LES PIÈGES D’UNE LIBERTÉ
Lorsque la génération future consultera les annales de l’histoire socio-politique du Sénégal, de l’indépendance à nos jours, elle en déduira certainement que notre époque, celle qui a inauguré l’alternance politique, en 2000, fut riche en péripéties et en rebondissements. Aussi, la qualifiera-t-elle d’une période agitée, pleine de dessous, mais surtout très fragile. Une fragilité due aux ruptures qui s’y sont produites. Comme si, chaque époque correspondait à un temps nouveau, original.
Que dire des tentatives de déstabilisation et harcèlements politiques, de la situation de l’Université, foyer éternel de contestations, de notre Justice ? Chacun de ces éléments, parmi tant d’autres, mérite des observations, et sans complaisance.
Procès Karim
Loin de s’écrire sur une page vierge, le procès de Karim Wade, à peine entamé, enfume déjà beaucoup de polémiques. Ce qui se voit, c’est un choc frontal où les forces d’attaque ont transformé le prétoire en une arène d’affrontements supplémentaires. Se ramène là un conflit opposant l’ancien et l’actuel régime.
Objet de passion politique, de mépris, de haine, ce procès a divisé le corps judiciaire en deux camps. L’un récusant la Cour de répression de l’enrichissement illicite. Les avocats de la défense estiment que ce procès n’est organisé que pour obtenir une condamnation à tout prix de leur client.
Là, ce serait réduire arbitrairement le champ du droit. Car, la recherche de la vérité correspond à la valeur engagée dans la situation jugée. Aussi, pensons-nous que l’application scrupuleuse du droit prime sur tout : la Justice est aveugle et elle ne vise qu’à l’impartialité. Autrement dit que le pouvoir judiciaire n’est sensé connaitre personne. Par conséquent, gouvernés aussi bien que gouvernants sont égaux devant la Justice.
Université
La place singulière qu’occupe l’Université fait d’elle un enjeu majeur. Chose sûre, l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar a subi au cours des deux dernières décennies une croissance sans précédent. La question de l’Université ne pourra en conséquence être résolue que par les acteurs eux-mêmes, à réfléchir sur les symptômes de l’affaiblissement de la morale.
Or, dans nos universités, particulièrement l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Dans ce Haut-lieu du savoir, la défiance de l’autorité n’a-t-elle pas emprunté une vertigineuse décadence avec "l’incinération de la loi cadre des universités" … ? Les Sénégalais pour qui, l’Université équivaut à la nation, sont indignés de ce geste qui déshonore les enseignants, ceux-là qui devraient être des références pour les jeunes étudiants.
Hélas ! Nous comprenons pourquoi notre Université est toujours en ébullition. Elle ne peut changer dès lors que la jeunesse estudiantine, celle-ci qualifiée d’ardente, n’a pas de guides pour sa formation morale. Il appartient aux étudiants, aux citoyens, notamment chaque parent, d’être avec l’Université un auxiliaire de l’enseignement afin d’aiguiller les jeunes à acquérir les qualités qui feront d’eux, des médecins dignes, des philosophes et littéraires éclairés, des mathématiciens efficients, des économistes doués. Et plus tard, les Maîtres de l’Université.
Liberté
Que se multiplient les critiques, les revendications, les contestations dans une République, ce bien commun des citoyens, c’est le plus normal. Les passions fortes engendrent toujours de grandes nations, dit-on. Mais, une liberté qui ne s’exerce pas dans le cadre de la discipline, de la réglementation et de la loi, n’est-elle pas la liberté d’un être rationnel, mais la liberté du monde animal ?
Le privilège de vivre dans un pays libre comme le Sénégal nous impose, certes des droits, mais aussi des devoirs. Il parait urgent de tirer le signal d’alarme sur ces discours multiformes, engagé de manière dangereuse par le prétendu Front Patriotique qui ne cherche qu’à se venger – le 23 juin ! – en cherchant vaille que vaille à déstabiliser le régime bien élu du Président Macky Sall.
Il n’en est guère de plus urgentes ni de plus capitale que la nécessité de conserver l’ordre social. Car notre pays est aujourd’hui moralement déprimé par "la dictature des urgences", pour reprendre le poète Amadou Lamine Sall. Ainsi, nous avons tout intérêt d’éviter de porter des jugements superficiels, hâtifs et imprudents, sur une situation bien complexe dont les conséquences sont à l’évidence incalculables.
Devant la brutalité des événements qui se dressent devant le peuple sénégalais, chacun a sa part de responsabilité, en chef les gouvernants dont la mission est de hâter le bonheur des gouvernés. Ceci est bien compris par le Président Macky Sall.
Pape Thiam
Médina