"LES DÉCISIONS DU TRIBUNAL DES PAIRS S'APPLIQUENT À TOUS LES JOURNALISTES"
EXCLUSIF : BACARY DOMINGO MANE, PRÉSIDENT DU CORED
Le tribunal des pairs, l’une des instances du CORED, a été installé mercredi 27 août. Dans cet entretien, le président du CORED, Bacary Domingo Mané, donne les détails de son fonctionnement avec une précision de taille : les décisions du Tribunal s’appliquent à tous les acteurs des médias.
Comment se passe la saisine du CORED ?
La saisine se fait de deux manières. D’abord un citoyen qui se sent lésé par un journaliste, on lui suggère de saisir le tribunal des pairs au lieu de saisir un tribunal de droit commun. Le cas échéant, la personne décline son identité, donne son adresse et en même temps l’article incriminé avec toutes les références. Puis il adresse la requête au présidant du CORED. C’est le premier mode de saisine. Le deuxième, c’est l’auto-saisine. C’est-à-dire que le tribunal ne va pas attendre sur certaines questions qu’un citoyen le saisisse. C’est le tribunal lui-même qui s’autosaisit s’il pense qu’un article a des conséquences fâcheuses.
Comment se déroulent les audiences du tribunal des pairs ?
Lorsque le citoyen dépose une plainte, elle est adressée au président du CORED. C’est ce dernier maintenant qui va transmettre la plainte au tribunal des pairs. Le tribunal siège. D’abord c’est une audience à huis-clos dont les délibérations restent vraiment secrètes. Maintenant une fois que la décision prise, évidemment le Tribunal va l’envoyer à tous les médias pour publication.
Le journaliste condamné par le Tribunal des pairs a-t-il la possibilité de recours ?
Bien sûr. Le recours se fera auprès du directoire du CORED. Le Directoire est l’instance qui a choisi les membres du Tribunal. Vous avez vu l’autre jour, c’est le directoire qui a installé les membres du Tribunal des pairs. Donc, lorsqu’un journaliste n’est pas d’accord avec les délibérations du Tribunal, son recours se fait auprès du directoire qui peut aller dans le même sens que le tribunal des pairs ou aller ne pas aller dans le même sens. Donc le directoire, c’est vraiment le seul recours pour le journaliste.
Le directoire du CORED est-il indépendant vis-à-vis du tribunal des pairs ?
Il est tout à fait indépendant. La preuve, il n’y a pas un président du tribunal contrairement à ce qui a été dit.
Donc Mame Less Camara n’est pas le président Tribunal ?
Non. Il n’y a pas de président du Tribunal. Par contre il y a un président de séance. C’est-à-dire que chaque fois qu’une affaire est pendante, le Tribunal choisit un président de séance mais une fois l’affaire vidée, c’est fini. On passe à autre chose.
Comment est choisi le président de séance ?
C’est entre eux, les juges. Ils vont désigner quelqu’un ou quelqu’un peut se porter volontaire. Mais en principe quelqu’un doit être désigné.
Certains journalistes semblent remettre en cause la légitimité du Tribunal des pairs. On ne citera pas de nom, mais des réserves existent. Qu’est-ce qui est prévu au cas où un journaliste refuserait de se présenter devant le Tribunal ?
(Ferme) De toutes les façons ce qui est sur et certain, les textes sont clairs, les statuts du CORED sont clairs : toutes les décisions du Tribunal s’appliquent à tous les journalistes. C’est clair-là. Si quelqu’un vous dit : ‘’moi, je ne suis pas concerné’’, il raconte des histoires. Parce que simplement le CORED étant la résultante d’un processus inclusif, tous les segments des médias ont donné leur caution, et ce n’est pas maintenant que les gens vont dire : ‘’je ne suis pas concerné’’.
Vous n’avez pas répondu à ma question. Qu’est-ce qui a prévu en cas de refus ?
On n’a pas de moyens de constitution. Sauf que dans le cas d’espèce qu’il soit présent ou non, le tribunal siège. Lorsqu’il reçoit une plainte, le président du CORED la soumet au Tribunal qui va saisir le journaliste incriminé pour l’informe et informe son organe. S’il refuse de déférer évidemment le tribunal siège. Mais à ce moment, le tribunal va indiquer dans la décision prise que la décision a été prise en l’absence du journaliste concerné, qui n’a pas voulu déférer à la convocation du tribunal.
Certains des membres du CORED et du Tribunal des pairs exercent la profession. Comment éviter le risque de conflit d’intérêts ?
La question est intéressante, pertinente. Au moins tout ça, c’est des cas qui sont prévus. On a dit : si on statue sur une affaire et que parmi les juges, il y a quelqu’un qui appartient à la rédaction concernée, celui-ci est out. Il ne pourra pas siéger. C’est clair. Les textes sont clairs.
Qu’est-ce qui explique la faible affluence des patrons de presse, du public comme du privé, lors de l’installation du Tribunal des pairs ?
En tous cas, le bureau du CORED a fait le tour de certains patrons de presse que nous avons rencontrés. Et nous leur avons fait part de notre souhait de les voir s’engager aux côtés du tribunal des pairs. On a rencontré Mamadou Oumar Ndiaye, Laye Bamba Diallo et qui d’autres encore ?
Cheikh Thiam, le directeur du Soleil, et Madiambal Diagne, le président du Cdeps ?
Cheikh Thiam, on ne l’a pas rencontré. Mais Cheikh Thiam est l’ex-président du CORED, les gens l’oublient. C’est après lui que je suis venu. Donc, le problème ne se pose pas. Ces temps-ci, il a une petite santé. Maintenant Madiambal, on ne l’a pas rencontré. Mais on a rencontré ses collaborateurs. Nous sommes allés jusqu’au Quotidien (le journal édité par Avenir communication dont Madiambal Diagne est l’administrateur, Ndlr). On est allé à L’AS, Thierno Talla (le directeur de publication, Ndlr) n’était pas là, mais on a rencontré ses collaborateurs. Donc voilà, on a fait ce que nous devrions faire. Maintenant s’ils n’ont pas été là, c’est eux, seuls, qui peuvent dire pourquoi ils n’étaient pas là.