''LES OBJECTIFS DU PSE SONT AMBITIEUX ET RÉALISTES''
CHRISTINE LAGARDE A L’ASSEMBLÉE NATIONALE

Hôte de l’Assemblée nationale, hier, la directrice générale du Fonds monétaire international (Fmi), Mme Christine Lagarde, a prononcé un discours mettant l’accent sur le réalisme des ambitions du Plan Sénégal émergent (Pse). Elle a aussi insisté sur la prudence dans la gestion budgétaire
Devant les députés, la directrice général du Fonds monétaire international (Fmi), Christine Lagarde, leur a salué en wolof «Asalamu Alekum!». Mme Lagarde qui était très attendue par les parlementaires du « pays de la Teranga », a cité Senghor et Sembène et a tiré une citation de notre hymne national.
Elle s’est aussi essayée en wolof, à travers le proverbe : « Ku la jëkk ci néeg bi moo lay wax ni ngay toogué ». Et sa tradition est la suivante : « C’est à celui qui te précède dans une pièce de te dire comment t’asseoir ».
Le ton est donné. Depuis longtemps, le Sénégal n’a pas reçu un patron du Fmi. Christine Lagarde est la première à fouler le sol sénégalais, ces 15 dernières années. Cette femme au parcours exceptionnel a effectué sa visite au pas de charge.
Après la présidence, la Primature, la Bceao, elle s’est adressée à l’Assemblée nationale. De 17h07 à 17h37, la dame aux cheveux argentés s’est entretenue avec les députés pour leur dire ce qu’elle pense de l’économie sénégalaise. « Le Sénégal peut s’enorgueillir de grands succès.
Votre démocratie est un modèle pour l’Afrique, comme en témoigne la diversité de ce Parlement. Vous êtes reconnus pour la qualité de votre système éducatif, le dynamisme de votre société civile et la qualité de votre administration publique », a-t-elle lancé à l’endroit des députés.
« Le Sénégal ne peut pas, pour autant, se reposer sur ses lauriers. Il se trouve aujourd’hui à un tournant décisif ». La raison, estime-t-elle, c’est que les fondations de la croissance ont certes été posées, mais celle-ci n’est ni vigoureuse ni suffisamment bien partagée pour libérer le potentiel du pays, réduire sensiblement la pauvreté et assurer un avenir meilleur aux jeunes Sénégalais », a-t-elle affirmé.
Heureusement, rappelle l’hôte des députés, il existe une feuille de route. « La nouvelle stratégie de développement du gouvernement, le Plan Sénégal émergent (Pse), propose une trajectoire ambitieuse mais réaliste au terme de laquelle le Sénégal deviendrait un pays émergent. Cette trajectoire repose sur la nécessité d’accélérer et d’approfondir les réformes requises par ce plan », a-t-elle poursuivi.
Redynamiser l’économie
Ces derniers temps, souligne-telle, l’avenir de l’Afrique a été au cœur de l’agenda du Fmi. Evoquant une conférence tenue à Maputo, l’année dernière, sur le thème «L’essor africain», Mme Lagarde rappelle l’importance de l’apprentissage entre pairs pour atteindre l’émergence. Elle s’est voulue didactique en s’appuyant sur ce dicton populaire wolof susmentionné et les connaissances du Fmi pour exprimer sa vision du Sénégal émergeant qui est structurée autour de trois points.
D’abord, elle s’est intéressée à la voie à suivre pour «l’essor africain» et les implications pour le Sénégal. Il importe, a-t-elle affirmé, d’accélérer la transformation structurelle, de mettre en place des infrastructures qui font cruellement défaut, et de mieux partager les bienfaits de la croissance. «
Pour devenir un pays à revenu intermédiaire comme il y aspire, le Sénégal devra s’employer à dynamiser son économie, à offrir plus d’opportunités aux petites et moyennes entreprises et à attirer l’investissement étranger. Cet objectif demandera plus d’efforts dans un environnement mondial incertain », dit-elle.
Pour cela, pense-t-elle, il faut mettre fin à ces résultats décevants de l’économie sénégalaise au cours des 30 dernières années, avec une croissance moyenne d’environ 3,5 %.
Gestion budgétaire prudente et stabilité macroéconomique
Mme Lagarde a soutenu qu’il faut « s’appuyer sur le succès des pairs et tirer des enseignements pour le Sénégal ». D’après elle, le Sé- négal peut tirer les enseignements de l’expérience d’autres pays qui ont traduit leurs intentions en actions concrètes avec succès.
Toutefois, il y a trois enseignements essentiels à prendre en considération. Il faut d’abord mettre l’accent sur une gestion budgétaire prudente et la stabilité macroéconomique, ensuite accroître les exportations en s’ouvrant à l’investissement direct étranger et enfin renforcer les institutions et développer le capital humain.
Réaliser une croissance partagée
« Les objectifs du gouvernement sont ambitieux mais réalistes. Les risques sont considérables, mais gérables, et les opportunités sont vastes. Le moment est venu d’aller plus loin, d’œuvrer ensemble pour réaliser une croissance partagée, riche en emplois et durable.
C’est le bon moment pour renforcer l’émancipation économique des jeunes, des femmes et des plus démunis », a dit Mme Lagarde. A son avis, le Sénégal se trouve effectivement à un tournant. Elle trouve porteuses d’optimisme et d’espoir les rencontres qu’elle a eues dans notre pays. Elle a aussi assuré aux parlementaires que le Fmi sera aux côtés du Sénégal.
«Le but que nous devons nous assigner ne peut être que le développement par la croissance économique. Je dis le développement. J'entends par-là la valorisation de chaque Africain et de tous les Africains ensemble. Il s'agit de l’homme », dit-elle pour reprendre Senghor.