sciences et techniques (Fst), la Faculté des sciences juridiques et politiques (Fsjp) et la Faculté des sciences économiques et de gestion (Faseg) sont les plus touchés. Ces facultés qui s’étouffent absorbent respectivement 35%, 15%, 18% et 11% des effectifs de l’université. Ainsi, sur un total de 197 enseignants, la Flsh compte pour l’année écoulée 26 993 étudiants. Il en est de même pour la Fsjp et la Faseg qui comptent respectivement 72 et 96 enseignants pour un effectif correspondant successivement à 14 446 et 8870 étudiants. La Fst quant à elle compte 235 enseignants pour 11 830 étudiants. Cette tendance commence aussi à toucher, la Faculté de médecine pharmacie d’Odonto-Stomatologie (Fmpos) jadis considérée à tord et à raison comme une faculté choyée. La Fmpos ne compte que de 378 enseignants pour former et encadrer les 5601 futurs médecins jusqu’à la fin de leur cursus.
Déficit de 57 077 places physiques et de professeurs de catégorie A
D’après les statistiques du Saes, l’Ucad qui ne compte que 217 salles de cours et amphis pour un nombre qui augmente chaque année. Elle souffre actuellement d’un déficit de 57 077 places physiques. Le déficit en personnel enseignant est l’autre maux évoqué par les responsables du Saes. Selon eux, 16% seulement des 197 enseignants de la Flsh sont de la catégorie A. Le reste est composé d’enseignants de la catégorie B (32%) et de vacataire (52%). Quant à la Fsjp, les enseignant de la catégorie A représentent 16%, 42% de la catégorie B et 43% de vacataires. Au niveau de la Faseg la situation est pareille. Dans cette faculté où on forme des économistes et gestionnaires, les 5% des enseignants sont de la catégorie A. Les enseignants de la catégorie B et les vacataires représentent respectivement 30% et 63% de l’effectif de ladite faculté. Une situation, qui de l’avis du Saes, affecte la qualité de l’enseignement.
Une pléthore d’étudiants pour un nombre réduit d’enseignants
Les facultés de l’Ucad qui doivent accueillir cette année 21 949 nouveaux bacheliers ne sont pas les seules à souffrir de surpoids. Les instituts et écoles de formations dépendant de l’Ucad étouffent aussi. Pour un total de 2730 étudiants, la Faculté des sciences et technologie de l’éducation et de la formation et de l’éducation (Fastef) ne compte que 108 enseignants. Parmi ces enseignants, 5% sont de la catégorie A, 23% de la catégorie B et 72% de vacataires. De même que la Fastef, l’Institut national supérieur de l’Éducation populaire et du Sport (Inseps) souffre de ce surplus. L’Inseps compte, en effet, 400 étudiants pour uniquement 14 enseignants. Dans cet institut qui forme les cadres de la hiérarchie A en sport populaire, le corps enseignant est composé de 5% de professeurs de la catégorie A. Le reste des enseignants est composé de 28% de la catégorie B et 66% de vacataires. Il en est de même au niveau du Centre d’étude des sciences et techniques de l’information (Cesti) et de l’Ecole des bibliothécaires, archivistes et documentalistes (Ebad) où le Saes a également noté un déséquilibre énorme entre enseignants et étudiants.
Mort de 16 enseignants en 4 ans, Y. Seydi évoque l’excès de fatigue
Analysant ces statistiques, Yankhoba Seydi, le porte-parole du Saes, a indiqué que ce déséquilibre est à l’origine du fonctionnement 12 mois sur 12 de l’Ucad. «Ce ratio n’existe nulle part au monde. Et si on ne s’arrête pas, c’est l’institution qui va, elle-même, finir par s’arrêter», a alerté le porte-parole du Saes. Selon M. Seydi, les enseignants souffrent de cette pléthore d’étudiants les obligeant à travailler sans arrêt. M. Seydi de reconnaître, toutefois, que l’Ucad a perdu, en l’espace de 4 ans, 16 enseignants. Ces morts sont en grande partie liées, selon lui, à l’excès de fatigue.