LES DEMONS DE LA DIVISION ONT ENCORE REFAIT SURFACE
AG DES ARTISTES POUR DÉSIGNER LES MEMBRES DU CONSEIL D’ADMINISTRATION ET LE DIRECTEUR
C’est à croire que les artistes ne parleront jamais le même langage. Pour la mise en place de la nouvelle société de gestion collective, ça coince toujours. Lors de l’assemblée générale organisée hier, ils ont démontré que c’est difficilement que ce projet finira par accoucher de quelque chose de concret. Des propos irresponsables, interruption du ministre qui présidait les débats, une bagarre évitée de justesse dans les couloirs au niveau inférieur, de chaudes larmes, le caméraman de Walf empêché de filmer…, tout y était hier.
Tout se déroulait comme dans le meilleur des mondes pourtant à seize heures. Les artistes venus massivement écoutaient religieusement les intervenants dans la grande salle du King Fahd Palace. Un premier orateur, un deuxième, un troisième et paff. L’atmosphère change. Mayacine Diop (président de l’association des producteurs) interpelle directement le ministre Abdoul Aziz Mbaye: «excusez-moi M. le ministre, ceux à qui vous donnez la parole ne sont pas plus méritants que nous. Ils ne sont pas plus méritants que les artistes que nous sommes, les producteurs qui ont sué sang et eau pour faire de notre métier ce qu’il est. Comment peut-on prétendre organiser une société collective, prétendre nous confier la gestion des droits d’auteurs et droits voisins sans donner la parole à Talla Diagne, Talla Gadiaga, des maisons de production comme Lamp Fall, Africa Production ? Ils n’ont pas été associés. Ce n’est pas cette minorité au présidium (allusion à Alioune Badara Bèye, Cheikh Ngaido Bâ) qui va décider pour nous».
Pris de court par sa réaction, certains tentent de sauver les meubles. Ils se mettent à le huer pour le décourager. Mais Mayacine Diop enchaîne de plus belle. Il s’attaque directement à Abdou Aziz Mbaye, Ngaido Bâ et Alioune Badara Béye. «Cette assemblée générale, c’est l’arnaque du siècle. Mais arnaque bi dou diale (ça ne passera pas). Les producteurs ont toujours saigné, les artistes ont toujours saigné. Ce n’est pas à une minorité qui ne représente rien du tout, sous prétexte qu’ils maîtrisent le français, de nous dicter la conduite à tenir».
Comme les choses commençaient à tourner au vinaigre, Lord Aladji Man (ancien membre du groupe Daara-Ji) bondit de sa chaise. Aidé de quelques gros bras, tous en costards noirs, il conduit «le perturbateur» dehors.
Mais au niveau inférieur, dans les couloirs, loin des yeux du ministre et des artistes, c’est une autre ambiance. Ici, seuls les coups de poings ont manqué. Épreuve de force, négociations pour faire baisser la température, empêcher les journalistes de faire leur travail (comme le caméraman de Walf qui a été malmené), on aura tout vu. Entre les souteneurs de Mayacine Diop comme Cheikh Ndiaye (du Soleil Levant), le rappeur Bill Diakhou, Mouhamadou Bitéye de Walf et les gros bras amenés par Lord Aladji Man, c’est de justesse que la bagarre a été évitée. C’est finalement Aladji Man, après les chaudes larmes versées par Mayacine Diop, qui a mis fin au brouhaha. Il a pu convaincre Mayacine Diop d’entrer avec lui dans un des ascenseurs. Ils disparaîtront un bon moment avant de réapparaître ensemble au niveau de l’amphithéâtre.
Mayacine Diop déballe
Le ministre qui a dirigé les débats n’a pas jugé utile de parler à la presse. Il n’a pas dit un mot à la presse qui l’attendait pourtant au terme de la cérémonie pour l’interroger sur l’incident.
Mais Mayacine Diop lui, après avoir retrouvé, ses esprits s’est expliqué. L’assemblée générale d’hier est «la plus illégitime et la plus impopulaire» qui soit. Il argue en effet que les musiciens sont en train de s’arranger pour se faire inscrire en nombre important sur la liste des membres qui doivent désigner le Conseil d’administration et le Directeur qui se chargera de gérer la société de gestion collective qui va être mise sur pied. Ils veulent que le prochain bureau soit composé en majorité de musiciens.
Si le plan des musiciens passe, dit-il, beaucoup d’entre eux n’auront pas à payer le prêt de 400 millions qu’ils ont déjà contracté au niveau du Bureau sénégalais des droits d’auteur (Bsda). Il s’y ajoute que parmi les gens qui étaient au présidium, hier, certains ont bouffé les 18,5 millions décaissés par la Francophonie et un autre fonds qui a été remis par le ministre de la Culture pour appuyer les artistes dans la préparation de l’assemblée générale. Selon lui, cette énième rencontre est encore partie pour être un échec.