LES MILITAIRES INVALIDES DEFILENT LE 2 AVRIL
ABANDONNES A LEUR TRISTE SORT
Les militaires invalides ont tenu hier, une assemblée générale pour dénoncer les injustices dont ils font l’objet et revendiquer la revalorisation de leur pension, la prise en charge des blessés graves et la réinsertion socioprofessionnelle des jeunes mutilés. Ils vont marcher le 2 avril pour prendre l’opinion à témoin.
«On nous tue mais on ne nous déshonore pas.» Ils ont répété ce slogan quand ils étaient dans les rangs de l’Armée qu’ils ont servie avec «bravoure et dignité». Aujourd’hui, les militaires invalides demandent à être servis pour services rendus à la Nation. Laissés à leur triste sort, ils vont défiler dans les rues de la capitale, le 2 avril prochain pour réclamer de meilleures conditions de vie. L’heure est à la mobilisation au sein des membres de l‘Association des militaires invalides, qui ont tenu hier une assemblée générale à la Maison des anciens combattants.
Ils ont étalé les maux qui les étreignent : la faiblesse de la pension, les manquements dans la prise en charge sanitaire, l’absence d’insertion socioprofessionnelle. Ils interpellent le chef de l’Etat sur leur dossier qui peine à trouver une solution depuis 2005. Selon le président de cette association, la pension d’invalidité a été fixée après 3 mois de concertations dans une commission mixte où leurs réclamations ont été reconnues et validées. «Le président de la République a reconnu qu’il ne pouvait pas tout satisfaire, il a tout de même promis de l’améliorer.
Mais compte tenue des contraintes financières, on devait commencer avec une certaine somme mais elle devait évoluer avec un effet rétroactif de 3 ans. Mais à notre grande surprise, rien n’a été fait depuis 3 ans», explique Issa Guèye. Il rappelle qu’à son arrivée au pouvoir, l’actuel président de la République avait promis d’indemniser tous «les guerriers à hauteur de 10 millions F Cfa plus une maison».
«Il le dit dans toutes les cérémonies militaires mais à notre grande surprise, il n’y a qu’une cinquantaine de militaires qui ont bénéficié des largesses du Président», s’offusque le président de l’association. M. Guèye souligne que ceux qui ont servi moins de cinq ans, avant de connaître un malheur, devaient bénéficier d’une pension mixte. «Ce droit n’a pas été appliqué durant le règne de Abdoulaye Wade et la revendication des jeunes invalides reste entière sous Macky Sall», regrette-t-il.
Aussi, indique-t-il, les grands mutilés devraient être dotés de «gardes malades» pour les assister. «Ils doivent bénéficier d’un pécule dit «garde malade» mais ce pécule n’a jamais existé. Pour continuer à vivre, les mutilés se font aider par leurs femmes ou leurs enfants qui écourtent leurs études pour les assister», dénonce le président l’association.
«Nous dénonçons ce manquement. Là où les femmes d’ambassadeurs touchent 500 000 francs, la femme de celui qui se battait pour sa Nation jusqu’à se retrouver cloué au lit, devrait bénéficier d’un montant raisonnable», plaide-t-il.
Promesses non tenues de Macky Sall
Les militaires invalides saluent la décentralisation opérée sur le volet sanitaire qui a permis de dépasser les deux pharmacies agréées à Dakar où tout le monde venait s’approvisionner. Cependant, soulignent-ils, cette décentralisation n’est pas suivie de mesures qu’il faut pour avoir un succès. «Les pharmacies des régions qui accumulent des factures non payées de l’Etat ne peuvent plus pourvoir de médicaments», révèle M. Gaye.
Concernant la réinsertion socioprofessionnelle, il a évoqué la loi 75-92 du 20 décembre 1935 qui fixe le régime des emplois réservés aux jeunes militaires invalides mais qui ont encore des capacités résiduels qui leur permettent de travailler dans la Fonction publique. «Les Premiers ministres, à commencer par Souleymane Ndéné Ndiaye, ont sorti une circulaire. Mais depuis lors, il n’y pas un invalide reçu dans la Fonction publique», dénonce Issa Guèye. Pour résorber ces manquements, les éclopés de l’Armée demandent la mise en place d’une commission mixte qui sera chargée de régler définitivement le problème.
«Ce que nous réclamons n’est pas de la charité, c’est notre dû, cela nous appartient», insiste Ahmet Adama Sy, blessé le 10 juillet 2002 à Sindian. Il attend depuis cette date, une évacuation en France pour y être soigné. Libéré après 16 ans et 4 mois de service dans l’Armée, Adama Sy «ne bénéficie d’aucune de pension». Il interpelle le président de la République et l’invite à revoir la situation pour mieux traiter le dossier des anciens militaires invalides.
Aly Gadèle Diallo a perdu sa jambe à Djibidione, le 19 mai 2001. Pour lui, le respect et la prise en charge des blessés de guerre, qui sont un devoir pour l’Etat, permettent non seulement de valoriser l’Armée nationale mais aussi de motiver les jeunes à embrasser et à respecter cette profession. «Si on ne satisfait pas les amputés et blessés de guerre, cela se répercute sur l’esprit et le moral des combattants de l’Armée.
Connaissant la situation et le sort des invalides et blessés, les militaires qui sont au front ne seront pas motivés et ceux qui y seront n’auront même pas le courage d’aller combattre, attaquer l’ennemi et progresser», soutient Gadèle.